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Risque Incendie : Un entrainement militaire prévu à la mi-septembre inquiète Gilles Simeoni


Nicole Mari le Mercredi 23 Août 2017 à 18:16

Pas content et inquiet ! Le président du Conseil exécutif de la Collectivité territoriale de Corse (CTC), Gilles Simeoni, n’a guère apprécié d’apprendre par la page Facebook de la commune de Merusaglia-Ponte Leccia que le préfet de la Haute-Corse, Gérard Gavory, autorisait des exercices de tirs du 12 au 15 septembre sur les communes d’U Poghju di Venacu, San Gavinu di Tenda, Merusaglia et U Pedigrisgiu qui ont donné leur accord. Dans une lettre adressée au préfet, il exprime son inquiétude face au risque d’incendie qui pourrait, en ces temps de forte sécheresse, résulter de tirs, déjà « accidentellement responsables par le passé, d’au moins un feu dévastateur à Santu Pedru di Tenda ». Il demande des garanties sur les précautions prises par les militaires ou le report des manœuvres prévues.



Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif de la Collectivité territoriale de Corse (CTC).
Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif de la Collectivité territoriale de Corse (CTC).
C’est une lettre du préfet de la Haute-Corse, Gérard Gavory, datée du 21 août, adressée au général Pierre Chavancy, et mise en ligne sur le page Facebook de la commune de Merusaglia-Ponte Leccia, qui déclenche la polémique. Répondant à une demande du général, gouverneur militaire de Lyon, commandant la zone Terre Sud-Est, le préfet Gérard Gavory donne son accord « pour la mise en œuvre d’un exercice de l’école de l’aviation légère de l’armée de terre en partenariat avec le 2ème REP de Calvi du 12 au 15 septembre. Cette manœuvre se déroulera, hors terrains militaires, sur les communes de Poggio di Venaco, San Gavino di Tenda, Morosaglia et Piedigriggio ». Les quatre communes ont, également, donné leur accord. Le Préfet précise, dans sa lettre, que « le créneau d’exercice se situe dans la période active des feux de forêts ». Il demande, donc, aux militaires de « porter une vigilance accrue concernant la mission du 12 septembre au col d’Ifana, commune de San Gavino di Tenda. La zone de travail se situe dans le massif forestier de l’Agriate Ouest, susceptible d’être fermé à tout stationnement et à toute circulation en cas de risque d’incendie très sévère ou exceptinnel de la zone 217 Balagne ».
 
Mécontent sur la forme
La commune de Merusaglia-Ponte Leccia publie la lettre sur son site Facebook, histoire d’informer et de prévenir les habitants. C’est là que le président de l’Exécutif régional, Gilles Simeoni, la découvre avec un mécontentement certain et une grande inquiétude qu’il exprime dans un courrier qu’il adresse, le 23 août, au préfet Gavory. Mécontent, d’abord, sur la forme, le préfet n’ayant pas jugé utile de prévenir le président de l’Exécutif, pas plus d’ailleurs que les responsables du SDIS 2B (Service départemental d’incendie et de secours de Haute-Corse), de la demande faite par les militaires et de l’accord donné. Gilles Simeoni apprécie peu d’avoir appris « incidemment » le fait. Et le dit sèchement : « Sur la forme, je regrette vivement que le Conseil exécutif de Corse ne soit pas associé à ce type de décision, eu égard aux prérogatives et aux compétences qui sont les siennes. Il y a là une omission qu’il convient à l’évidence de réparer, y compris si nécessaire par une évolution des textes régissant la matière. Je ne manquerai pas de proposer à l’Assemblée de Corse… une délibération en ce sens dans les prochaines semaines. J’espère que la pratique conduira à prendre en compte cette demande avant même l’évolution du droit positif : cela me semble, en effet, conforme à l’esprit des institutions et à leur bon fonctionnement ».
 
Très inquiet sur le fond
Mais Gilles Simeoni est, surtout, très inquiet du risque d’incendie que font courir ces tirs aux zones concernées en cette période de forte sécheresse et dans un été trop brûlant. « La Corse a été particulièrement frappée par les incendies, cet été. Cette situation a causé des dégâts économiques et écologiques majeurs, a placé les services et les personnels engagés dans la lutte contre le feu dans une situation de tension et de pression permanentes, et exposé les populations à des risques vitaux qui entrainement, légitimement, inquiétude et exaspération vis-à-vis des comportements imprudents ou criminels à l’origine des départs de feu ». La remarque n’est pas neutre puisqu’il y aurai eu, explique-t-il, au moins un antécédent fâcheux lors de ces exercices de tirs ! « Sous réserve des enquêtes en cours, il est avéré que dans un cas au moins, ce sont des manœuvres militaires qui sont à l’origine de feux dévastateurs, consécutivement à des exercices de tirs à San Pedru di Tenda ». D’autant, ajoute-t-il, que la sécheresse exceptionnelle et le manque annoncé de pluie, d’ici à la date des manœuvres, ne ferait qu’accroître encore le risque d’ncendie.
 
Une demande de report
S’étonnant également que, dans ces circonstances, le préfet ait omis d’informer le SDIS 2B, le président Simeoni observe : « Il ne m’est donc pas, en l’état, possible d’être assuré que son avis et ses éventuelles préconisations ont été prises en compte ». Aussi demande-t-il au préfet de lui « confirmer que les précautions prises par les militaires… qu’il n’est, en l’état, et là aussi, pas encore possible de connaître, vous permettent de garantir, y compris de façon publique, et en amont des opérations d’exercice, l’absence totale de tout risque de mise à feu accidentelle, par exemple en excluant tout usage d’engins ou tir de munitions susceptibles d’entrainer une mise à feu accidentelle ». Dans le cas contraire, estime-t-il, « le principe de précaution doit s’imposer et je vous demande de reporter les manœuvres militaires à une date ultérieure ». En droite ligne de ce principe de précaution, le président de l’Exécutif décide de rendre son courrier public et de l’envoyer, en copie, aux militaires, élus et professionnels concernés.
 
N.M.

Voici la copie de la lettre adressée par Gilles Simeoni au préfet de Haute-Corse :

« U Presidente di u Cunsigliu Esecutivu di Corsica
 Le Président du Conseil Exécutif de Corse
AIACCIU, le 23 août 2017

à Monsieur Gérard GAVORY, Préfet de la Haute-Corse
 
Monsieur le Préfet,
 
Je viens d’apprendre incidemment que, par courrier en date du 21 août 2017, vous avez donné un avis favorable à un exercice  de l’Ecole de l’aviation légère de l’Armée de terre, en partenariat avec le 2ème régiment étranger de parachutistes de Calvi, du 12 au 15 septembre 2017.
 
Sur la forme, je regrette vivement que le Conseil exécutif de Corse ne soit pas associé à ce type de décision, eu égard aux prérogatives et aux compétences qui sont les siennes. Il y a là une omission qu’il convient à l’évidence de réparer, y compris si nécessaire par une évolution des textes régissant la matière. Je ne manquerai pas de proposer à l’Assemblée de Corse un projet de délibération en ce sens dans les prochaines semaines. Et j’espère que la pratique conduira à prendre en compte cette demande avant même l’évolution du droit positif : cela me semble en effet conforme à l’esprit des institutions et à leur bon fonctionnement.
 
Sur le fond, votre courrier et l’accord qu’il donne à l’organisation de l’exercice aux dates précitées appellent de ma part les remarques suivantes.
 
Tout d’abord, la Corse a été particulièrement frappée par les incendies cet été. Cette situation a causé des dégâts économiques et écologiques majeurs, a placé les services et personnels engagés dans la lutte contre le feu dans une situation de tension et de pression permanente, et exposé les populations à des risques vitaux qui entraînent légitimement inquiétude et exaspération vis-à-vis des comportements imprudents ou criminels à l’origine des départs de feux.
 
Ensuite, et sous réserve des enquêtes en cours, il est avéré que dans un cas au moins, ce sont des manœuvres militaires qui sont à l’origine de feux dévastateurs, en suite à des exercices de tir, à San Petru di Tenda.
 
Enfin, la sécheresse exceptionnelle continue de sévir et il est possible qu’il ne pleuve pas ou que très peu d’ici à la date prévue des manœuvres, ce qui accroîtrait encore les risques d’incendie.

Au demeurant, vous relevez vous même dans votre courrier que, d’une part, le créneau d’exercice entre le 12 et le 15 septembre 2017, se situe dans la période active des feux de forêt, et que, d’autre part, en partie de la zone de travail se situe dans le massif forestier de l’Agriate Ouest, susceptible d’être fermé à tout stationnement et à toute circulation en cas de risque exceptionnel d’incendie de la zone « Balagna ». Je note, par ailleurs, que le SDIS 2B n’est pas destinataire de votre courrier et qu’il ne m’est donc pas, en l’état, possible d’être assuré que son avis et ses éventuelles préconisations ont été prises en compte.
 
Dans ces conditions, je vous demande, par la présente, de me confirmer que les précautions prises par les militaires, que vous évoquez dans votre courrier et qu’il n’est en l’état, et là encore, pas possible de connaître, vous permettent de garantir, y compris de façon publique, et en amont des opérations d’exercice, l’absence totale de tout risque de mise à feu accidentelle, par exemple en excluant tout tir de munitions.
 
Dans le cas contraire, le principe de précaution doit s’imposer, et je vous demande de reporter les manœuvres militaires initialement prévues du 12 au 15 septembre 2017 à une date ultérieure.
 
Vous remerciant par avance de l’attention qui sera portée à la présente et aux suites qu’elle comporte, je vous prie de croire, Monsieur le Préfet, à l’expression de ma plus haute considération.

Gilles SIMEONI
 
Copie à :
  • M. le Président de l’Assemblée de Corse
  • M. le Sous-Préfet de CALVI
  • M. le Sous-Préfet de CORTE
  • Colonel, chef de corps du 2REP
  • Colonel, commandant le GGD2B
  • Lieutenant-colonel délégué militaire départemental (DMD)
  • Lieutenant-colonel, commandant la base école, Général LEJAY (EALAT)
  • Le Président du Conseil Départemental de Haute-Corse
  • Le Directeur du SDIS 2B
  • Directeur du Conservatoire du littoral
  • M. le Président du Parc Naturel Régional de la Corse
  • Commune de SAN GAVINO DI TENDA
  • Commune de MOROSAGLIA
  • Commune de PIEDIGRIGGIO
  • Commune de POGGIO DI VENACO. »
 

Voici la lettre adressée par le préfet Gavory au général Chavancy autorisant les exercices de tirs :