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Visite de Macron en Corse. Jean-Martin Mondoloni : "La part de l'effort appartient à ceux qui sont montés trop haut"


le Mardi 26 Septembre 2023 à 20:13

À quelques heures du discours politique que le Président de la République prononcera jeudi matin à Ajaccio, le co-leader d’Un Soffiu Novu regrette à nouveau la « proposition stratosphérique » adoptée en juillet dernier par l’Assemblée de Corse et appelle à trouver un niveau de discussion qui puisse aboutir à une amélioration du quotidien des Corses



- Quelles sont les attentes d’Un Soffiu Novu avant la visite présidentielle ?
- Nous sommes dans l'attente de l'orientation que souhaite donner le Président de la République au processus qui est mené depuis plus d’un an maintenant. Il y a deux propositions qui ont émané de l’Assemblée de Corse au mois de juin dernier : une proposition très ambitieuse qui veut aller jusqu'à légiférer sur tous les sujets, sauf le régalien ; et une proposition qui me semble plus sage dans la mesure où nous n’avons pas dit ce que nous voulions faire, mais ce qu'il était possible de faire en tenant compte des contraintes politiques au Sénat, à l'Assemblée Nationale, au Congrès et aussi d’un probable référendum. Partant de là, une solution sage serait que le Président se situe autour des considérations que nous avons fixées au mois de juillet. Du reste, cela serait surprenant qu’il réponde in extenso à la proposition stratosphérique qui a été adoptée par la majorité au mois de juillet dernier. 
 
- Le Président de la République doit tenir un discours politique jeudi matin pour lequel il existe de très fortes attentes. Pensez-vous que les annonces d’Emmanuel Macron puissent être à la hauteur de celles-ci ?
- Je ne pense pas que le Président réponde aux attentes de la majorité territoriale au niveau où elles ont été fixées, cela me semblerait insurrectionnel. Deuxième niveau d'attente, c'est celui de notre groupe qui a toujours dit qu'il fallait évoluer sagement dans le temps et d'autant plus que ce processus débouche aussi sur un grand plan d'investissement pour les hôpitaux, les lycées, les collèges, les ouvrages hydrauliques, les routes, les ports, les aéroports, et toutes les infrastructures qui peuvent faire entrer la Corse dans le XXIᵉ siècle. Nous, nous sommes sur ce sujet- là. Si le Président double une avancée institutionnelle raisonnée d'un grand plan d'investissement, nous, on trouvera notre compte. Maintenant, s'il ne s'agit que de l'évolution institutionnelle et que le Président de la République ouvre les voies d'une auto-détermination à moyen terme, ce que je ne crois pas une seule seconde, nous serons en résistance. Mais nous n’en sommes pas là. Je crois qu'il faut attendre la parole présidentielle et derrière, créer les conditions pour que tout cela débouche sur l’amélioration du sort quotidien des Corses et particulièrement de ceux qui souffrent, et nous ne sommes pas convaincus que toute cette fièvre institutionnelle puisse le faire. 
 
- Il y a quelques jours, en visite à Ajaccio, Gérald Darmanin avait regretté qu'un consensus n'ait pas pu être trouvé lors du vote de l’Assemblée de Corse du 5 juillet. Un regret que vous partagez ?
- Nous, nous regrettons que la majorité territoriale se soit entêtée à produire un texte qui n'a aucune chance d'aboutir au niveau de l'État et surtout qu'elle ait appelée à voter contre notre texte. Nous, nous sommes des gens sérieux, au sens où on connaît les contraintes et on raisonne avec elles, on ne fait pas comme si elles n'existaient pas. En face, vous avez affaire à des gens qui ont parlé à leurs militants, qui se sont fait plaisir en y mettant tout ce qui n'a aucune chance d’aboutir. Nous, nous avons parlé aux Corses, bien sûr, mais aussi à celles et ceux qui dans le parcours vont compter. Je ne sais pas si les Corses comprennent bien que ce n'est pas nous qui aurons la main sur le processus. Il faut passer par le filtre du Gouvernement, du Sénat, et de l'Assemblée Nationale, soit autant de personnes qui n'ont quand même pas la vision stratosphérique qu'ont les élus de la majorité à l'Assemblée de Corse. C'est aussi simple que cela. Donc nous n’avons pour notre part pas dit ce qu'on voulait, nous avons dit ce qu’il était possible de voir aboutir. Nous ne nous sommes pas livrés au même exercice, et partant de là on ne va pas trouver en 15 jours, les voies du compromis. J'ai l'habitude de dire que si vous êtes à 20 et que moi je suis à 10, on sait très bien qu’il faut discuter autour de 15. Mais quand on est à 10 et que la majorité est à 500, on ne voit pas autour de quoi on va discuter. La vision de la majorité est stratosphérique, déconnectée totalement de ce que pensent les députés et les sénateurs qui eux font la loi et donc révisent la Constitution. À un moment donné, il va falloir descendre de quelques étages, et la part de l'effort, évidemment, appartient à ceux qui sont montés trop haut, pas à ceux qui sont prétendument restés trop bas.
 
- On sait toutefois que quoi que puisse annoncer le Président de la République, cela ne restera finalement que le début du processus institutionnel, et que pour avoir une chance de voir celui-ci aboutir, il sera nécessaire de trouver les voies et moyens d'arriver à un consensus qui puisse notamment être adoubé par le peuple corse. Aujourd'hui, est-ce illusoire de croire que vous puissiez parler d’une seule voix avec les groupes nationalistes ?
- Non, rien n'est illusoire. Tout le monde est responsable et quand on est responsable, on se parle. Ne fermons pas les portes du compromis, du dialogue, et des échanges. Simplement, créons les conditions pour que ces portes restent raisonnablement ouvertes. Quand on observe qu’un parti indépendantiste, l'avant-veille de la visite du président, se plante devant les grilles de l’Assemblée en disant « nous, on ne bougera plus », ce n'est pas une attitude responsable. Cela consiste à dire « c'est tout ou rien ». Nous ne sommes pas sur cette approche- là. Nous, on fait de la politique entre nous, c’est-à-dire entre Corses, et on fait aussi de la politique aussi avec les députés et les sénateurs. Je pense que le « la » sera donnée dans 48 heures. On verra bien où le Président de la République situe le domaine de la raison. Et autour de cela, peut-être que des compromis seront trouvables. Mais aujourd'hui je ne connais pas le niveau du pouvoir que souhaiterait octroyer le Président Macron.