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Le Canada interdit l’achat de biens immobiliers aux étrangers. Pourquoi pas la Corse ?


le Samedi 7 Janvier 2023 à 20:09

Depuis le 1er janvier, une nouvelle législation canadienne, qui a pour objectif de lutter contre la pénurie de logements dans le pays, interdit aux étrangers d’acquérir un bien immobilier pour les deux prochaines années. Une mesure saluée par les nationalistes corses qui invitent à se prendre exemple sur ce qui a été décidé outre-Atlantique pour réguler la situation dans l’île.



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Depuis le premier jour de 2023, et ce pour les deux prochaines années, les étrangers ne peuvent plus acheter de bien immobilier au Canada, à l’exception faite de quelques cas bien spécifiques, qui impliquent notamment de résider dans le pays de façon permanente. 
 
Votée au printemps dernier, cette nouvelle législation a pour objectif de lutter contre la pénurie de logements dans le pays. Lors de la campagne électorale de 2021, le Premier ministre, Justin Trudeau, avait en effet estimé que les achats d’investisseurs étrangers, qui se multiplient ces dernières années, tendaient à gonfler les prix et rendaient de facto l’accès à la propriété compliqué pour les Canadiens. Une situation qui pourrait s’apparenter à ce que subit la Corse depuis des décennies.  « Les problématiques de spéculation foncière et immobilière et d’augmentation de la valeur du foncier et du bâti, notamment par l’acquisition de résidences secondaires par des clientèles qui ont un pouvoir d’achat supérieur à celui des résidents, touchent beaucoup de territoires en France, en Europe et même dans des pays comme le Canada », commente ainsi Jean-Félix Acquaviva, le député de la 2nde circonscription de Haute-Corse et élu territorial du parti Femu a Corsica. « Le Canada qui est plutôt un modèle libéral est en train de faire une régulation forte avec cette loi qui privilégie les résidents. Cela prouve que le bien-fondé philosophique et moral d’un statut de résident pour les territoires qui sont soumis à la spéculation afin d’éviter que les résidents soient en dépossession », ajoute-t-il.

« Il est important de remettre ce type de propositions au cœur d’un véritable projet pour la Corse »

« C’est une démarche que nous voyons de façon positive, même si chaque peuple est confronté à des réalités qui sont différentes et donc les mesures à appliquer peuvent avoir vocation à être également différenciées », note de son côté Petr’Antò Tomasi, l’un des cadres de Corsica Libera, en soulignant : « Le statut de résident que l’on propose est un peu différent, mais la philosophie est la même, c’est-à-dire que c’est une mesure qui est vouée à lutter contre une marchandisation effrénée du foncier et de l’immobilier et qui a pour objectif à la fois de permettre de retourner à des prix plus conformes à la réalité et plus accessibles d’une part, et d’autre part de maintenir un lien entre un peuple, qui est l’occupant légitime, et sa terre ».

Notant que cette nouvelle législation canadienne fait ainsi écho à l’un des chevaux de bataille des nationalistes corses il appuie : « Cela témoigne, selon nous, de la nécessité de mener en priorité, dans le cadre de possibles négociations avec Paris - même si pour l’heure il n’y a pas de négociations politiques nous avons eu l’occasion de le dire- de faire que ce sujet du foncier soit un sujet prioritaire avec de vraies mesures de fond et notamment avec ce qu’on a pu appeler le statut de résident. Il est important de remettre ce type de propositions au cœur d’un véritable projet pour la Corse ». 
 
Alors la France pourrait-elle s’inspirer de cet exemple pour accepter à son tour de privilégier l’achat des résidents permanents dans des zones à forte tension ? Pas à droit constant en tous cas, comme le souligne le député Acquaviva : « Dans le contexte français et européen cela suppose deux contraintes à lever : la contrainte de la constitutionnalité, et donc une réforme de la Constitution, et deuxièmement la réforme des traités de l’Union Européenne pour que le statut de résident soit admis, pour la Corse ou pour d’autres territoires, afin de créer une dérogation fondée sur l’état des lieux de la dépossession foncière ». 

Une proposition de loi pour apporter de premières mesures contre la spéculation

En attendant de lever ces deux contraintes, les députés nationalistes tentent de porter ce combat contre la spéculation dans les plus hautes instances. Dans ce droit fil, Jean-Félix Acquaviva avait, il y a presque un an, soumis une proposition de loi de lutte contre la spéculation. Un texte adopté en première lecture, dont il espère qu’il puisse être adoubé par le Sénat avant de revenir à l’Assemblée Nationale. « Cette proposition de loi porte sur trois points. Tout d’abord la fiscalité et nous avons eu une avancée sur la taxe sur la sur-spéculation immobilière qui, si elle confirmée juridiquement, permettrait de donner des ressources à la Collectivité de Corse. Elle alimenterait aussi un deuxième point qui est un droit de préemption renforcé de la CdC sur certains espaces fonciers et bâtis pour garantir l’accès à la propriété, mais aussi donner au Padduc la capacité de créer des espaces d’équilibres économiques et sociaux. Ce sera la troisième mesure, où on pourrait interdire via le Padduc des zones aux résidences secondaires pour privilégier la résidence principale, l’activité économique et agricole à l’année », détaille-t-il, « À travers ces trois mesures ce serait un début de réponse suffisamment fort pour commencer à mordre sur la réalité en attendant de solder le débat sur le statut de résident ».