Corse Net Infos - Pure player corse

60 décès depuis janvier 2022 en Corse : peut-on dire que l'épidémie de Covid touche à sa fin ?


Livia Santana le Mardi 22 Février 2022 à 16:09

Alors que le gouvernent a opté pour une levée progressive des mesures sanitaires liées au Covid-19 qui pourraient aller jusqu'à la suppression du pass sanitaire fin mars, en Corse plus de 60 personnes sont décédées depuis le 1er janvier 2022, et ce 22 février et 95 personnes sont toujours hospitalisées sur l'ile.
Quels sont, donc, les indicateurs qui permettraient de dire que l'épidémie touche à sa fin ?
La virologue et chercheuse à l'Inrae de Montpellier, qui fait partie du conseil scientifique de Corse, Mylène Ogliastro, revient sur les questions que les Corses se posent et livre son expertise à CNI.



Mylène Ogliastro, virologue et chercheuse à l'Inrae de Montpellier
Mylène Ogliastro, virologue et chercheuse à l'Inrae de Montpellier


- Deux ans après le début de la pandémie, peut-on dire que l’on est « au but du tunnel » ?
- La fin de la 5e vague Omicron se profile. Pour la fin de la pandémie, on peut difficilement se projeter. Il y a eu des avancées grâce à l'immunisation de la population par la vaccination ou de façon naturelle. On marque une étape, la fin d’une période, d’une vague. Est-ce qu’il y en aura d’autres et quel sera le niveau de virulence ? Pour l’instant on ne sait pas. 

- En ce moment, on parle beaucoup de virus endémique, c’est quoi ? 
- Un virus installé de manière durable, adapté aux populations humaines. Ce terme n’a aucune valeur concernant la virulence, ou la transmissibilité. Le virus du rhume et celui de la grippe sont deux virus endémiques, pourtant il y a deux niveaux de virulence très différents. Depuis deux ans le Covid, lui, s’est adapté aux évolutions du paysage immunitaire, d’où les vagues qui se sont succédées. La particularité de ce dernier, c’est qu’il accumule un grand nombre de mutations qui lui permettent de devenir plus transmissible. Dans ce contexte, quid du prochain variant.  

- Le Deltacron ? 
- C’est autre chose, ce qu’on appelle un virus recombinant. Ils vont affecter une même personne, au même moment et s'attaquent aux mêmes cellules qui en échangent du matériel génétique. Comme les deux variants ont coexisté, on a pu avoir des personnes doublement infectées.  

- Peut-on vraiment espérer la fin de la pandémie avec en Corse, plus de 600 personnes contaminées par jour et plus de 60 morts depuis le 1er janvier ? 
- Ce qui a changé c’est le niveau d’immunité de la population. Les gens qui sont hospitalisés sont globalement non-vaccinés ou des personnes immunodéprimées, avec des réponses au vaccin très faibles. Dans un contexte où l’immunité n’aurait pas été aussi développée, on aurait pu s’attendre à un nombre de morts plus conséquent.  

- En Corse les chiffres montrent que la dose de rappel n’a pas vraiment la cote… 
- Beaucoup de personnes ont contracté le virus, c’est également une forme d’immunisation à prendre en compte.  

- À un moment, cela ne sera plus le cas. On peut envisager une quatrième dose ?  
- On ne sait pas, en tout cas ce n’est pas à l’ordre du jour. Elle est proposée pour les personnes immunodéprimées, mais pour le moment, à mon sens, ce n’est pas nécessaire pour les autres. On devrait plutôt faire en sorte que le reste du monde ait accès aux vaccins, car c’est un risque bien plus important de contracter de nouveaux variants.  

- Aujourd’hui, peut-on baisser la garde ? 
- Non. Il est clair qu’il y a un taux d’immunité qui est encore correct. La troisième dose confère une protection vraiment excellente, mais quelle sera la durée ? Pour le moment on ne sait pas. Nous quittons la période de prédilection des virus respiratoires : l’automne, l'hiver, pour aller vers les beaux jours, ce qui devrait diminuer le niveau de transmission. Toutefois, la question va se reposer à l’automne prochain donc il faut continuer à avoir un niveau de surveillance élevé pour détecter au plus tôt les signes d’une reprise épidémique ou l’apparition d’un nouveau variant.  

- Le gouvernement allège les mesures sanitaires et parle même de la fin du pass sanitaire ? D’un point de vue scientifique, c’est prématuré ? 
- Il faut rester vigilants, laisser actifs les réseaux de surveillance. Je pense que les gens ont appris les gestes barrières, avec le niveau de protection dans la population, on peut se dire raisonnablement que dans les quelques mois qui arrivent on va être protégé. La question se posera à nouveau en fin d’été.

Photo illustration d'un hôpital
Photo illustration d'un hôpital