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Covid-19 : les variants brésiliens et sud-africains réduisent l’efficacité des vaccins


Livia Santana le Lundi 22 Février 2021 à 20:31

Mylène Ogliastro, vice-présidente de la Société française de virologie, virologue et chercheuse à l'Inrae de Montpellier, membre du conseil scientifique de Corse, revient sur l'arrivée des variants.
Efficacité du vaccin, propagation des variants et probabilité de la création d'un nouveaux, la vice-présidente de la Société française de virologie, originaire de Bastia fait le point.



Mylène Ogliastro, virologue et chercheuse à l'Inrae de Montpellier.
Mylène Ogliastro, virologue et chercheuse à l'Inrae de Montpellier.
- Quel état des lieux des variants peut-on faire aujourd’hui ?
- Le variant anglais a émergé au Royaume Uni en Septembre, dans un environnement où l'immunité de la population était faible. Il a très rapidement augmenté en fréquence jusqu'à remplacer la souche de virus qui circulait dans toute l'Europe depuis le début de la pandémie. Ce variant a été détecté en décembre sur le territoire national. Il augmente également en fréquence en France tout comme dans de nombreux pays. Ce variant porte des mutations qui le rendent plus transmissible, environ 50% de plus que la souche initiale. Il a de plus une période de transmission plus longue, on est contagieux plus tôt et plus longtemps. Ce qui a fait passer les mesures d'isolement de 7 à 10 jours.
Les variants sud-africains et brésiliens ont émergé dans un contexte très différent, des populations denses fortement impactées par la Covid-19 et ayant développé un niveau d’immunité élevé. Ces deux variants ont en commun des mutations caractéristiques associées à des ré-infections, suggérant qu'ils sont capables d'échapper au système immunitaire. C'est là leur grand avantage sur les autres souches de virus. Pour l'heure la diffusion globale de ces deux variants semble moindre mais il est très important de les surveiller.

- Quelle est l’efficacité sur les variants des vaccins sur le marché ?
- Les vaccins actuellement disponibles ciblent tous la protéine de spicule du virus. Les mutations de cette protéine portées par le variant anglais ne remettent pas en cause l'efficacité des vaccins contre ce variant. C’est d’ailleurs ce que l’on a pu remarquer en Angleterre ou on commence à voir un effet positif de la vaccination sur l'épidémie. Il en est de même en Israël  qui a vacciné plus de 50% de sa population et où le variant britannique était majoritaire. L'amorce d'une diminution du nombre de cas dans ces pays suggère aussi que les vaccins diminuent également la transmission du virus, ce qui n’était pas établi jusqu’à présent. Concernant les variants brésiliens et sud-Africains, susceptibles de contourner le système immunitaire, même si les vaccins sont moins efficaces, il est probable qu'ils protègent des formes graves de la maladie.
 
- Le Brésilien et le Sud Africain pourraient continuer à se développer ? 
- A terme, ce qui serait inquiétant c’est que nous arrivions à limiter le variant anglais grâce à la vaccination, mais que les variant sud africain et brésilien se retrouvent avec un avantage sélectif, c’est-à-dire qu’ils puissent contourner le système immunitaire. A ce moment-là il y aurait un contexte favorable à l’augmentation en fréquence de ces deux autres variants. C’est pour cela qu’il faut vraiment développer la vaccination dans la mesure de nos moyens et en même temps maintenir les mesures de restriction et les mesures barrières.

-Ils pourraient engendrer une surmortalité ?
- Si nous n'y prenons garde c'est possible. Si par exemple nous arrivons à "éliminer" le variant anglais, ce qui est possible  grâce à la vaccination, les variants sud-africains et brésiliens pourraient se retrouver avantagés  parce qu'ils sont capables de contourner le système immunitaire. Il y aurait là un contexte favorable à leur augmentation en fréquence. C’est un scénario d'évolution qu'il ne faut pas négliger et c'est pour cela qu’il faut vraiment maintenir les mesures de restriction et les mesures barrières en parallèle au développement de la vaccination. Il faut absolument éviter de laisser circuler ces virus car en circulant ils mutent, accumulent de la diversité à partir de laquelle peuvent être sélectionnés de nouveaux variants.

-D’autres variants pourraient voir le jour ?
-Oui. C'est vraiment dépendant du niveau de circulation du virus au niveau mondial. C'est pour cela qu'il faut vraiment avoir une vigilance particulière, pour les scientifiques en surveillant l'évolution et la circulation du virus dans le monde et en informant, et pour les services de l'Etat en limitant les entrées de virus par les contrôles et les tests. 

Photo illustration Michel Luccioni
Photo illustration Michel Luccioni