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Tombe étrusque d’Aleria : les premières analyses en laboratoire révèlent des surprises


C.-V. M le Mercredi 22 Avril 2020 à 11:36

L’Inrap (Institut national de recherches archéologiques préventives) a réalisé au cours des derniers mois plusieurs fouilles importantes en Corse. Parmi elles figure une découverte majeure, celle d’une nécropole romaine et étrusque à Aleria. Cette fouille d’archéologie préventive a permis de mettre notamment au jour une exceptionnelle tombe étrusque de la fin du IVe siècle avant notre ère. Très riche, celle-ci contenait un mobilier de prestige. Plus de deux cents objets ont été inventoriés. Aujourd’hui l’étude continue en laboratoire et se révèle surprenante.



Vue depuis la chambre funéraire des escaliers et du couloir de l’hypogée (daté du IVe siècle avant notre ère). Au premier plan, la défunte autour de laquelle ont été retrouvés différents mobiliers d’accompagnement dont deux skyphoi (vases) consolidés in situ avant d’être prélevés. © Roland Haurillon, Inrap
Vue depuis la chambre funéraire des escaliers et du couloir de l’hypogée (daté du IVe siècle avant notre ère). Au premier plan, la défunte autour de laquelle ont été retrouvés différents mobiliers d’accompagnement dont deux skyphoi (vases) consolidés in situ avant d’être prélevés. © Roland Haurillon, Inrap
Au cœur de la tombe en hypogée, la défunte reposait sur le dos, tête inclinée côté gauche et les bras le long du corps. Elle était parée d’une paire de boucles d’oreille d’or, de deux anneaux et or et alliage cuivreux aux doigts.
La défunte était entourée d’une quarantaine de récipients en céramique. Près de sa tête, les archéologues ont trouvé, à gauche, deux grands skyphoi – sorte de gobelets à grandes anses – et, à droite, une petite cruche (lécythe aryballisque). Le long de la jambe droite, se trouvent un autre skyphos et trois œnochoés (cruches à vin) décorées de visages féminins. Toutes ces céramiques peintes sont des productions d’Étrurie et sont datées du IVe siècle avant notre ère. Deux vases à parfum (des alabastres) reposent sur les pieds de la défunte et, à leur gauche, des petites coupes à vernis noir, deux miroirs en bronze et un askos (vase à versoir latéral) à tête noire ont été entassés. Enfin, une dizaine de coupes de diverses formes et différentes tailles est alignée le long du flanc gauche de la femme. L’étude de ce mobilier exceptionnel, dont la conservation a fait l’objet d’une attention toute particulière permettra de mieux comprendre les pratiques funéraire étrusques.


Fouille en laboratoire et tomodensitométrie

Après la fouille, le prélèvement, le nettoyage et la stabilisation du mobilier, débutent l’étude et la recherche, ce que les archéologues appellent « la post- fouille ».
La découverte de cette tombe exceptionnelle et l’état de conservation de son mobilier ont engendré un ensemble de mesures et d’études singulières afin de faciliter la fouille des céramiques et des sédiments qu’elles contenaient. Afin également d’éviter tout effet de surprise et de préserver les éléments restés invisibles lors du prélèvement des vases dans la tombe.
Vingt-deux céramiques dont les œnochoés et les skyphoi ont fait l’objet d’analyses par tomodensitométrie. Cette technique de scanner profond par rayon X rend compte, de manière non-intrusive, des différents éléments et matériaux qui composent un amas dense et en restitue une image virtuelle en trois dimensions.


Nouvelles découvertes


Les premiers résultats de ces analyses révèlent des surprises : un des grands skyphoi contient une coupelle et un petit skyphos possède un objet difficile à définir. L’une des coupelles entassées près des pieds de la défunte présente un petit anneau en bronze, le cinquième issu de la tombe. Cet anneau est le seul élément restant d’un contenant en matériau périssable, tissu ou vannerie par exemple, depuis longtemps disparu. Enfin un alabastre contient une tige de métal. Peut-être une l’aiguille à parfum ou en onguent...
Les recherches vont prochainement se tourner sur les deux miroirs exceptionnels en bronze et à manche d’os. Très abimés par les siècles, ils pourraient révéler quelque scène de bain ou de déesse.

L’Archéologie préventive en Corse

L’anthropologue de l’Inrap, Catherine Rigeade, travaille au dégagement de la sépulture de culture étrusque (datée du IVe siècle avant notre ère). Un riche mobilier (œnochoés, skyphoï, etc.) est entreposé autour de la défunte. © Roland Haurillon, Inrap
L’anthropologue de l’Inrap, Catherine Rigeade, travaille au dégagement de la sépulture de culture étrusque (datée du IVe siècle avant notre ère). Un riche mobilier (œnochoés, skyphoï, etc.) est entreposé autour de la défunte. © Roland Haurillon, Inrap
En Corse, les archives terrestres constituent un ensemble patrimonial particulièrement emblématique et vulnérable. Leur étude et leur préservation justifient des mesures de conservation adaptées mis en place depuis plusieurs années. Les moyens humains et financiers sont aujourd’hui sans précédent. Ils contribuent aussi au renouvellement des connaissances sur le passé le plus lointain de l’île jusqu’à la période moderne. Sous la responsabilité de l’État (Drac), l’archéologie préventive en Corse liée à l’aménagement du territoire est aujourd’hui comparable à celle de certaines régions métropolitaines. Elle permet de renouveler nos connaissances sur l’histoire de l’ile et de sensibiliser le grand public à travers la valorisation des résultats au sein de ses quatre musées d’archéologie labellisés musée de France.
L’Inrap, en étroite collaboration et sous le contrôle scientifique et technique de la
Drac réalise de nombreuses opérations archéologiques en Corse depuis plusieurs années. Pour conforter son activité, l’Inrap y a donc ouvert un nouveau site opérationnel et de recherches à Vescovato (Haute-Corse) à l'hiver 2018.