Corse Net Infos - Pure player corse

Une journée pour la création d'entreprise agricole au Corsica Agropole de San Giulianu


Jeanne Leboulleux-Leonelli le Dimanche 19 Juin 2022 à 17:34

Lundi 20 juin, au Corsica Agropole de San Giulianu, aura lieu la quinzième journée d’information dédiée à ceux qui souhaitent créer une structure agricole : c’est la reprise de ce rendez-vous annuel, après deux ans d’interruption du fait du COVID.



S’installer comme agriculteur ne s’improvise pas : outre les compétences, il faut également disposer d’un terrain adapté et d’un minimum de moyens financiers. Pour aider les jeunes qui se lancent dans la démarche, les pouvoirs publics ont mis en place, depuis plusieurs années, un parcours spécifique. « Ce parcours s’adresse aux jeunes de moins de 40 ans, qui disposent des compétences requises, explique Émilie Ceccarelli du Point Accueil Installation Haute-Corse. Il leur permet de bénéficier d’une aide directe d’au moins 25 000 euros, aide qui peut même aller jusqu’à 65 000 euros. Cette dotation est destinée à couvrir leur rémunération pour leurs deux premières années d’exploitation. Ils s’engagent à pouvoir se verser l’équivalent d’un SMIC la troisième année. Car le projet doit être viable. En complément, ils bénéficient également d’une aide pour les achats de matériel et de bâtiments, fonction de la filière qu’ils ont choisie. Actuellement, la part de cette aide est de 80 % pour la filière caprine et de 60 % pour les autres filières : le pourcentage est déterminé en fonction de choix politiques qui sont réévalués tous les sept ans, à chaque changement de contrat de plan, dans le cadre de la Politique Agricole Commune. Le prochain contrat de plan débute en 2023. »  


Les interlocuteurs rassemblés en un lieu unique
Ce parcours aidé qui, depuis 2016, a permis à 334 agriculteurs de s’installer en Corse, est un peu complexe. Et le COVID n’a rien arrangé… Aussi, des Points Accueils ont-ils été créés en Corse du Sud et en Haute-Corse, jouant le rôle de “guichet unique” pour faciliter les formalités : les interlocuteurs sont en effet nombreux. Outre la Chambre d’Agriculture qui peut apporter un appui dans les domaines techniques et économiques, interviennent également l’ODARC, la DDT, les banques – notamment le Crédit Agricole partenaire historique de la démarche –, la Mutuelle Sociale Agricole ou encore la DRAAF… pas moins de sept institutions ou services qui sont également les partenaires de la journée d’information de lundi prochain. Car l’objectif est bien de faciliter les choses pour le futur agriculteur : il pourra trouver sur place, dans les différents stands qui se tiendront toute la journée, les réponses aux questions qu’il se pose.
 
La journée a été organisée en partenariat avec les trois centres de formation qui, en Corse, préparent au BPREA, le Brevet professionnel de responsable d’entreprise agricole : le Campus CORSIC’AGRI Borgo-Marana, le Campus AGRICORSICA Sartè-Rizzanesi, ainsi que le Centre de Promotion Sociale de Corti. « C’est leur journée ! C’est eux qui en ont organisé le contenu et ont choisi les thématiques des trois tables rondes », précise Émilie Ceccarelli. Sont également les bienvenus à cette journée d’information les agriculteurs déjà intégrés au parcours qui souhaitent des informations complémentaires. Et bien sûr tous ceux qui, en recherche d’emploi, envisagent d’opter pour l’agriculture.
 

Des facteurs handicapants
« Nous bénéficions d’un PDRC spécifique à la Corse, contrairement à ce qui existe ailleurs : c’est un avantage, nous traitons directement avec Bruxelles, il y a moins d’interlocuteurs. Aussi, la Corse reste la première région française en nombre de nouvelles installations agricoles », souligne Émilie Ceccarelli.
 
Mais tout n’est pas rose pour autant et plusieurs facteurs handicapent l’installation de nouveaux agriculteurs, notamment dans le domaine du foncier : « Si on n’a pas de foncier, c’est difficile de s’installer, explique Aurélien Giovannangeli, du Crédit agricole. Il y a un énorme problème sur les indivisions et les successions. Et le GIRTEC est très loin du but. C’est peut-être plus facile en plaine : la monté de la valorisation du foncier encourage à traiter les problèmes de succession. Mais en contrepartie, les prix des terrains sont plus élevés. » De plus, la maîtrise foncière est devenue aujourd’hui une obligation : pour exploiter un terrain, il faut avoir obtenu l’accord explicite, écrit, de l’ensemble des propriétaires ! Aussi, ne compte-t-on plus qu’une reprise pour trois voire quatre départs en retraite.
S’ajoute à cela le problème du réchauffement et du risque sur la ressource hydrique : « Si l’on n’a pas d’eau, c’est compliqué ! Il faudrait une politique régionale, ajoute Guillaume Filippi, de la FDSEA. On n’a pas le cadre juridique pour faire face aux différentes problématiques qui se posent pour la Corse. On doit le faire nous-mêmes, cela ne viendra pas d’ailleurs ! ».
 

Le profil du futur agriculteur évolue
Est-ce ces éléments qui expliquent la désaffection constatée cette année, dans les rangs des élèves des centres de formation ? « Il semble que, suite au COVID, les jeunes privilégient maintenant les formations à distance. Or les lycées agricoles ne sont pas équipés pour cela », rapporte Émilie Ceccarelli.
 
Plus généralement, les perturbations liées à la gestion de cette épidémie semblent avoir contribué à transformer le profil de ceux qui optent pour le métier d’agriculteur. Jusque-là, les installations porcines étaient largement prédominantes. Si elles restent nombreuses, c’est maintenant, et de plus en plus, les productions végétales qui ont la côte ! En 2019, pour treize installations porcines, on compte dix-sept installations en maraîchage et plantes aromatiques – sachant qu’il y a eu, au total, 64 installations.
 
Des néo-ruraux, généralement originaires du continent, disposant d’un niveau de formation souvent élevé, et de moyens financiers à l’avenant, viennent s’installer dans une sorte de “retour à la terre”, sur des marchés très étroits qui ne sont peut-être pas viables. Comme ils créent leur activité généralement sans aide, leur projet n’est pas passé au crible de la cellule professionnelle qui examine les projets des candidats du Parcours Jeune Agriculteur. Le regard professionnel des deux élus qui en font partie, permet d’éviter certaines erreurs : « Nous, on voit s’il y a un problème, que ce soit au niveau technique, économique, financier ou social », explique Jean-Baptiste Ribaut, des Jeunes Agriculteurs. « Ces néo-ruraux sont décalés par rapport aux besoins des consommateurs, analyse Guillaume Filippi. Et le problème, c’est que leur installation a des conséquences pour les autres : car ils occupent le foncier… »
 
Maîtriser le foncier agricole devient ainsi un enjeu de plus en plus prégnant pour l’agriculture corse. C’est pourquoi le 11 juillet prochain, la Chambre d’Agriculture organise une formation sur cette thématique, destinée aux jeunes mais également aux maires qui ne connaissent pas toujours tous les outils qu’ils ont à disposition pour traiter le problème.

Ce qu'il faut savaoir

Où ?
Au CORSICA AGROPOLE de San Giulianu
Quand ? le 20 juin, de 9h00 à 16 heures – Les stands n’ouvriront qu’à 10h30
Pour qui ? Pour tous ceux qui envisagent de s’installer comme agriculteur
 
Présentation et débats 
9h45-10h15 : Présentation du service Santé sécurité au travail, avec débat et démonstration des équipements de protection individuelle.
10h15 à 11h30 : Table ronde « Quel avenir pour le pastoralisme en Corse ? »
11h30 à 13h00 : Table ronde « Tendance aux circuits courts : quelle démarche commerciale adopter ? »
13h : apéritif-déjeuner
14h à 15h30 : Table ronde « Comment créer une place à l’alimentation dans le système éducatif ? »