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Don d'organes : Ajaccio s'intègre dans un nouveau protocole de prélèvement, une première en Corse


Patrice Paquier Lorenzi le Mardi 30 Janvier 2024 à 17:22

Le centre hospitalier d’Ajaccio va prochainement devenir le premier établissement en Corse à intégrer un nouveau protocole de prélèvement d'organes appelé le Maastricht III. L’Agence de Biomédecine a validé ce mardi 30 janvier le projet porté par l'établissement. Un agrément qui va permettre d’augmenter le nombre de donneurs potentiels sur l’île.



Un lieu de mémoire dédié aux donneurs d'organes a été inauguré ce mardi après-midi à l'Hôpital d'Ajaccio.
Un lieu de mémoire dédié aux donneurs d'organes a été inauguré ce mardi après-midi à l'Hôpital d'Ajaccio.
Engagé dans une volonté d’accroître ses possibilités concernant le don d’organes, le CH d’Ajaccio va pouvoir proposer le prélèvement d’organes sur les donneurs décédés après arrêt circulatoire, de type Maastricht 3. Jusqu’à présent, seuls les organes concernant une mort encéphalique pouvaient être prélevés comme l’explique Marjorie Celli, coordinatrice en prélèvements d’organes et de tissus à l’hôpital d’Ajaccio : « Jusqu’à présent en Corse nous avions deux établissements préleveurs, mais qui ne greffent pas, Ajaccio et Bastia. Nous avions chaque année une dizaine de donneurs potentiels, car nous ne pouvions prélever que des patients en état de mort encéphalique. C’est une mort rare, avec un cerveau qui est mort, mais avec un cœur qui continue à battre pendant quelques heures et qui nous permet d’organiser un prélèvement d’organes dans l’urgence. C’est quelque chose qui se fait en Corse depuis une dizaine d’années. Maintenant en France, il est également autorisé d'effectuer des prélèvements sur les donneurs à cœur arrêté. Ce sont des donneurs qui se trouvent en réanimation et qui ont un arrêt thérapeutique et sur lesquels on peut envisager un prélèvement d’organes. Cela augmente maintenant considérablement les possibilités des donneurs sur Ajaccio et on, l’espère, bientôt sur Bastia.  Nous avons déposé notre projet auprès de l’Agence de la Biomédecine, qui l’a validé ce jour et cela va nous permettre de proposer d’ici quelques mois le don d’organes à d’autres gens. La mort encéphalique est une mort très rare, c’est 3 000 décès au niveau national sur les 600 000 enregistrés chaque année. Nous espérons, maintenant, avoir 10 donneurs potentiels en plus sur la Corse-du-Sud chaque année grâce à la mise en place de cette activité ».
 

« Tous donneurs sauf en cas de refus de son vivant »

En France, la loi de la bioéthique indique nous sommes tous donneurs sauf volonté exprimée pendant notre vivant. Le don d’organes et de tissus et avant tout un acte de générosité et de solidarité entièrement gratuit. La loi interdit toute rémunération en contrepartie de ce don. Le nom du donneur ne peut être communiqué au receveur et réciproquement : « C’est un protocole compliqué, qui se réfère également à la loi. En France, on est tous donneurs sauf si on a fait opposition de son vivant. La coordination recherche sur le registre national des refus si le donneur potentiel était opposé de son vivant. Les gens ne connaissent pas forcément le registre national des refus, mais nous allons à la rencontre des familles, pour rechercher une éventuelle opposition de son vivant au don d’organe. Généralement, nous avons ici à Ajaccio, des familles qui font confiance à notre service et à la réanimation. Ce sont des gens qui, pour le Maastricht 3 notamment, vont rester en réanimation une dizaine de jours donc la famille connaît l’équipe et les soignants. Il y a un respect mutuel et de la confiance qui font que cela participe au bon fonctionnement de la procédure » ajoute Marjorie Celli.
 
Un Olivier comme lieu de mémoire des donneurs d’organes

Un seul donneur permet souvent de greffer plusieurs malades. Le rein est l’organe le plus couramment greffé, suivent le foie, le cœur, les poumons, le pancréas et des parties de l’intestin. Mais dans le cas du programme des donneurs décédés à cœur arrêté, type Maastricht 3, la règlementation est différente : « Concernant les organes, nous avons fait un dossier pour tous ceux qui sont possibles comme le rein, le foie, et les poumons. En France, il n’y a pas encore d’autorisation possible pour le cœur, pour ce protocole Maastricht 3, c’est uniquement possible pour les morts encéphaliques. A Ajaccio, on propose également les prélèvements sur tous les tissus pour les patients à cœur arrêtés. Sur tous décès, on peut proposer par exemple un prélèvement de cornée, et offrir la vue à d’autres gens, qui sont greffés ».

Après la réunion de mise en place de l’activité en présence des responsables du CH Ajaccio, dont le Dr Younes Benzidi, porteur du projet, de l’Agence Régionale de la Santé, et de l’Agence de Biomédecine, tous ont participé à l’inauguration d’un lieu de mémoire dédié aux donneurs, aux familles et à leurs proches : « Nous voulions profiter de ce jour où nous mettions officiellement en place cette procédure pour inaugurer ce lieu de mémoire, qui n’existait pas à l’ancien hôpital. Nous nous servions comme lieu de mémoire de la Miséricorde, l’ancien emplacement de la Vierge. Cela nous tenait vraiment à cœur de construire un lieu de mémoire en l’honneur des donneurs et de leurs familles, en reconnaissance de ce geste. Nous avons choisi, quelque chose de symbolique, un olivier et un banc sur lesquels nous avons mis une plaque en leur honneur. Pour chaque donneur, nous accrochons aux branches un ruban vert, signe du don d’organe. Les Corses sont très généreux en matière de don d’organes avec un taux d’opposition très faible par rapport à la moyenne nationale (25% en Corse contre 40% au plan national). Cela ne m’étonne pas du tout que les Corses soient très généreux ! ».

En France, près de 6 000 greffes d’organes ont lieu chaque année et  plus de 63 000 personnes vivent grâce à un organe greffé.