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Crémation : la pratique gagne du terrain mais où en est-on en Corse?


David Ravier le Mardi 31 Octobre 2023 à 18:34

La crémation n'est pas encore entrée totalement dans les mœurs en Corse, mais à l'exemple des nouvelles générations, qui n’ont plus le même rapport à la mort, et des nouveaux habitants qui s'installent sur l'île, elle commence à s’implanter dans la société corse.



Le cimetière marin de Bonifacio. Crédit photo: David Ravier.
Le cimetière marin de Bonifacio. Crédit photo: David Ravier.
 

À première vue, on serait tenté de penser que la société corse, attachée au respect du corps des défunts, serait plutôt réfractaire à incinérer ses morts. Pourtant, aux pompes funèbres Roblot de Bastia, qui a la charge  du crématorium de la ville, la pratique est devenue une alternative courante, qui représente « entre 35 et 40% de nos demandes », assure Jean-Louis Guagnini, le responsable de l’entreprise. « C’est en hausse  chaque année, et ça s’explique aussi bien par une question de coût que par une évolution des mentalités ».

 

Une question de prix

 Pour autant, si la pratique gagne du terrain, il existe des disparités en fonction de la localisation sur l’île. David Catoire, le gérant des pompes funèbres de l’extrême sud, qui s’occupe de la zone qui s’étend de Bonifacio à Porto-Vecchio, affirme que dans son secteur, « sur dix enterrements, nous avons une  seule crémation ». Selon lui, si l’incinération des corps est moins pratiquée, c’est avant tout parce que « cela reste plutôt une mentalité de personnes venues du continent qui s’installent en Corse. Chez les anciens, l’inhumation dans le caveau familial est de mise. Il est rare de voir des Corses choisir la crémation, parce que ça choque encore une partie de la population et que ce n’est pas forcément entré dans toutes les mœurs ». Toutefois, David Catoire assure que la crémation peut gagner du terrain pour des raisons purement logistiques, puisque « les caveaux familiaux étant déjà bien remplis, certains Corses optent pour la crémation, car une urne prend moins de place, et que c’est aussi beaucoup plus économique que de se faire construire un nouveau caveau ».

 

En Corse, une crémation complète coûte environ 3 000 €, soit un prix légèrement inférieur à celui d’une inhumation, qui tourne autour de 3500€ en moyenne. Ce prix de crémation, qui n’est pas fixe, dépend notamment du lieu de décès du défunt et de la localisation du four crématoire. Les deux crématoriums de l’île, situés à Bastia et à Ajaccio et dont la prestation revient respectivement à 1 100€ et 940€, font qu’il est souvent moins cher pour une personne décédée dans le secteur de se faire incinérer. A contrario, pour les habitants éloignés des crématoriums, cela requiert une logistique supplémentaire qui fait grimper la facture. « Pour moi qui suis sur le secteur de Bonifacio et de Porto-Vecchio, le prix final d’une crémation est équivalent à une inhumation parce qu’il faut mobiliser un camion et un chauffeur pour une journée pour déplacer le corps jusqu’à Bastia ou Ajaccio », commente David Catoire.

 

Une évolution des mentalités


En outre, la crémation permet d’éviter certains frais, car « il n’y a pas besoin d’acheter de caveau, ce qui peut être une solution de facilité pour les personnes qui ne possèdent pas de concessions », indique le gérant des pompes funèbres de l’extrême sud. Dans ces cas de figure, il n’est pas nécessaire de disposer d’un lieu d’inhumation, d’autant que sur l’île, une concession se monnaye aux alentours du millier d’euros pour une durée de quinze ans et peut dépasser les 3 000€ pour une sépulture perpétuelle. Surtout, bien que l’urne représente un coût supplémentaire en plus de celui du cercueil, les tarifs restent plutôt abordables avec « une urne de dispersion en carton, premier prix qui démarre à 59€, et une urne de conservation à 99€ », souligne Jean-Louis Guagnini. La plupart du temps, les familles des personnes incinérées choisissent des cercueils peu onéreux, puisque ce dernier sera brûlé en même temps que le défunt, « mais cela peut aussi arriver que des gens choisissent de beaux cercueils en acajou », fait remarquer le responsable des pompes funèbres Roblot de Bastia.

 

Une fois la crémation faite, les cendres peuvent être entreposées dans un caveau ou dans des cages de columbarium, des petites boîtes disposées à l’entrée des cimetières faites pour accueillir des urnes funéraires. Une autre solution également consiste à disperser les cendres du défunt, dans les jardins du souvenir des cimetières, sur un terrain privé, mais également en mer, à condition d’être à 300 mètres du rivage. Cette cérémonie unique, qui sert d’ultime adieu à un proche, tend à se populariser, ce qui témoigne que « la pratique du recueillement commence à s’estomper en Corse, qu’il y a un changement de mentalités vis-à-vis des morts, rappelle Jean-Louis Guagnini. Les gens vont moins rendre visite aux défunts, en particulier la jeune génération, ce qui peut expliquer pourquoi la crémation devient une alternative ».