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Un CHRU en Corse : les acteurs concernés affinent le projet


Thibaud KEREBEL le Mercredi 30 Novembre 2022 à 18:12

Un séminaire s'est tenu à Corte ce mercredi 30 novembre pour évoquer l'éventuelle création du premier Centre hospitalier régional universitaire de l'île. Politiques, universitaires, scientifiques... Les acteurs concernés par le projet on pris le temps de débattre, afin de donner corps à ce qui pourrait être une solution contre la désertification médicale.



Ce mercredi 30 novembre, un séminaire organisé par la Collectivité de Corse
Ce mercredi 30 novembre, un séminaire organisé par la Collectivité de Corse
Toutes les régions françaises disposent au minimum d'un Centre hospitalier universitaire (CHU). Toutes, sauf la Corse. C'est pour combler ce manque que Corte accueillait, ce mercredi 30 novembre, un séminaire organisé par la Collectivité de Corse. Le but : réunir tous les acteurs locaux pour échanger, répondre aux diverses interrogations, et faire avancer le dossier. Car ce projet de Centre hospitalier régional universitaire (CHRU) est dans les cartons depuis quatre ans, mais n'a toujours pas été officialisé. Récemment, en août 2022, le député nationaliste Paul-André Colombani s'était justement mobilisé pour faire remonter la demande auprès du gouvernement, qui avait alors accepté d'ouvrir des discussions. Pas un accord, loin de là, mais une étape supplémentaire de franchie.

Comme l'ont souligné tous les intervenants du séminaire, mercredi, devant un auditoire d'une centaine de personnes, le projet du CHRU de Corse s'inscrit dans un contexte de désertification médicale sur l'île. En effet, le réservoir humain ne cesse de se vider, par manque d’attractivité. « On veut répondre à l’attente de la population corse, qui est de pouvoir se soigner au mieux, et au plus près de chez eux », confie Bianca Fazi. Et à en croire la conseillère exécutive en charge des affaires sociales et de la santé, le CHRU pourrait être la solution à ce vaste problème. « La différence entre un centre hospitalier classique, comme ceux d’Ajaccio ou Bastia, et un CHRU, c’est justement le ‘U’, de ‘universitaire’. Ce type d’établissement, ça attire des jeunes. »

Alors que l’université de Corte ne propose actuellement qu’une première année de médecine, c’est tout un cycle d’enseignement qui pourrait être dispensé « à domicile » pour les étudiants locaux. Plus besoin, donc, de s’exiler sur le continent afin de suivre un cursus universitaire. Un moyen concret d’éviter la fuite des talents, mais aussi de favoriser la venue de jeunes du continent. Le bénéfice serait alors global, car il se répercuterait également sur tous les hôpitaux de l’île. « Des établissements comme Sartène et Corte pourraient profiter d’un externe ou d’un interne, et ça, c’est une aide précieuse », ajoute la conseillère exécutive en charge des affaires sociales et de la santé.

Un "processus de dialogue" avec l'État

Outre le nombre de praticiens, l’autre volet majeur du projet de CHRU, ce sont les compétences spécialisées. Actuellement, la Corse ne propose pas l’ensemble des services de santé de pointe, poussant parfois les malades à s’en aller, pour recevoir des soins hors du territoire. D’après les dernières statistiques, cette situation concerne 30 000 personnes chaque année. « Concrètement, on pourrait pratiquer la neuroradiologie, la cardiologie interventionnelle... Mais également développer tout un secteur de recherche. C'est l'avenir », développe Bianca Fazi.

Mais tout le monde n’est pas si enthousiaste à cette idée, comme le partage Laurent Serpin, anesthésiste et représentant de l’hôpital d’Ajaccio. « Notre crainte, c’est que l’on essaie de se calquer sur ce qui est fait sur le continent sans prendre en compte nos particularités. Il n’y a pas assez d’habitants en Corse pour créer des services experts dans certains domaines, comme la chirurgie cardiaque. Donc j’ai peur qu’on hérite de l’étiquette ‘CHRU’, mais sans toute la compétence qui va avec. » C’est justement pour évoquer tous ces doutes qu'un large panel de professionnels ont échangé pendant la journée de mercredi. L’idée n’étant pas de trouver de solution immédiate, mais d’affiner le plan. Car la Collectivité de Corse sait qu’elle devra avoir tout le milieu médical derrière elle pour mener à bien ce projet, qui pourrait aboutir, au mieux, d’ici cinq ans.

Mais pour le moment, rien n’est moins sûr. Car l’État, unique financeur potentiel, n’a pas encore donné son aval. « Il y un processus de dialogue en cours, qui connaît d’ailleurs un certain nombre de difficultés », note Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif Corse. « Moi ce que j’attends et ce que j’espère du gouvernement, c’est que l’on nous dise que sur le principe, on valide le cheminement qui est le notre. Et que le gouvernement, sous réserve de ce que seront nos décisions, nous accompagnera jusqu’au bout du chemin. Cela se joue dans les semaines à venir. » Après avoir mis d’accord les scientifiques, il faudra donc convaincre les politiques. Suite au prochain épisode.