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Sécheresse : les propositions du RN pour améliorer la gestion de l'eau en Corse


M.V. le Samedi 1 Avril 2023 à 11:17

La date ne relève pas du hasard. Au lendemain de la présentation du "plan eau" par Emmanuel Macron, et au moment même ou l'exécutif nationaliste présentait sa politique de l'eau à l'Assemblée de Corse, le Rassemblement national tenait à Bastia une conférence de presse à l'occasion de laquelle les représentants locaux du parti, François Filoni et Nathaly Antona, ont dévoilé les grandes lignes de la politique de gestion de l'eau qu'ils souhaitent pour l'ile



Les représentants locaux du RN en Corse
Les représentants locaux du RN en Corse
- Vous avez organisé votre point presse au lendemain de la présentation du "Plan Eau" du Président Macron, et le jour  où l'exécutif présente sa politique de l'eau à l'Assemblée de Corse quel est le sens de votre intervention ?
- François Filoni Le Président a sorti le "Plan Eau" de son chapeau pour faire un écran de fumée à la contestation sur les retraites. Notre intervention vient de plus loin. Elle est le résultat d’un travail important sur la situation de l’eau au niveau international, national et local. D’autant que le plan eau du Président Macron et celui du Président Simeoni, annoncé ce jour, ont beaucoup de similitudes. Ils ne sont qu’une addition de sparadraps sur une jambe de bois, très loin des enjeux environnementaux.
A l’horizon 2025, l’ONU prévoit que, si la situation actuelle n’évolue pas favorablement, un tiers de la population mondiale sera concernée par le stress hydrique. La crise de l’eau, dont les médias se font l’écho de plus en plus souvent, devient un réel enjeu géopolitique. La Corse est aujourd’hui concernée par ce risque de pénurie d’eau. L’intervention du préfet, au mois d’août 2022, sur les risques de rationnement de l’eau aux populations, est un avant-goût de la catastrophe qui guette la Corse.
Les solutions de sobriété et les mesurettes du plan eau de l’équipe Simeoni ne règlent rien sur le fond. Pire, elles aggravent la situation pour l’avenir, car la crise de l’eau en Corse est structurelle et non conjoncturelle.

- Vous critiquez sans concession la politique de l'exécutif nationaliste...
- Le constat n’est pas simplement le nôtre. Il est d’abord celui de la Chambre régionale : "Bien que la Corse connaisse des précipitations abondantes, de l'ordre de huit milliards de mètres cubes par an, elle se trouve de plus en plus exposée aux conséquences du changement climatique. Une baisse sensible des débits annuels moyens des cours d'eau depuis plusieurs années fragilise aujourd'hui ses ressources et nécessite la mise en œuvre d'une politique de gestion de l'eau adaptée . Le plan d'investissement qui y est attaché, estimé à 600 millions d'euros, n'est pour l';essentiel pas financé".
En ce qui concerne l"Office d'équipement hydraulique de la Corse, la Chambre régionale des comptes n'st guère plus clémente. Elle souligne "les performances hétérogènes des ouvrages hydrauliques et des rendements bruts particulièrement médiocres ". Un écart de l'ordre de 30 millions de mètres cubes entre les volumes d'eau facturés et les volumes d'eau distribués est pointé du doigt. Le manque à gagner estimé par la Chambre régionale des comptes s'élève à 3 millions d'euros.

- Sur quoi se base votre constat ?
- Notre constat est basé sur une comparaison concrète avec la Sardaigne où les politiques ont pris toutes leurs responsabilités dans le domaine de l’eau. En multipliant la construction de barrages dans des zones de montagne et en fournissant l’eau aux zones côtières, via des canaux, ils assurent à la Sardaigne pratiquement 5 années de réserve.
Ce constat tout le monde peut le partager. La Sardaigne reçoit chaque année 8 milliards de mètres cubes pour un territoire de 24 000 km2. La
Corse, avec un relief montagneux plus avantageux, reçoit, elle aussi, 8 milliards de mètres cubes pour un territoire de 8700 km2, soit trois fois plus d’eau par mètre carré que la Sardaigne. Résultat, les Sardes stockent 1,8 milliards de mètres cubes alors que la Corse en stocke seulement 107 millions, soit 15 fois moins. Autre effet de l’eau à profusion pour les Sardes, son prix : 1,45 € le mètre cube contre 4,5 € en Corse.

- Vous annoncez une campagne pour informer la population insulaire sur ce sujet...
- Oui. Notre objectif est de dire aux Corses qu’il faut, dans le domaine de l’eau, une approche globale. D’abord, l’eau c’est la vie, mais si nous voulons aussi l’autosuffisance alimentaire, la condition sine qua none c’est de permettre aux agriculteurs d’accéder à l’eau en abondance.
La France, après avoir été longtemps autosuffisante en matière alimentaire et un grenier de l’Europe, a perdu de sa superbe.
Aujourd’hui, on importe 28% de nos légumes et, plus grave, 71% de nos fruits. La Corse brille plus par les couches de béton sur l’île que par ses productions de fruits et légumes souvent concurrencées par des pays sans normes environnementales.

- Quelles solutions ?
- Une étude du cabinet Utopies, réalisée en 2017, fait valoir qu’en Corse la part des produits agricoles locaux consommés par les ménages insulaires des grandes villes est de 2 % en moyenne, Bastia affiche une autonomie alimentaire de 2,66 % et Ajaccio de 1,88 %. Pourtant, cette même étude assure qu’en quatre ans, la Corse pourrait atteindre les 80 % d'alimentation locale.

- Vous prônez donc pour une autosuffisance alimentaire de la population corse ?
- Bien sur. Nous devons, par une politique localiste, assurer l’autosuffisance alimentaire de la population corse. Avec une superficie de près de 35 000 hectares de terres agricoles, la maîtrise de l’eau devient un enjeu majeur face au tout-béton qui la défigure. Nous devons donner au monde agricole les moyens de relancer les productions de fruits et légumes sur notre île. Mais la Corse a d’autres atouts. Grâce à ses sommets qui culminent à plus de 2 000 m, la Corse est l’île de Méditerranée qui possède le plus de ressources en eau. Elle est copieusement arrosée par les pluies, avec plus de 900 mm par an, soit 8 milliards de m3. La construction de nouveaux barrages hydrauliques permettrait de stocker l’eau et de produire de l’électricité. Cette énergie renouvelable ne produit pas de gaz à effet de serre ni de déchets. Elle est également la moins chère du marché, loin devant le nucléaire et les autres énergies.

- Vous dites qu'il faut donner à la Corse les infrastructures hydrauliques pour assurer son développement. Quelles sont vos propositions  ?
- Comme l’a développé Nathaly Antona, lors de l’émission In Tantu du 16 mars dernier sur France 3 Corse, il faut refuser les logiques de récession et de rationnement de l’eau qui frôlent le ridicule. Si l’eau doit être respectée, les Corses ont aussi droit à être respectés. Comment peut-on interdire à des citoyens d’arroser leur potager alors qu’ils participent au circuit court ? Comment peut-on rationner les douches et l’hygiène des gens alors que 98% des pluies filent à la mer ?
Il faut donner à la Corse les infrastructures hydrauliques pour assurer son développement par la construction du barrage d’Olivese, votée à l’unanimité en 2007 par l’Assemblée de Corse, ainsi que du barrage de Cavu. Les arguments des élus de la majorité sur un délai de 15 à 20 ans pour construire un barrage sont purement dilatoires ou relèvent de la méconnaissance du sujet. La construction du barrage de Calacuccia a été réalisée en 3 ans tout comme celle du Rizzanese en 42 mois.
Le financement de ce retard structurant doit faire l’objet d’un nouveau PEI avec l’Etat avec comme autre partenaire EDF. En augmentant la capacité de stockage de 300 millions de m³ par la construction de nouveaux barrages hydrauliques et le rehaussement des ouvrages existants, c’est l’avenir même des Corses que l’on assure.