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Comité de massif de Corse : Un plan de 187 millions € pour revitaliser l’intérieur


Nicole Mari le Lundi 30 Octobre 2017 à 23:19

Les réunions du Comité de massif de Corse ont pour habitude d’être délocalisées dans les vallées de l’île pour affirmer les liens avec les territoires et la volonté d’agir par des actions très concrètes dans des secteurs prioritaires. Lundi matin, le Comité était, donc, à Cuzzà (Cozzano) pour entériner la mise en œuvre du Schéma d’aménagement, de développement et de protection de la montagne corse (SADPM). Un plan de 187 millions € pour revitaliser en 7 ans les villages de l’intérieur avec des projets à court terme en matière de réseau routier et numérique, mais aussi la lutte contre les déserts médicaux ou la réhabilitation des sentiers de transhumance. Explications, pour Corse Net Infos, de Jean-Félix Acquaviva, député de la 2ème circonscription de Haute-Corse, président du Comité de massif de Corse et de l’association des élus de montagne.



U Cumitatu di a Muntagna Corsa in Cuzzà.
U Cumitatu di a Muntagna Corsa in Cuzzà.
- Quel était l’objet de cette réunion ?
- Nous avons réuni un Comité de massif à Cuzzà pour présenter à ses membres le règlement des aides et le processus d’instruction des dossiers pour mettre en œuvre le Schéma d’aménagement, de développement et de protection de la montagne corse. Un Comité technique, composé de fonctionnaires de la CTC (Collectivité territoriale de Corse) et des agences et offices, instruira les dossiers. Une Commission permanente de 18 membres titulaires et 13 suppléants a été désignée et se réunira, lundi prochain, dans la foulée du Comité technique. Elle donnera son avis sur les premiers projets, avant leur passage en Conseil exécutif. Nous avons, également, présenté les critères d’éligibilité des actions dans le cadre des grandes mesures du Schéma avec des taux d’intervention variant de 50% à 90%, nonobstant les autres financements que peuvent obtenir les porteurs de projets. Nous avons fait un focus sur le volet Infrastructures de transports internes du plan pluriannuel d’investissements (PPI) voté par l’Assemblée de Corse au printemps dernier. Enfin, nous avons assisté à la présentation de « Cuzzà, smart village ».
 
- Quels dossiers seront examinés, lundi, par la Commission permanente ?
- Il s’agit d’une dizaine de dossiers arrivés à maturation. Par exemple, l’électrification du site de Bavella pour 300 000 € ou la réhabilitation d’une partie du sentier de transhumance de Caprunale, de Falasorma au Niolu pour 500 000 €. Nous avons désigné le Comité de pilotage pour la mise en œuvre du Centre de formation des métiers de la montagne, qui est un des grands projets prévus par le Schéma, et du plan de formation avec l’identification des besoins. L’idée est de proposer une formation, à la fois, professionnelle et continue, mais aussi de créer le lien avec les étudiants en STAPS et les agriculteurs désireux de se diversifier en termes d’activités de pleine nature, ou de se former à la gestion d’entreprise de ce type. Le plan de formation sera triennal, renouvelable et pourrait être financé par le FSE (Fonds social européen). Les lieux de formation et d’activités seront localisés dans l’intérieur. Quelques sites sont, aujourd’hui, en réflexion à ce sujet.

Route à Orezza.
Route à Orezza.
- De quoi a-t-il été question concernant les infrastructures de transports internes ?
-  Nous avons insisté sur le volet des routes secondaires départementalisées qui sera transféré au 1er janvier à la Collectivité unie de Corse. 45 millions € par an seront mobilisés sur 10 ans pour la politique d’entretien, de réparation et d’investissements de ce réseau. 60 % de cette somme seront dévolus à la conservation des routes existantes et 40 % à des nouveaux projets dans une vision intermodale avec le réseau ferré. 25 millions € seront consacrés, comme prévus, pour réparer les dégâts causés par les intempéries sur les routes de Haute-Corse. L’objectif est d’avoir un schéma routier plus détaillé sur le réseau secondaire en termes de priorisation de projets avec une mise en œuvre effective d’ici à quelques mois.
 
- Pourquoi un tel montant pour la conservation des routes ?
- On s’est rendu compte que la dégradation des réseaux routiers, notamment après les intempéries, était souvent due à un mauvais entretien durant les dix premières années de leur mise en place. Si pendant cette période, aucune politique de conservation et d’entretien annuel n’est menée avec notamment l’édification d’ouvrages hydrauliques, le réseau se dégrade de manière forte et naturelle. En cas d’intempéries, la dégradation peut rapidement devenir radicale. Certains endroits, par exemple, ne nécessitent pas d’enrobé, on peut mettre un enduit plus robuste et moins cher, assorti d’ouvrages hydrauliques pour évacuer l’eau des orages. L’idée est de faire très attention, de faire du sur-mesure pour avoir des réseaux fonctionnels dans les territoires de l’intérieur.
 
- Qu’est-ce qui est concrètement prévu ?
- Nous avons proposé une nouvelle politique routière en termes de classement d’itinéraires. Il s’agit de dénommer les itinéraires selon leur usage afin d’adapter les politiques de conservation et d’investissements. Par exemple, le classement d’itinéraires interdépartementaux tels que l’itinéraire Fium’Orbu – Haut-Taravo – Purticcia, ou des itinéraires transversaux tels que Portivecchju – Zonza – Sartè, importants en termes de désenclavement. Egalement des itinéraires qui désenclavent les vallées de montagne, comme les vallées du Niolu ou du Bozziu.
 
- Quels nouveaux projets pourrait rapidement voir le jour ?
- Des projets de désenclavement de zones. Par exemple, un projet entre Monte et le col de Casabianca à partir d’une piste qui existe depuis le début du 20ème siècle et qui pourrait ramener La Porta à 20 minutes de Casamozza. Une enveloppe de 25 millions est affectée à des projets immédiats, dans les trois ans, dans des zones touchées par les intempéries, comme la Casaluna ou le Boziu où des ponts ont été emportés. Ensuite, nous procéderons à un toilettage des projets des départements qui seront re-hiérarchisés. Des projets en cours, hors intempéries, vont, grâce au financement du PPI (Plan pluriannuel d’investissements), se poursuivre dans le Giussani, le Boziu ou encore dans la région de Campile.

- Après le réseau routier, quelle est l’autre priorité ?
- Le Schéma Montagne pose, également, comme priorités : le numérique, la santé et l’éducation. Une réunion est prévue d’ici peu avec la préfecture concernant le numérique. Il s’agit de s’accorder sur la gouvernance décisionnelle concernant l’installation de pylônes de téléphonie mobile pour résorber les zones blanches et mettre la 4G sur l’ensemble du massif. Le Schéma fixe l’objectif prévisionnel de 80 pylônes à l’horizon de 7 ans. Grâce aux fonds Massifs qui proviennent notamment du reliquat de notre enveloppe de continuité territoriale, la CTC mobilise 50% d’aides. Un pylône coûtant environ 120 000 €, nous attendons de l’Etat qu’il fournisse les 50% restants, comme prévu dans le cadre de la plateforme France Mobile. En complément du Schéma d’aménagement numérique voté par l’Assemblée de Corse, le Schéma Montagne intervient en plus-value et finance 150 kilomètres de fibre dans les endroits les plus enclavés, ainsi qu’un bouquet satellitaire pour avoir du très haut débit dans les bergeries, les refuges du GR20 et des foyers ruraux référencés. C’est ce que nous appellons les « hubs territoriaux numériques ».
 
- Que comptez-vous faire concernant la santé ?
- Nous avons évoqué les dérogations et les futures réunions avec l’ARS (Agence régionale de santé), qui est membre du Comité de Massif, concernant la question des déserts médicaux. L’idée est d’adapter le projet de santé à la réalité de l’île-montagne qu’est la Corse. Un volet du Schéma prévoit des investissements en maisons de santé et cabinets secondaires, mais il faut adapter les moyens de fonctionnement pour l’ouverture d’un certain nombre de services, comme les Urgences. Nous avons arraché des moyens dérogatoires pour doper la politique de Massif, notamment la remise à niveau de la Corse en termes de fonds national d’aménagement du territoire (FNADT). Si on compare la Corse à des massifs équivalents comme le Jura ou les Vosges, on s’aperçoit que l’Etat contribue, pour ces derniers, en cofinancement à hauteur de 13 ou 14 millions €, alors que la Corse ne reçoit que 150 000 € chaque année.
 
- Que demandez-vous exactement ?
- Nous demanderons, dans le projet de loi de finances, la mise à niveau progressive des contributions FNADT pour la Corse pour avoir une quote-part de l’Etat correspondant à un Schéma digne de ce nom. Nous devons, aussi, adapter les politiques fiscales à la réalité de la Corse d’ici à 2019, demander notamment une zone fiscale de montagne à l’image des zones franches rurales que réclament certains territoires ruraux et de montagne français.
 
- L’Exécutif territorial a fait du développement de l’intérieur son cheval de bataille. Combien de temps vous donnez-vous pour obtenir des résultats concrets ?
- Nous nous sommes donnés 7 ans, la durée totale du Schéma. Si on peut aller plus vite dans le numérique et la téléphonie, on le fera pour éviter une fracture territoriale trop grande. L’objectif est d’obtenir un résultat global de changement radical.
 
Propos recueillis par Nicole MARI.