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Le mont de l’Agriate, une mystérieuse montagne sous-marine au cœur d'une expédition inédite


Pierre-Manuel Pescetti le Mardi 7 Juin 2022 à 17:15

Grâce à un sous-marin autonome, les équipes de l’Office Français de la Biodiversité (OFB) et du Parc naturel marin du Cap Corse et de l’Agriate explorent, depuis ce 7 juin, un endroit encore inconnu de tous, ‘’mont sous-marin de l’Agriate’’, une montagne bien particulière qui cache encore tous ses secrets.



Le sous-marin autonome va permettre de cartographier le mont sous-marin de l'Agriate et de photographier les espèces vivantes présentes et leurs habitats. Crédits Photo : Jean-Laurent Massey
Le sous-marin autonome va permettre de cartographier le mont sous-marin de l'Agriate et de photographier les espèces vivantes présentes et leurs habitats. Crédits Photo : Jean-Laurent Massey
Depuis ce 7 juin, les équipes de l’Office Français de la Biodiversité (OFB) et du Parc naturel marin du Cap Corse et de l’Agriate se glissent dans la peau d’explorateurs. Pendant cinq jours, ils vont tenter de percer les secrets d’une montagne. Pas n’importe laquelle. Celle-ci est enfouie sous les flots, au nord-ouest du désert des Agriates. Située à 35 kilomètres des côtes, le pic rocheux sobrement appelé ‘’mont sous-marin de l’Agriate’’, culmine à 1 250 mètres sous la surface de l’eau. Sa base, elle, se trouve à 2 300 mètres de profondeur.

Si l’existence de cette montagne sous la mer est connue depuis plusieurs années, ses pentes avaient été explorées sommairement il y a plus de 20 ans. « En 1997, des premières plongées en sous-marins ROV avaient été effectuées mais ils n’avaient pas pu ramener beaucoup de données », indique Jean-Laurent Massey, chargé de mission écosystèmes marins au sein du Parc naturel marin. Depuis, des progrès techniques ont été réalisés dans le domaine de l’exploration sous-marine.

Plongée en sous-marin une demi-lieue sous la mer corse

Cette plongée dans les abysses corses est réalisée par un engin des plus modernes : un véhicule autonome sous-marin. « À la différence du ROV, ils peuvent couvrir plus de surface et donc collecter plus de données », explique Jean-Laurent Massey. Résistant à la pression, l’appareil va survoler le fond en se plaçant toujours à une cinquantaine de mètres au-dessus du plancher marin. Les chercheurs ont une mission bien particulière : obtenir le plus d’informations possibles sur ce site classé Natura 2000.

Cartographie, relief, habitats, espèces vivantes. Grâce à des outils de pointe, le petit sous-marin jaune devrait livrer quelques secrets aux équipes de chercheurs et confirmer leurs hypothèses : « ce mont sous-marin constitue le substrat idéal pour l’établissement de peuplements benthiques comme les coraux et les éponges, et attire également de nombreuses espèces de macrofaune mobile constituée par les mammifères marins, les requins, les poissons et bien d’autres qui se déplacent dans la colonne d’eau ». D’un coût de près d’un million d’euros, l’opération est financée en majeure partie par l’OFB et l’État qui y joue un rôle de protecteur des espaces. « Plus on en sait sur ce genre d’habitats, plus on peut voir les impacts de l’activité humaine et agir dessus pour protéger le milieu », expliquent les équipes du Parc naturel marin.

En surface, le navire français d’exploration archéologique l’Alfred Merlin, récolte les données. À son bord, une vingtaine de chercheurs et d’ingénieurs travaillent de concert avec l’entreprise Abyssa, une société française spécialisée dans l’exploration des grands fonds marins.

Prévue pour cinq jours, l’opération d’exploration est finalement réduite en raison de la météo. Un fort vent a balayé la côte orientale tout au long de ce 7 juin. « Impossible de mettre à l’eau le sous-marin autonome », regrette Jean-Laurent Massey. Il devra, avec ses collègues, se contenter de trois, voire si le temps le permet, de quatre jours d’exploration.

Une deuxième montagne en face d’Ajaccio

Cette opération entre dans le cadre de la campagne d’exploration Seamonti. Elle vise à engranger des informations sur les monts sous-marins de la façade occidentale de la Corse. À l’ouest d’Ajaccio, à 33 kilomètres des côtes, un autre mont sous-marin a déjà été exploré précédemment. Également classé Natura 2000, ce site d’origine volcanique a également ses caractéristiques propres. Il culmine à 1 555 mètres de profondeur et sa base se situe à 2 200 mètres sous la surface de l’eau.

Les deux formations géologiques sont rares dans la partie occidentale méditerranéenne, et une seule, celle des agriates, est sur le territoire du Parc naturel marin. S’ils ne devraient pas trouver de coffres remplis d’or au fond des agriates, les chercheurs impliqués dans l’opération pourraient remonter un tout autre trésor : « Les monts sous-marins sont des zones où il y a un fort développement de vie. Nous allons forcément découvrir ce que cette montagne sous l’eau a de bien particulier », conclut Jean-Laurent Massey.