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Livres : Le passionnant « mystère corse des Orii »


Philippe Jammes le Vendredi 11 Décembre 2020 à 18:08

En cette fin d’année 2020, nombreuses sont les parutions et les rayons des librairies s’étoffent de jour en jour. Parmi les dernières parutions, l’étonnant roman de Frédéric Fappani von Lothringen: Le mystère corse des Orii*



Frédéric Fappani von Lothringen (photo Richard Dumas)
Frédéric Fappani von Lothringen (photo Richard Dumas)

L’action se situe en 1912, un siècle nouveau vient de naître. On voyage en Orient-Express, les premiers avions font leurs apparitions, la traversée à cheval d'un pays tel que la Corse est une aventure et les tensions internationales sont déjà fortes. C'est dans ce climat qu'une disparition incroyable vient de se dérouler sur l'île de Beauté. Et c'est Augustus Müller, venu de Lorraine, qui va devoir découvrir ce qui s'est réellement passé. L'auteur, après nous avoir fait rire avec sa pièce de théâtre en Lorraine**, nous revient avec une histoire extraordinaire dans un pays qu'il connaît bien. On peut se demander finalement s'il n'aurait pas eu, sur place, quelques informations sur Le mystère, si c'est ce qui l'aurait mené en Corse …
CNI a mené l’enquête !


- Comment l’idée de ce roman vous est-elle venue ?
- L’ouvrage est basé sur la retranscription de messages contenus sur ce que l’on nomme des «disques à gravures latérales» d’époque, c’est-à-dire de support audio de 1910. Une première question de curieux serait «Comment avez-vous pu mettre la main sur ces archives sonores d’un officier lorrain du renseignement français?». Question, à laquelle évidemment je ne dirais rien, car je suis bien trop content d’avoir cette source, cette matière première, que je n’ai pas fini de l’exploiter, et parce que deuxièmement j’aime bien le mystère et que, last but not least, j’ai fait quelques promesses de garder le secret, pour qu’on ne vienne pas embêter les gens, qui m’ont aidé dans cette découverte. Cela faisait un moment que cette époque me fascinait d’ailleurs et pour ainsi dire, l’occasion a fait le larron!

- Pourquoi le situer en Corse et pourquoi avoir choisi cette époque?
- Par choix humain et politique, je ne me déplace en Corse, que lorsque qu’on m’y invite et je n’y vais pas en vacances de mon propre chef, par principe. Évidemment, lors de mes déplacements en Corse sur des questions vives dans le cadre de mes interventions disons «humanitaires», j’ai pu découvrir des hommes, des femmes et des réseaux, qui ont fait écho aux documents, que j’avais en ma possession. J’ai même eu la surprise de découvrir encore quelques réseaux anciens ou «manières de faire» de 1913 existantes encore aujourd’hui. Du coup évidemment dans l’immensité des choses que je pouvais raconter avec tout ce stock de disques, j’ai préféré commencer par une mission faite par le jeune officier lorrain en Corse, car cela correspondait à mon actualité. Si 1910 s’est imposée à moi pour l’écriture à cause des disques de cette époque, c’est bien aussi par ce qu’elle m’intéressait au préalable. On ne cherche pas des matériaux et des inspirations autour de 1900 par hasard. Cette époque me fascine beaucoup, car elle se situe à la mort d’un siècle et à la naissance d’un autre. C’est, «la belle époque» comme l’on-dit. Je pense que, fondamentalement il y a une beauté et un espoir dans cette époque qui me séduit beaucoup et qui m’ont poussé à chercher dans cette direction. C’est sans angélisme, car je connais aussi les forces obscures déjà à l’œuvre dans une telle dynamique. Je trouve néanmoins que cette époque est très inspirante, aussi pour nous qui vivons aussi cette mort d’un vieux monde et l’émergence d’une autre en ce début de 21e siècle. Il était intéressant pour moi de regarder la Corse à cette époque.

- Quel travail cela vous a-t-il demandé pour l'écrire ?
- Un travail assez important de recherche et de vérifications des éléments que j’avais en ma possession. Du coup, j’ai découvert tout un tas de détails historiques annexes à l’histoire que je rapportais. Comme, par exemple, des éléments dans des procès-verbaux et des notes sur Francescu-Maria Castelli, un bandit corse. D’ailleurs, pour l’anecdote et le sourire, j’ai reçu à la sortie du livre, un coup de fil d’une amie corse avec laquelle je travaillais sur une situation de protection de l’enfance qui m’a dit : «Et au fait, vous ne le croirez pas Frédéric, mais ce sont mes parents qui habitent aujourd’hui dans la Maison de Castelli». Ou encore la découverte des problèmes d’approvisionnement d’eau à Ajaccio et le portage par les femmes d’énormes cruches ou parfois de sorte de tonneau pour alimenter les maisons. J’ai donc dû beaucoup chercher et gratter de mon côté. Il est vrai que du coup lors de mes déplacements en Corse j’ai eu un regard très particulier, car je connais certains coins comme peu de personnes, mais comme ils étaient en 1912. Parfois même, je connais les noms des propriétaires, en particulier à Ajaccio, mais de l’époque! Évidemment, au vu de ce que je savais, j’ai pu accéder et rencontrer des gens en lien avec mon histoire et son mystère, qui m’ont aussi beaucoup appris. J’ai donc rencontré des membres de réseaux discrets, nés avant ou à l’époque, que certains Corses ne connaissent, à mon avis, même pas. Paradoxe temporel encore, il y a plein de choses contemporaines à la Corse et banales pour tous, que je ne connaissais pas et il doit bien m’en rester encore énormément à découvrir!

- Vos rapports avec la Corse ?
- D’une manière générale, j’ai comme règle de me déplacer là-bas, que lorsque l’on m’y invite. La Corse n’est donc pas pour moi une terre de vacances d’été et d’oisiveté. Même si je sais évidemment apprécier son peuple et profiter du calme, du soleil et de la beauté de l’île. Je suis dans une relation double avec la Corse: Une première forme de rapport, qui est une relation dans laquelle j’ai accepté de m’inscrire, car il faisait écho à mes valeurs et convictions. Je travaille, un travail militant non rémunéré, parfois on me paye mes frais, donc avec des Corses régulièrement sur des questions sensibles: droits humains, prisonniers politiques, reconnaissance des peuples autochtones, adoption, indépendance/autonomie, jeunesse et protection de l’enfance, manifestation ou travaux de négociation. Une seconde relation où du coup je suis aussi dans un rapport d’écriture et participe, de fait, à sa culture. La participation est modeste, «un roman» pour le moment dont le temps nous dira ce que les Corses en feront. J’ai aussi pu répondre souvent à la presse localement sur certains sujets et donc pas uniquement pour faire la promo du dernier roman sorti. J’essaie d’apporter aux débats d’idées et à des perspectives quand on me sollicite.

- Votre parcours … Comment êtes-vous venu à l'écriture?
- J’ai travaillé longtemps dans la protection de l’enfance comme éducateur de rue à Garges et Sarcelle puis Paris19e, coordinateur, chef de service puis directeur de service. J’ai œuvré dans des opérations humanitaires : guerre civile en Centrafrique 2014, Ebola en Guinée, auprès des victimes du génocide tamoul, tant dans les camps de réfugiés, que dans le montage de projets, ou encore dans les salles de l’ONU pour défendre des causes lorsque nous avons reçu le statut consultatif. Je suis formé en sciences de l’éducation, post doctorat, et en psychologie, formation analytique, et aussi en lettres, Germanistik et j’ai aussi fait long travail sur moi-même, très libérateur. Tout cela m’a donc fait connaître l’âme humaine sous certains aspects et m’a obligé à faire beaucoup d’écrits. Ma capacité d’écriture est née en chemin, mais aussi je dois bien le reconnaître, elle me permet aussi de me libérer, de respirer … et il faut aussi une bonne dose d’envie de partager avec les autres !

- Vos ouvrages précédents?
- Ma première série d’ouvrages a été en lien avec les questions d’éducation et de bonheur. Il s’agissait d’une réflexion personnelle issue de recherches et de ma clinique, que j’ai eu envie de partager avec les autres, mais avec des mots simples et j’ai eu ensuite envie de leur raconter de belles histoires ! J’ai commencé par l’autoédition, mais j’ai eu la chance de rencontrer un public de lecteurs qui depuis a grandi petit à petit. Du coup évidemment, j’ai signé avec l’Harmattan, qui est l’un des éditeurs de la place de Paris le moins frileux et encore moins quand on fait des ventes! Figurez-vous que ce que j’ai vendu le plus est une pièce de théâtre, la fameuse pièce, «Mais tu ne pouvais pas le dire?»**. Parce que finalement les gens aiment rire et se refilent la pièce et de toute évidence la rachètent ou se l’offrent ! Je n’ai pas eu de grande promotion pour ce livre et c’est pourtant lui et les lecteurs qui m’ont fait un peu plus auteur dans cette aventure d’écriture.

- Des projets ?
- Je tiendrais juste à évoquer mon actualité culturelle, qui sera normalement riche pour cette année 2021. J’ai deux romans qui sont déjà sortis. Le COVID avait un peu freiné, mais c’est maintenant chose faite: «Le mystère corse des Orii» et «L’extraordinaire créature du bassin d’Arcachon» dont les premiers tirages et retours de lecteurs sont prometteurs. Il va me falloir accompagner et soutenir ce rayonnement ! Je n’ai pas moins de quatre projets de livres en cours, dont deux en coopération prévus pour 2021. Vous voyez, j’ai encore envie de faire rêver du monde ! Je pense reprendre les projets de soutien de restauration de film, mais surtout je serai membre de deux Jurys de cinéma: Festival du film des Balkans, Paris et Berlin, et Festival du film de Fatima à Bangui en Centrafrique. La restauration car beaucoup de pellicules se détruisent et nous risquons de perdre des films géniaux que nous ne pourrons pas transmettre à la jeune génération et la participation à des jurys, pour soutenir les créations contemporaines. Vous voyez, j’ai envie qu’on transmette la flamme! J’aimerais profiter de l’opportunité que vous me donnez pour souhaiter à tous vos lecteurs de bonnes et heureuses fêtes de fin d’année 2020 avec plein de bonnes choses, dont pourquoi pas quelques-uns de mes livres sous le sapin!.
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* Éditions L’Harmattan
** «Mais tu ne pouvais pas le dire !» Éditions L’Harmattan

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