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Saint-Florent : la fréquentation touristique "en dents de scie" inquiète les commerçants


David Ravier le Samedi 8 Juillet 2023 à 19:14

Après un démarrage de saison timide en avril et en mai, les commerçants de Saint-Florent s’inquiètent pour la haute saison qui peine à trouver un rythme satisfaisant. De plus, les touristes, moins nombreux que d’habitude, réfléchissent à deux fois avant d’ouvrir leur porte-monnaie.



L’une des rues principales de Saint-Florent, quasiment déserte à quelques jours des vacances d’été.
L’une des rues principales de Saint-Florent, quasiment déserte à quelques jours des vacances d’été.

La terrasse de la Maison des pizzas est à moitié vide en cette veille de week-end. Depuis 37 ans, Jean-François Benvenuti tient cet établissement du centre-ville de Saint-Florent. À la pause déjeuner en ce dernier vendredi du mois de juin, alors que les grandes vacances sont sur le point de débuter, le restaurateur tente de ne pas être pessimiste, mais admet que ce début de saison 2023, est "dents de scie, en tout cas bien irrégulier.
". Les mois d’avril et de mai n'ont pas été mauvais, mais en juin, on a perdu cette dynamique. Un jour, on a des pics de fréquentation, et le lendemain, il n'y a plus personne »
précise t-il. 


Les rues autour de la place principale de Saint-Florent ne sont pourtant pas vides, mais la flânerie et le lèche-vitrine ont pris le pas sur l'achat plaisir. « On ne sait pas si l'inflation a une influence sur la consommation des gens, mais le début de saison n'est pas fantastique, poursuit Jean-François Benvenuti. Même lorsqu'on en discute entre commerçants, il y en a beaucoup qui me parlent de 25 à 30% de chiffres d'affaires en moins. C'est pareil pour les hôteliers et les professionnels des résidences de tourisme ». Le commerçant, lui-même, admet que depuis sa réouverture, son chiffre d'affaires a baissé de 30 à 40% par rapport à ses prévisions. 

 

En face, la gérante du bar de l’Europe pose le même constat. « Je vois clairement la différence en termes de fréquentation, il y a des touristes dans la ville, mais moins qu’avant ». Depuis six ans qu’elle est à la tête de cet établissement, Saveria reconnaît que la saison ne démarre pas sous les meilleurs auspices. Sa terrasse, bien située et exposée au soleil, n’attire pas les foules pour autant. « Les gens qui viennent font attention à leur consommation, ils prennent plus souvent des salades à partager et s’ils veulent un dessert, ils se laisseront tenter par une boule de glace, mais pas par une coupe. Au final, le ticket moyen a baissé de moitié par rapport à l’année dernière ».


Ce repli budgétaire de la part des clients, qui pénalise les commerçants de la ville, toucherait tous les secteurs. Il faut dire que l’inflation, qui s’élève à 5,3% sur un an selon l’Insee, incite les touristes à surveiller leurs dépenses, voire même à reporter leur destination de voyage. « On discute entre nous. Le constat est le même pour tous : on arrive au début de l’été et les locations sont à moitié vides. Bref, il y a beaucoup moins d’affluence en Corse, constate Saveria qui montre du doigt "les prix des billets d’avion qui, selon elle, "sont excessifs."
"Pour peu que vous veniez en famille,  il est impossible de débourser des sommes folles pour se loger, se déplacer et se nourrir. Il ne faut pas s’étonner que dans ces conditions, les gens fassent attention à leur budget au moment de prendre une glace ou un café
».


Une fréquentation touristique en trompe-l’œil

À ce problème de consommation en berne, s'ajoute également une fréquentation en trompe-l'œil.
À la capitainerie du port de plaisance, Antoine Canosi égrène les registres d'inscription des bateaux. « On a beaucoup de réservations pour le mois de juillet et on est complet pour le mois d'août. Le mois de juin était plutôt bon, surtout dans la seconde moitié grâce au beau temps, ce qui nous a permis d'avoir entre 20 et 30 bateaux qui débarquaient chaque jour. » 
Pour autant, les passagers et les bateaux présents ne sont que de passage. Cette clientèle, « à 90% Italienne avec peu de gens venant du continent » selon les relevés du du maître du port de plaisance, ne reste pas longtemps sur place.
«  Lorsqu’ils viennent en bateau, ils sont obligés de rester au moins une journée. Généralement, les plaisanciers restent là le temps d’un week-end, mais rarement plus longtemps ».
Si les embarcations qui accostent dans le port transportent généralement entre deux et dix personnes, les autres bateaux, ceux qui acheminent plus de monde, n’ont plus le droit de cité. Depuis l'an dernier, un arrêté préfectoral interdit aux navires de plus de 24 mètres de mouiller dans le golfe de Saint-Florent et dans certaines zones spécifiques pour protéger les herbiers de posidonie.
Si ce choix raisonnable en faveur de la nature et de la sauvegarde de la biodiversité est compréhensible, Antoine Canosi est bien conscient que dans le même temps il a des conséquences notamment sur l'afflux de touristes qui s'amenuise. « Il y a forcément moins de gros bateaux qui mouillent à l’extérieur du port, ce qui a des conséquences économiques pour les commerçants de la ville qui en prennent un coup ». 

 

Cette baisse de fréquentation des lieux touristiques associée à des dépenses plus faibles interpelle Jean-François Benvenuti 
« Il est très important que les touristes reviennent, car c’est durant la période estivale que nous réalisons notre chiffre d’affaires de l’année.  Si la période des vacances est mauvaise, financièrement la suite sera difficile pour nous tous », prédit-il.