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Procès de Bastia-Poretta: un procès "indigne d'un Etat de droit" pour la conférence des bâtonniers de France


CNI avec AFP le Samedi 25 Mai 2024 à 08:53

Après que le parquet a dénoncé une "paralysie" orchestrée par les accusés, la conférence des bâtonniers de France a invité vendredi la cour d'Assise d'Aix-en-Provence à revoir l'organisation du procès Bastia-Poretta, sur l'assassinat de deux membres du banditisme corse en 2017, l'estimant "indigne d'un état de droit".



"La poursuite coûte que coûte d'un procès dans de telles conditions est indigne d'un Etat de droit", ont dénoncé les bâtonniers dans un communiqué, alors que l'audience se poursuit depuis jeudi après-midi avec l'audition des témoins des faits face à un box des accusés vide, tout comme les bancs des avocats.
Le procès, qui a commencé début mai et est censé durer jusqu'au 5 juillet, se tient sans la majorité des 14 accusés, qui refusent de comparaître, et sans leurs avocats successifs, qui ont quitté l'audience après le rejet de leurs demandes de renvoi.

Ceux-ci avaient stigmatisé le décalage des auditions des enquêteurs "cinq semaines après le début du procès, soit à la mi-juin, ce qui porte gravement atteinte au principe de l'oralité des débats et prive de sens toutes les dépositions pouvant être recueillies jusqu'à cette comparution". Une position soutenue par la conférence des bâtonniers de France dans leur communiqué de vendredi soir, pour qui "cela porte gravement atteinte aux droits de la défense".

Plus tôt dans la journée, le procureur général près la cour d'appel Aix-en-Provence avait lui dénoncé la volonté des accusés de "paralyser" le procès en refusant de comparaître et en récusant leurs avocats. "La justice ne peut admettre, au terme de sept années de procédure, qu'un accusé paralyse un procès criminel en récusant son avocat et en refusant de comparaître", a estimé Franck Rastoul, le procureur général, dans une déclaration à l'AFP, un écrit rarissime s'agissant d'un procès en cours.Dans sa déclaration écrite, le procureur général a rappelé que si "le ministère public, les avocats des accusés et des parties civiles font valoir leurs observations et demandes", la cour elle est "tenue d'y répondre, par décision collégiale, conformément à la loi".

Pour une source judiciaire, interrogée par l'AFP, tout cela ressemble à "une stratégie de blocage" de la part des accusés "pour éviter d'être jugés au fond et dans l'espoir d'être libérés pour délais déraisonnables", pour un dossier qui remonte donc à près de sept ans.

Venger les morts
Le 5 décembre 2017, Jean-Luc Codaccioni et Antoine Quilichini avaient été les cibles de tirs sur le parking de l'aéroport de Bastia-Poretta. Selon l'accusation, l'objectif des principaux accusés de ce crime était de "venger les morts" de leurs pères, fondateurs de la "Brise de Mer" ou membres du banditisme insulaire, et de "faire renaître" cette bande criminelle corse historique.
Parmi les accusés figurent notamment Christophe et Richard Guazzelli, fils de Francis Guazzelli, Ange-Marie Michelosi, fils de Ange-Marie Michelosi père, et Jacques Mariani, fils de Francis Mariani. Mais aussi Cathy Chatelain, ancienne surveillante de prison, qui a inspiré le film récemment sorti "Borgo".
Une minute avant les tirs, elle avait été vue par les caméras de surveillance alors qu'elle arrivait en courant pour embrasser Codaccioni: un "baiser de la mort" qui était le signal pour le tireur.