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Jean-Charles Orsucci : "la non-prise de position de Gilles Simeoni a favorisé la montée de l’extrême droite"


Cécile Orsoni le Lundi 10 Juin 2024 à 15:44

Avec 42,29 % des voix à Bonifacio, Jean-Charles Orsucci, 22ème sur la liste de Valérie Hayer, a réussi à contrer la vague du Rassemblement National. Le maire attribue ce succès à une forte mobilisation locale et à son engagement envers la majorité présidentielle. Malgré son bon score, il n'a pas réussi à être élu au Parlement européen. Au lendemain de la dissolution de l'Assemblée nationale annoncée par Emmanuel Macron, Jean-Charles Orsucci exprime ses inquiétudes et regrette le manque de soutien de Gilles Simeoni.



Photo archives CNI
Photo archives CNI

- Comment réagissez-vous à la décision d’Emmanuel Macron de dissoudre l’Assemblée nationale ?
- Je regrette que cela ressemble à une réponse à l’injonction qu’a formulée Jordan Bardella avant ces élections, mais à la fois je ne vois pas d’autres réponses face à un tel score du Rassemblement National pour redonner la parole au peuple.

- Cette décision signifie-t-elle la fin du processus de Beauvau ?
- Le processus avait été initié par le Président de la République et avait été porté par le gouvernement actuel. À partir du moment où il y a une dissolution, il faudra attendre que le nouveau gouvernement soit nommé. Soyons clairs, si demain Emmanuel Macron est contraint de nommer Jordan Bardella, le processus est mort. Les tenants du RN sont sur une vision jacobine de la France, ils veulent une France une et indivisible sans aucune aspérité. Je rappelle qu’ils étaient de ceux qui voulaient condamner à mort les nationalistes corses dans les années 80. Le RN a toujours été contre le processus de décentralisation.

- Le score en Corse montre le RN a 40,76 %, davantage qu’au niveau national (31,7%). Comment expliquez-vous ce succès ?
- Je me souviens d’une discussion avec l’un de mes professeurs de droit à l’université de Corse, Jean-Yves Coppolani, qui nous expliquait que toutes les îles du monde avaient tendance a se replier sur elles-mêmes, car, pour elles, le danger venait de l’extérieur. En Corse comme ailleurs, les gens sont particulièrement décomplexés vis-à-vis de l’extrême droite. Où est le peuple de Nicoli, de Casanova, de résistants qui ont fait l’histoire de ce pays ? C’est la question que l’on peut se poser.


- Gilles Simeoni a refusé de donner une consigne de vote. Cela a-t-il impacté le scrutin, selon vous ?
- Il est clair que lorsque l’on occupe un poste aussi important que celui de Gilles Simeoni, on a le devoir de se positionner. Le non-choix est un choix. Sa non-prise de position a favorisé la montée de l’extrême droite; du moins, elle n’a pas empêché d’atteindre les sommets qu’elle atteint aujourd’hui. J’attendais davantage de lui. J’avais déjà été déçu lors du second tour de l’élection présidentielle. Cependant, je pense que quand bien même Gilles Simeoni aurait pris position, on n’aurait pas pu contrer cette lame de fond qui touche notre île.

- Organiser une campagne en seulement trois semaines, n’est-ce pas un faire le jeu du RN et prendre le risque de se retrouver avec un gouvernement d’extrême droite ?
- Il n y a pas besoin d’avoir une campagne courte pour courir le risque d’avoir un gouvernement d’extrême droite aux responsabilités. Depuis 2002, l’extrême droite ne cesse de prendre du terrain. La droite républicaine, selon moi, n’existe quasiment plus. Les membres de LR ressemblent fortement à une béquille du Rassemblement National. Le peuple va choisir ses élus et il devra en assumer ses choix. Le peuple français aura les élus qu’il mérite.


- Comptez-vous vous présenter aux élections législatives ?
- Au moment où je vous parle, ce n’est pas à l’ordre du jour. Je n’ai pas vocation à être candidat à chaque élection. J’essaierai d’être utile à la place qui est la mienne. Je vais regarder avec attention la vision et les valeurs des candidats dans ma circonscription. Je vais m’inscrire dans la sociale démocratie que j’ai toujours défendue. Je crois en l’avenir républicain de la France même s’il est clair que ce vote a l’extrême droite marque un moment important de l’histoire. Je ne pensais pas qu’un jour, de mon vivant, je serai face à la possible accession au pouvoir de l’extrême droite.

Jean-Charles Orsucci dimanche matin à l'heure du vote (Photo François Canonici)
Jean-Charles Orsucci dimanche matin à l'heure du vote (Photo François Canonici)