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Ajaccio : la vente d'une parcelle fait encore débat au conseil municipal


Julia Sereni le Mardi 27 Juillet 2021 à 13:04

La vente de gré à gré d’une parcelle issue du domaine privé de la commune pour la réalisation d’un parking a fait débat ce lundi 26 juillet au conseil municipal d’Ajaccio, donnant lieu à des tensions entre majorité et opposition.



Image archives CNI - Michel Luccioni
Image archives CNI - Michel Luccioni
Le dossier n’est pas nouveau. Au contraire, la fameuse parcelle CP134 revient régulièrement au centre des débats du conseil municipal d’Ajaccio. C’est sur ce terrain de la route des Sanquinaires que sont érigées les deux villas « Amhan », dont la tentative de régularisation avait tant fait polémique. C’est encore de cette parcelle dont il a été question ce lundi 26 juillet. La municipalité souhaite en vendre une partie, 700 mètres carrés, de gré à gré, au profit de la construction d’un parking.

En 2017, deux parcelles cadastrées section CP n°20 et 21 ont été vendues par adjudication. L’acquéreur y a démarré la construction d’un projet immobilier de quatorze logements. Mais, problème, le propriétaire estime que l’accès direct sur la RD111 est « dangereux ». C’est pourquoi il sollicite la vente de gré à gré d’une partie de la parcelle communale CP134, aux fins d’aménager un parking à l’arrière de la promotion immobilière. La délibération présentée en conseil municipal permet d’acter la vente de cette parcelle, pour un montant de 204 400 euros, et de constituer une servitude de passage, afin que l’acquéreur puisse accéder à ses parcelles.

« Est-ce qu’il y a du favoritisme, des pressions ? »

Jean-François Casalta, du groupe Pà Aiacciu, y voit trois « difficultés ». La première concerne la vente même des deux parcelles, en 2017. La question étant de connaitre le document d’urbanisme qui était alors applicable. « Pour passer cette vente, on est revenu au plan d’occupation des sols (Pos) de 1999, car on se trouvait dans une période où le zonage avait été annulé par décision du tribunal administratif et confirmé par la cour d’appel. Mais il ne pouvait autoriser ce genre d’équipements que s’il y avait une modification du Pos ou une zone d'aménagement concerté (ZAC) créée, or le Pos n’avait pas subi de modifications » argumente t-il.
 
Par ailleurs, l’élu s’appuie sur la convention LOREGAZ signée le 9 novembre 2017 entre la commune d’Ajaccio, le CEN-CORSE et ENGIE. En application de celle-ci, le site concerné serait dédié à la protection des tortues d’Hermann. « Madame Ottavy nous avait répondu qu’un avenant excluait cette parcelle, je ne l’ai pas vu » précise t-il. Enfin, « encore plus curieux » pour Jean-François Casalta, « le propriétaire dit qu’il a un problème d’accès mais dans le permis qu’il dépose il y a un accès prévu sur la route des sanguinaires ». Face à une série « d’erreurs » et de « cafouillages », l’avocat s’interroge : « Pourquoi le maire s’est-il embarqué dans ce genre de galères ? Est-ce qu’il y a du favoritisme, des pressions ? ».

Quatorze appartements et un parking qui questionnent l'opposition

« On est en train de signer quatorze appartements » rappelle Jean-André Miniconi, d’Aiacciu pà tutti. « Ce lieu présente à la base un intérêt écologique et paysager important, on fait l’effort de le classer, tout cela pour qu’il devienne un parking » se désole t-il. Au tour d’Etienne Bastelica, qui fait une suggestion : « Je voudrais proposer à notre assemblée l’idée suivante : est-ce que la ville ne pourrait pas proposer sur deux hectares un plan prévoyant la construction d’un bâtiment d’habitation à usage communal pour les primo accédants ? ».
 
Nicole Ottavy, adjointe en charge de l’urbanisme, répond à l’opposition. « Je ne suis pas juriste et encore moins en urbanisme. Nos services ont étudié la question, s’il y avait un problème, ils l’auraient signalé. » L’élue ajoute que le projet a été « suffisamment retravaillé avec l’architecte des Bâtiments de France pour que l’on ne puisse pas soupçonner de favoritisme ou de laxisme ».

« On ne va pas vendre les bijoux de famille parce qu’on a plus d’argent »

Sur ce dernier point, c’est Laurent Marcangeli qui monte au créneau. Après avoir rappelé la délicate situation des finances de la ville d’Ajaccio et sa volonté de ne pas augmenter les impôts, le maire met les points sur les « i » « Je tiens à vous dire que je ne connais pas de pressions, je ne connais pas de corruption dans ma vie personnelle et politique, et je suis véritablement à l’aise lorsqu’il s’agit d’évoquer ces sujets. Je veux bien qu’on critique mes choix mais quand il s’agit de nos élus, de nos agents, je refuse de croire que la pression et la corruption sont présentes » développe t-il,  critiquant des propos « à la limite d’une certaine forme de diffamation ». « On a beau avoir été ancien député, ancien conseiller général, maire, à la tête du groupe d’opposition régional, on n’en demeure pas moins un homme » lance t-il sous les applaudissements de sa majorité.
 
Pas vraiment de quoi convaincre Jean-François Casalta. « Je n’ai pas très bien compris l’explication, on s’accroche aux branches pour justifier une décision qui est contestable » indique t-il. « Je me suis posé une question que beaucoup de gens se posent » ajoute l’élu, avant de répondre sur l’argument financier : « On ne va pas vendre les bijoux de famille parce qu’on a plus d’argent ».
 
Si majorité et opposition ne tomberont pas d’accord, l’atmosphère se détendra quelque peu après une boutade douce-amère de Laurent Marcangeli. « Si je puis me permettre, les voitures, il faut bien les mettre quelque part Monsieur Miniconi ! » lâchera t-il en guise de conclusion à l’attention du leader du groupe Aiacciu pà tutti, à la tête du groupe automobile éponyme.