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Sartène : Des Rencontres Napoléoniennes sous le signe de la politique et de la puissance


Nicole Mari le Jeudi 30 Juillet 2020 à 10:25

Du 1er au 3 août se tient au théâtre de verdure en plein Sartène la 6ème édition des Rencontres Napoléoniennes sur le thème : « La politique, la puissance, la grandeur ». Initiées en 2015 par Olivier Battistini, maître de conférence HDR en histoire grecque à l’université de Corse, auteur de plusieurs ouvrages sur l’Antiquité, et par la mairie de Sartène, ces rencontres, très prisées, proposent, en nocturne, à partir de 21h30, et en entrée libre, des conférences sur ou autour de Napoléon, données par des historiens ou spécialistes, insulaires ou internationaux. Explication du programme 2020 par Antoine-Baptiste Filippi, conférencier, étudiant en droit à l’université Panthéon-Sorbonne, qui publiera le 25 août un ouvrage « La Corse, terre de droit ».



Sartène : Des Rencontres Napoléoniennes sous le signe de la politique et de la puissance
- Des rencontres napoléoniennes à Sartène, c’est assez inattendu. On connaît le lien de l’empereur avec Ajaccio, quel est-il avec Sartène ?
- C’est vrai qu’Ajaccio a une légitimité évidente, mais il s’avère que Napoléon est Sartenais par sa grand-mère, Angela-Maria Pietrasanta, qui y habitait. La mairie a identifié la maison où elle a vécu. Ce qui nous donne aussi une petite légitimité pour aborder Napoléon 1er. Sartène a aussi, dans une moindre mesure, un lien assez fort avec Napoléon III qui avait de nombreux Sartenais autour de lui. C’est pourquoi même si 95% des interventions concernent Napoléon 1er, de temps en temps, nous invitons un conférencier pour parler de Napoléon III. Ce n’est que justice !
 
- Quel est le concept de ces Rencontres et comment se distinguent-elles des autres évènements napoléoniens ?
- L’initiative de ces Rencontres vient d’une volonté de la commune de Sartène, de son maire, Paul Quilichini, et de l’adjoint à la culture de l’époque, devenu 1er adjoint, Bertrand D’Ortoli. Ils avaient envie de créer un événement sur Napoléon, mais voulaient faire quelque chose d’un peu différent des manifestations d’Ajaccio, quelque chose qui soit, à la fois, philosophique, intellectuel et, en même temps, accessible à tous. Ils se sont tournés vers Olivier Battistini, maître de conférence HDR en histoire grecque à l’université de Corse, spécialiste notamment d’Alexandre le Grand et dont les nombreux ouvrages font autorité dans le monde entier. Olivier Battistini a réfléchi au concept et à la philosophie des Rencontres. Il a contacté Jean Tulard - historien et spécialiste de Napoléon Ier et de l'époque napoléonienne - et lui a soumis son projet d’approcher Napoléon par des thèmes larges et des voies de traverse.
 
- C’est-à-dire ?
- Par exemple, par l’Antiquité. Les thèmes des premières années étaient : la dialectique terre-mer, les guerres, la notion d’Empire, Napoléon et l’Italie… Jean Tulard a été enthousiasmé par cette approche. Olivier Battistini a, donc, été la cheville ouvrière de cet événement. Il est intervenu très régulièrement. Il sera, encore, l’un des intervenants, de cette sixième édition. Chaque année, nous abordons un thème différent, par des chemins de traverse donc, c’est-à-dire des choses qui ne sont pas forcément connues. Cette année, ce sera « Napoléon et la philosophie politique ». L’objectif est de le décliner sous un format qui ne soit pas contraignant. Nous avons choisi le triptyque : « La politique, la puissance et la grandeur ». Par un heureux hasard, il s’avère que chaque soirée correspond à un aspect de ce triptyque.
 
- Quel est l’aspect de la première soirée ?
- Elle sera consacrée à « La géopolitique de la puissance » avec une première conférencière russe, Anna Moretti, qui parlera du rêve de l’alliance franco-russe. Tout le monde a en tête la paix de Tilsit, mais peu d’historiens travaillent sur la possibilité inespérée de paix avec Paul 1er, le fils de Catherine II. Napoléon lui avait dit : « A vous l’Orient, à moi l’Occident ! ». Le sort du monde en aurait été changé, mais l’assassinat de Paul 1er a enterré tout projet de paix. La paix de Tilsit est-elle une paix en trompe l’œil ? Anna Moretti nous le dira. Dans une suite logique, François Constantini, évoquera le rêve oriental. Il se concentrera sur le Proche et Moyen Orient, mais touchera aussi Constantinople. Comme on sait qu’il existait un projet entre Napoléon et la Russie pour créer un empire d’Orient, son intervention sera particulièrement éclairante. Stéphane Perez-Guidicelli, étudiant d’Olivier Battistini à l’Université de Corte, parlera des modèles héroïques de Napoléon, c’est-à-dire la Grèce, Alexandre Le Grand, César, Charlemagne, la monarchie française… Soit une vision assez européenne, donc géopolitique.
 
- La seconde soirée est consacrée à « La volonté de puissance ». De quoi s’agit-il ?
- Ce titre « La volonté de puissance » est un petit clin d’œil à Nietzsche qui en a parlé. David Chanteranne, qui dirige la Revue napoléonienne, est un habitué des Rencontres puisqu’il est intervenant depuis 2015. Il analysera le passage de Bonaparte à Napoléon - qui est un moment assez fondamental - et dira s’il y a eu des changements entre les deux, s’ils ont la même conception du pouvoir… La seconde conférence « Pensez l’Empire, pensez la guerre » n’est pas un sous-titre innocent. Olivier Battistini prépare un grand ouvrage sur Napoléon qui va s’appeler : « Napoléon et Alexandre : Pensez l’Empire, pensez la guerre ». Une bonne partie des intervenants à ces soirées, moi y compris, sont, d’ailleurs, co-auteurs de ce futur livre. Olivier Battistini évoquera cette notion d’empire et de guerre dans le politique.
 
- Vous intervenez ensuite sur « Le libéralisme latin au service de l’empereur ». Qu’entendez-vous par là ?
- C’est le thème de mon livre qui sortira le 25 août et qui s’appelle : « La Corse, terre de droit : Essai sur le libéralisme latin ». C’est une connotation politique qui n’existe pas vraiment, mais j’observe que Théodore de Neuhoff, Pascal Paoli et Napoléon, loin d’être des personnages différents, ont, en réalité, une conception du pouvoir assez proche. Je veux montrer que Napoléon existe aussi parce qu’il est l’héritier de Pascal Paoli et de Théodore de Neuhoff.
 
- La troisième soirée est axée sur « La grandeur » de l’Empereur. Quels sont les intervenants ?
- Le premier intervenant Jacques-Olivier Boudon, qui est, lui aussi, un habitué des Rencontres, est professeur à La Sorbonne et successeur de Jean Tulard à l’Institut Napoléon. Il évoquera : « Napoléon le Grand : un souverain en majesté », c’est-à-dire comment Napoléon a organisé sa grandeur autour de sa puissance. Ensuite, François Santoni, comme Stéphane Perez qui intervient le premier soir, est un étudiant d’Olivier Battistini à l’Université de Corte. Il va aborder « L’esthétique de la puissance ». Partant du fait que l’esthétique est une force, il montrera comment Napoléon se sert de cette force pour organiser sa puissance et touchera évidemment à l’Antiquité.
 
- Les Rencontres s’achèvent sur Napoléon III et Tocqueville…
- Jean-Baptiste Noé, historien et rédacteur en chef de la revue Conflits, intervient assez logiquement en dernier parce qu’il fait l’ouverture avec Napoléon III. Il parlera de Tocqueville qui était un ministre de Napoléon III, ce que peu de gens savent, de son influence sur l’Empereur et de la nouvelle vision de la France qui aurait pu naître ou qui est effectivement né de ce duo.
 
- L’entrée de ces conférences est-elle libre ?
- Oui ! L’entrée est gratuite. Les interventions dureront à peu près une demi-heure chacune, soit 1h30 par soir, suivies de 20 minutes d’interactions avec le public. C’est un moment privilégié pour rencontrer ces historiens et leur poser des questions.
 
Propos recueillis par Nicole MARI.