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Autonomie. Ligue des droits de l’homme : "que la France et la Corse trouvent le chemin de la concorde"


David Ravier le Mardi 4 Juillet 2023 à 06:52

À la veille de session extraordinaire session extraordinaire consacrée à l’avenir institutionnel de l’île, la Ligue des droits de l'homme a voulu apporter sa vision sur le processus de Beauvau et l'autonomie de la Corse lors d’une conférence organisée à Ajaccio. Patrick Baudin, président et président d'honneur de la Fédération internationale des droits de l'homme, était présent pour souligner les étapes nécessaires afin que le processus d'autonomie de la Corse soit bénéfique tant pour l'île que pour la France.



Le président de la ligue des droits de l'homme et président d'honneur de la fédération internationale des droits humains, Patrick Baudin et André Paccou
Le président de la ligue des droits de l'homme et président d'honneur de la fédération internationale des droits humains, Patrick Baudin et André Paccou

- Quelle est la position de la ligue des droits de l’homme sur le débat sur l’autonomie de la Corse?
-  Patrick Baudin : Ce que nous souhaitons de tout cœur à la ligue des droits de l’homme, c’est que la France et la Corse trouvent les chemins de la concorde. Les décennies récentes ont été jalonnées par une succession de violences et de répressions à laquelle il est grand temps de mettre un terme. Nous voyons d'un œil favorable l'évolution actuelle et la recherche d'une solution allant vers l’autonomie et la reconnaissance de la singularité corse. 
En 1991, le Parlement français avait adopté l'idée que le peuple corse était une composante du peuple français, et je pense que c’est la direction dans laquelle il faut persévérer. Toutefois, pour que cela fonctionne, il faut nécessairement prévoir de nouvelles responsabilités permettant à la communauté corse d’anticiper son développement social, culturel, économique et environnemental. Tous ces domaines qui ne sont pas régaliens nécessitent des compétences législatives, le tout assorti d’un cadre administratif décentralisé afin que le projet soit viable, c’est en tout l’objet des discussions qui sont en cours. Nous arrivons à un moment crucial des négociations et de l’avenir corse et nous ne pouvons pas nous permettre d’échouer. Tous ces points seront à débattre dans les mois à venir pour les rendre plus concrets.

 

- Quels sont les points fondamentaux  sur lesquels, selon vous, aucune des deux parties ne se retrouve lésée au sortir des négociations?
- Selon nous, le principe fondamental à respecter c’est l’égalité, qui doit s’accompagner de garanties. Il y a là l’opportunité de construire quelque chose de nouveau, avec une autonomie qui doit être accompagnée afin qu’on ne se retrouve pas avec un système qui constituerait une régression pour la population corse. La principale garantie à apporter, c’est qu’il n’y ait aucune discrimination. Il faut que cet accord soit construit dans un cadre égalitaire, autour d’une société bilingue, qui ne fasse aucune discrimination entre les corsophones et les non-corsophones, et qui donne la possibilité de parler corse à l’Assemblée et dans les services publics, de façon à ce que cette langue puisse perdurer.
Par garantie, nous entendons aussi un respect des acquis sociaux, comme ceux sur le travail, la protection sociale ou la santé par exemple qui ne doivent pas être remis en cause. Ces questions, les politiques français et corses qui doivent les sanctuariser dans un cadre qui offre une véritable démocratie apaisée politiquement et socialement. C’est cette reconnaissance d’une exigence démocratique et de la singularité corse, y compris dans la constitution, que nous souhaitons voir aboutir.

- La place des politiques est souvent abordée dans ce processus, mais les citoyens corses ont également leur mot à dire. Pour que chacun soit entendu, la société civile ne devrait-elle pas être intégrée afin que ces discussions aillent dans le bon sens?
- Évidemment, des débats suivront dans les prochains mois, et nous espérons que les syndicats et la société civile rejoignent cette consultation. C’est la seule manière selon nous de parvenir à une solution d’apaisement qui puisse mettre un terme à des décennies d’affrontement. C’est là d’ailleurs la mission des élus corses, qui doivent créer un cadre équilibré avec la France afin que cela ne devienne pas un marché de dupes. On sait que dans ses négociations avec d’autres territoires, la France a déjà donné l’impression de lâcher du lest alors qu’en réalité, c’était en partie de la poudre aux yeux. C’est à tout prix ce qu’il faut éviter.
Parmi les solutions, nous pensons qu’il serait judicieux d’organiser des réunions avec les citoyens corses dans les semaines à venir pour faire avancer les choses. Nous savons très bien que tous les objectifs ne seront pas atteints, mais il faut néanmoins les proposer et essayer de les obtenir. Si ce ne sont que des demies mesures, de la poussière sera laissée sous le tapis et cela resurgira tôt ou tard, avec à nouveau des débats et des discussions colériques. Si nous souhaitons vraiment apaiser les choses, il devra parvenir à une solution satisfaisante où tout aura été évoqué, voire résolu. Il faut répondre à toutes les aspirations du peuple corse, c’est la seule solution.