
"Le 14 juillet corse, une date précurseuse de la Révolution française"
Aujourd'hui, le Cunventu Sant'Antone di A Casabianca est en cours de réhabilitation. "Ce lieu de mémoire conserve l'ossature principale où Pasquale Paoli a été proclamé Capugenerale di a Nazione Corsa." explique Didier Rey "Le 14 juillet 1790, le troisième après ceux de 1755 et 1789, marque l'adhésion de Paoli au projet révolutionnaire. Nous sommes désormais attachés à cette vaste monarchie, et l'idée que la Corse y soit associée signale une forme d'autonomie. Ce 14 juillet corse serait une date précurseuse de la Révolution française."
L'historien insiste sur l'importance de ne pas fossiliser les événements historiques. "Il n'existe pas de petite et grande histoire. Je déplore le fait de prendre un événement historique pour simplement le commémorer, cela est inutile. L'histoire permet de réfléchir sur le présent et l'avenir. Réfléchir avec une ouverture d'esprit, sans réduire les dates importantes à de simples bornes mémorielles sans sens, ne sert à rien. Il n'y a rien de pire que de fossiliser un événement. Le devoir de mémoire est nécessaire, mais il ne doit pas être vidé de son sens. Je préférerais parler de travail de mémoire avec un sens partagé, c'est là l'essentiel. Le 14 juillet 1755, qu'a-t-il apporté à la Corse d'aujourd'hui ? On ne peut mépriser l'histoire. Réfléchir sur le XVIIIe siècle, comment une société évolue et construit des projets inclusifs, est une base pour comprendre son cheminement. Et cela vaut pour toutes les nations. Utiliser l'histoire comme une inspiration, car les dates ne sont pas canoniques, elles sont des repères qui amènent la réflexion pour un avenir commun."
Pour lui: "Il faut intégrer toute la complexité de l'histoire de la Corse, la connaître, se souvenir, comprendre et aller de l'avant sans avoir peur du passé. Ne pas embellir les choses est primordial aussi. Paoli n'était pas apprécié de tout le monde. Les dates historiques sont des prêt-à-penser. Les 14 juillet 1755 et 1790 ont changé le destin de la Corse. Sortir des discours manichéens, c'est se redécouvrir à travers notre histoire. Éviter les vulgates et les simplifications, c'est vers cela qu'il faut tendre."