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Violents orages en Corse : on fait le point


La rédaction le Jeudi 18 Août 2022 à 22:19

Un violent orage s’est abattu sur la Corse, ce jeudi 18 août 2022, faisant payer un lourd tribut à l'l’île. Des rafales de vent sont montées jusqu’à 224 km/h et une pluie diluvienne s’est abattue sur les terres asséchées après des semaines de canicule. Météo-France met en garde contre de nouveaux risques d'orages et de "trombes marines" dans la nuit.
On fait le point



Prudence : la Corse toujours en vigilance orange

Photo illustration Michel Luccioni
Photo illustration Michel Luccioni
La Corse est actuellement placée en vigilance orange  pour orages et précipitations et le phénomène a débuté à 21 heures et devrait se poursuivre jusqu’à demain 10 heures, au plus tôt.  Une aggravation orageuse est attendue dans la nuit de jeudi à vendredi sur le sud et l’ouest de la Corse, annonce Météo France. "Nous allons à nouveau atteindre des précipitations de 40 à 60 mm avec une intense activité électrique et des rafales de vent de l’ordre de 80 à 100 km/h", a annoncé François Gourand, ingénieur prévisionniste à Météo France. Il a également déclaré que des "trombes marines" pourraient être observées sur la frange littorale. Les derniers orages devraient s’évacuer du ciel de l’île, vendredi à partir de la mi-journée.
En conséquence, la préfecture de Corse-du-Sud a décidé d’ordonner l’évacuation des occupants des campings installés en tentes. `
La préfecture de Haute-Corse a quant à elle indiqué que 5400 personnes, hébérgées dans les campings les plus exposés à Calvi, Calenzana, Aregno, Algajola, Corbara et Monticello) ont été mises en sécurité à titre préventif.

Les services de l'Etat déconseillent fortement les déplacements et et toute sortie en mer est contre-indiquée. Les manifestations culturelles et sportives qui devaient se tenir ont été annulées. 

 


Le bilan humain est dramatique et celui matériel s’annonce tout aussi lourd. 8 800 foyers insulaires restent privés d’électricité ce jeudi soir

Trois décès en Corse-du-Sud et deux décès en Haute-Corse

Le bilan humain de cette tempête est lourd : cinq personnes sont décédées. En Corse-du-Sud, une adolescente de 13 ans, atteinte par la chute d’un arbre dans un camping du village de Sagone et une femme de 72 ans, par celle du toit d’une paillote sur son véhicule à Liamone, ont perdu la vie. Un homme de 46 ans est décédé, victime de la chute d’un arbre sur son bungalow.

En Haute-Corse on confirme la mort d'un homme de 46 ans à Calvi, victime de la chute d'un arbre sur son bungalow, le corps d’un pêcheur de 62 ans, dont on était sans nouvelle, a été retrouvé dans la matinée, dans le golfe de Girolata. Au niveau d’Erbalunga le corps sans vie d’une kayakiste, pour laquelle l’alerte avait été donnée par son mari, qui avait lui réussi à se mettre à l’abri, a été localisé en début d’après-midi par des moyens aériens.

Vingt autres personnes ont été blessées, en Haute-Corse ou en Corse-du-Sud, dont trois en urgence absolue. Parmi elles, une Italienne de 23 ans, elle aussi victime de la chute d’un arbre dans la pinède de Calvi où est décédé le quadragénaire.

Gérald Darmanin sur place

Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin est arrivé en Corse dans la soirée de jeudi à la demande du président Emmanuel Macron qui a témoigné de tout son soutien au président de l’exécutif de l’île, Gilles Simeoni. "Je veux dire à la Corse et aux familles qui ont connu des décès ou des blessés graves tout le soutien et toute la compassion de l’État ", a déclaré le ministre devant la presse à son arrivée en évoquant "des vents extrêmement violents, non prévus, en tout cas dans cette intensité sont venus arrachés à la vie six personnes, […] vingt blessés dont quatre très graves, dont le pronostic vital est engagé et ce bilan est provisoire", car il manque le bilan définitif de ceux qui étaient en mer au moment de la tempête.

Macron a présidé une cellule de crise sur les mesures à prendre

La Première ministre a annoncé vers 16 h 30 avoir activé la cellule interministérielle de crise et a assuré que le gouvernement "suivait de près les opérations qui ont lieu sur terre et en mer".

Emmanuel Macron a supervisé un point de situation en visioconférence depuis le fort de Brégançon (Var), où il est en vacances et où la Première ministre Élisabeth Borne, également en villégiature dans la région, l’avait rejoint.
L’objectif est de "regarder les prochaines heures sur le plan météo […], d’en tirer tous les éléments d’organisation nécessaires et de pouvoir sur les prochaines heures et les prochains jours prendre les bonnes décisions", a-t-il dit à l’ouverture de la réunion. "Au-delà de cela, nous aurons évidemment les mesures d’accompagnement à acter pour les personnes comme pour le territoire", a-t-il ajouté en réitérant son soutien à la Corse et en ayant une "pensée pour les familles des victimes." 

Le président de la République s’était entretenu à deux reprises dans la journée avec le président du Conseil exécutif de Corse, Gilles Simeoni, afin de lui "témoigner tout son soutien et l’assurer de l’entière mobilisation des moyens de secours", a précisé l’Élysée.

Les orages mortels en Corse soulignent les limites de la prévision météo

Des rafales à plus de 150 km/h ont surpris la Corse au petit matin même si dans le bulletin Météo-France de 6 heures de ce jeudi, l'île était encore en vigilance jaune ("soyez attentif"), annonçant "de puissants orages (...) en mer à proximité de la Corse, avec de fortes rafales de vent", qui pourront "très temporairement affecter les côtes ouest et nord".
Ce n'est qu'à 8h35, en observant le décalage imprévu de l'orage vers les terres et l'intensité "extrême" des rafales, que les deux départements ont basculé en vigilance orange aux orages ("soyez très vigilant"). A ce niveau, un cran inférieur au rouge de la "vigilance absolue", les habitants sont invités à s'abriter dans des bâtiments en dur, tandis que les services de la sécurité civile et les autorités sanitaires sont mis en alerte.
"On a été un peu surpris par les valeurs des rafales, valeurs tout à fait exceptionnelles", avec des records à plus de 200 km/h de vent par endroits, a reconnu Christophe Morel, responsable de la permanence prévisions de Météo-France, lors d'un point presse jeudi après-midi.
Certaines simulations produites par "AROME", le modèle maison qui tourne sur un supercalculateur à Toulouse, "laissait suggérer un orage proche de celui qui a été observé", a raconté le prévisionniste François Gourand. Mais d'autres simulations, "qui paraissaient plus vraisemblables, le situaient plus en mer". "Des systèmes orageux multicellulaires se produisent quand une certaine mayonnaise prend: arriver à prévoir la combinaison de ces éléments, c’est très compliqué", a-t-il détaillé.
"Des modèles très sophistiqués comme AROME arrivent à les prévoir de mieux en mieux, mais pas toujours", a-t-il ajouté, affirmant que les météorologues sont "très souvent dans ces situations où les modèles ne permettent pas de trancher".
S'il fallait alerter dès qu’un scénario extrême apparaît dans les prévisions, "on ferait bien trop de vigilance et le système deviendrait inutile", a justifié Christophe Morel. "Il y a un équilibre à trouver, alerter suffisamment et ne pas sur-alerter", a-t-il souligné, estimant que "là, nous n’avions pas assez d’éléments" en avance.

Le loupé corse des prévisionnistes, qui n'avaient pas annoncé l'intensité des rafales orageuses à l'origine de plusieurs morts sur l'île jeudi, illustre la difficulté, malgré les progrès spectaculaires des supercalculateurs, de traduire les probabilités de phénomènes météo en un système d'alerte crédible pour la population.