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"On ne peut plus suivre" : à Calvi, la station Esso ferme ses pompes


Maria-Serena Volpei-Aliotti le Samedi 3 Septembre 2022 à 20:17

Ce samedi 3 septembre le gérant de la station essence Esso de Calvi a suspendu la distribution de carburants pour dénoncer la concurrence déloyale de Total et l’absence de soutien d’Esso France.



Gilbert Chartier, le gérant de la station Esso di Calvi et de celle de Calenzana  et sa femme. Photo CNI
Gilbert Chartier, le gérant de la station Esso di Calvi et de celle de Calenzana et sa femme. Photo CNI

Quelle surprise pour les Calvais qui ce samedi matin ont trouvé l'accès aux pompes de la station-service Esso du centre-ville bloqué, et ce pour une durée indéterminée. Deux panneaux indiquant aux clients "des familles au chômage pour 20 centimes. Merci Esso France" résument en quelques mots les raisons de cette action. 

La remise à la pompe de 20 centimes appliquée depuis le 1er septembre par TotalEnergies suscite en effet l'inquiétude chez les autres réseaux de stations-service, qui observent depuis quelques jours une évasion de clientèle et des volumes en chute. Cette situation risque de provoquer la fermeture de leurs stations-service avec bien évidemment des pertes d'emplois. 

"Le 1er septembre, les stations Esso ont commencé à vendre leurs carburants à perte de 3 centimes, afin de s'aligner aux autres stations. Mais à 11 heures, Total, que nous avons juste en face, ont baissé leurs prix tellement bas, que les clients qui se sont arrêtés chez moi sont vite partis là-bas". explique Gilbert Chartier, le gérant de la station Esso di Calvi et de celle de Calenzana qui revient sur la "situation catastrophique" qui traversent les 27 stations Esso de Corse. 

Comme à Calvi, d'autres stations Esso à Biguglia, Mariani, Bastia ont barré l'accès à leurs pompes pour dénoncer  la concurrence déloyale de Total mais aussi pour reprocher à Esso France de ne pas avoir effectué une ristourne similaire à celle de son concurrent ."Aujourd'hui, Esso France refuse de faire la fameuse remise de 20 centimes que Total a décidé d'accorder à ses distributeurs, en plus de celle de l'État". continue  Gilbert Chartier qui gère depuis  juillet 2020 la station calvaise qui appartient au groupe Ferrandi, distributeur de carburant de la firme Esso sur l'ile.

"Nous sommes obligés de fermer"
Ce père de famille, qui emploie 8 personnes, dont son épouse, dresse un constat amer "J'ai repris la station en juillet 2020. J'y ai fait des investissements avec l'achat de machines et de matériel. 2021 a été également une année compliquée. Au mois de mai, nous avons fermé durant un mois pour réaliser de nouveaux travaux". 
Un loyer, des charges, 8 employés et un PEG ( prêt garanti par l'Étatà rembourser. "Nous sommes obligés de fermer. Ça ne sert à rien de payer des employés et de l'électricité si nous n'avons pas de clients. On ne peut pas s'aligner au prix des autres. On ne sait pas ce qui va nous arriver. Pour le moment, à Calenzana, je peux rester encore ouvert car je suis la seule station au village. Mais quand je n'aurai plus de carburant, je vais devoir fermer. Je pense d'ici lundi ou mardi, si les clients se servent encore chez moi. À Calvi, je suis entouré par Total et 2 Vito. [...] On entend souvent que les stations-service se gavent... Mais ils ne comprennent pas que nous ne décidons pas du prix. Pour précision, lorsque le produit arrive au dépôt de Bastia, il appartient à Total, qui va définir le prix de revente aux autres enseignes. Le litre est à 1,83 € à l'achat pour nous. Nous gagnons normalement 6 centimes. Il y a eu la remise de l'État, de 25 centimes TTC. Mais pour nous ça s'arrête là. Les autres ont 20 centimes supplémentaires. Quoi que l'on fasse, on ne peut pas s'aligner. Je ne peux pas mettre cette différence de ma poche. Il n'y a plus de concurrence. Vito et Total marchent ensemble. C'est déloyal" continue le gérant.

Pour lui "Total cherche à avoir le monopole sur toute l'île. Ils veulent tuer les stations Esso. Pour rappel, la firme Esso est partie il y a quelques années de la Corse, et le groupe Ferrandi en a gardé la distribution. Aujourd'hui, M. Ferrandi a essayé de contacter à plusieurs reprises le PDG smde Esso France, pour lui demander son aide, mais ce dernier étant en vacances... Il ne faut pas le déranger."
 
Un avenir incertain 
Aujourd'hui les comptables de Gilbert Chartier cherchent une manière de licencier le personnel. "Mais il semble qu'il ait un petit problème. On ne peut pas licencier pour ces raisons économiques, car c'est en rapport à de la concurrence. Pour ma part, pas de chômage. Je vais devoir me trouver un autre emploi. Ma femme est salariée de la station et nous venons d'avoir un bébé, j'ai également 2 autres enfants. Nous sommes vraiment mal en point". 

Pour le moment le garage restera ouvert uniquement pour des services de mécanique. "En espérant que les clients jouent le jeu, venir ici pour la mécanique et faire l'essence ailleurs".