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Grand Café Napoléon : un pan de l’histoire de la ville d’Ajaccio a fermé ses portes


Philippe Peraut le Vendredi 9 Août 2019 à 07:27

Déclaré en faillite, cet établissement emblématique de la cité impériale, l’un des plus anciens encore en activité, a fermé ses portes fin juillet. Avec ce lieu très recherché des Ajacciens, ce sont près de 200 ans de l’histoire de la ville qui se ferment…



Photo Michel Luccioni
Photo Michel Luccioni
Très connu des Ajacciens, bien sûr des plus anciens, ceux qui ont connu « U seminariu », « U Solferino » ou la caserne Abbatucci, le Grand Café Napoléon était une véritable institution. Pour des raisons économiques, il a fermé ses portes fin juillet, en plein cœur de l’été.
Un établissement, sans doute l’un des plus anciens de la ville encore en activité, créé, même s’il est difficile de l’établir avec précision, au cours du XIXe siècle, vraisemblablement dans les années 1830.
« L’actuel Cours Napoléon, explique Antoine-Marie Graziani, a été créé à la volonté de l’Empereur, en 1802. La colline avait été sciée pour que le Cours s’étale de l’actuel Diamant à Sainte-Lucie. L’objectif étant, à l’époque, d’ouvrir une nouvelle route pour aller à Bastia. Il faut savoir que toute la terre ramassée, servit à l’époque de remblais en contrebas de la rue Fesch qui donnait directement sur la mer. On appela cette artère, « la nouvelle ville ». »

L’ortu Negroni
Dès le début du XIXe siècle, l’artère est vide et les terrains sont, peu à peu, achetés par lot. L’un d’eux, ( un rectangle de l’actuelle rue Stephanopoli à la rue de l’Assomption en remontant jusqu’à la Préfecture) est l’ancien « Ortu Negroni » devenu au milieu du XVIIIe siècle, la propriété Baciocchi. « Elle a définitivement disparu avec toutes ces ventes, reprend l’historien, c’était un morceau qui fermait la ville. Le Grand Café Napoléon a dû faire partie de ces lots puisque dans le sillage des maisons construites, les premiers commerces ont vu le jour. »
Ouvert dans les années 1830, l’établissement suivra l’évolution de la ville jusqu’à nos jours. Le Cours deviendra, peu à peu, un lieu de promenade, particulièrement, ce trottoir. Malgré l’essor de cette partie principale de la ville, l’établissement, qui passera entre les mains de plusieurs propriétaires (les familles Cuttuli et Casalonga entre autres), subsistera encore et encore devant une expansion qui coûtera cher au niveau patrimonial (Seminariu, hôpital militaire, Théâtre Saint Gabriel), entraînant dans son sillage, la perte d’autres établissements emblématiques (Hôtel Solferino, Café d’Ajaccio, tous les anciens bars du Cours Napoléon) jusqu’à la fermeture, plus récente, des trois cinémas et de la Galerie Napoléon. Le Grand Café lui, fut, avec sa scène et son arrière salle, un lieu dansant jusqu’à la Grande Guerre. Plus tard, il s’adapta contre vents et marées pour devenir, plus récemment un lieu « chic » où se rendaient de nombreux élus mais pas que…

 

(Photos Michel Luccioni)
(Photos Michel Luccioni)
Vers une réouverture
« Nous avions l’habitude d’y aller, souligne un ajaccien, c’était un endroit jadis très fréquenté par tout le monde. Avec sa fermeture, c’est une partie de notre enfance qui s’en va. Et c’est d’autant plus dommageable que beaucoup de lieux mythiques du Cours Napoléon de notre enfance, ont aujourd’hui disparu… ».

Situé à deux pas de là, Pascal Bruno, responsable du Bistrot du Cours, était malheureusement aux premières loges. Il a vu baisser la fréquentation. « Au-delà de ce que l’on peut avancer comme argument, il y a je pense deux facteurs importants à retenir : la fuite de fioul lors d’une livraison en contrebas de l’établissement en 2012, ce qui entraîna sa fermeture durant plusieurs mois en raison des remontées par les dalles, et puis le gros investissement des propriétaires. La conjoncture actuelle avec une artère complètement déserte, a malheureusement précipité la fin. C’est bien dommage… »