Harcèlement dans le sport : en Corse, "colosse aux pieds d'argile" libère la parole des jeunes

Quelques mains timides se lèvent lorsqu’Alexandre Chaneac pose la question à la cinquantaine d’élèves présents dans la salle : « C’est quoi le bizutage ? ». Peu voire pas de réponses correctes. Soudain, l’un d’entre eux lâche le bon mot : « c’est quand quelqu’un subit une humiliation monsieur ! ». Plus ou moins répondra l’animateur. Après avoir eu la définition exacte du bizutage, tous les élèves parlent d’une même voix : « Ah oui d’accord ! ». Finalement tous savent, certains l’ont même vécu.

« À chaque séance, au moins un élève se libère et déclare avoir déjà subi du harcèlement ou un bizutage », déclare Joelle Le Mouellic, la conseillère technique du sport auprès de l’académie de Corse.

C’est notamment le cas de la jeune Liana, 13 ans. Dans ses paroles, l’émotion parle mais les mots sont clairs. « J’ai déjà été victime de harcèlement alors forcément, ça me rappelle de mauvais souvenirs », témoigne-t-elle sans détourner le regard. Du courage, il lui en aura fallu pour parler mais Liana avoue « s’être libéré d’un poids » en le faisant. Du courage elle en a fait preuve à nouveau au début de la conférence où elle a pris la parole, devant tous ses camarades pour les inviter à parler, à se libérer.

C’est le but de ces conférences-débats organisées cette semaine en Corse avec pour focus, le milieu sportif qu’il soit scolaire ou non. Jusqu’au 22 octobre, plusieurs sont organisées entre Île-Rousse, Borgu, Porto-Vecchio, Propriano et Ajaccio, toujours en partenariat avec l’association ‘’ Colosse aux pieds d’argile ‘’. Elle a pour mission de sensibiliser et former aux risques de violences sexuelles, de bizutage et de harcèlement en milieu sportif tout en garantissant l'accompagnement des victimes.  Grâce à ce partenariat, l’UNSS va « sensibiliser 600 jeunes en une semaine sur toute la Corse », indique Joelle Le Mouellic.

Pour plus d’impact, l’animateur n’hésite pas à parler des conséquences d’actes que beaucoup pensent anodins. « Le bizutage est interdit et même s’il est consenti, les auteurs risquent jusqu’à six mois de prison et 7 500 euros d’amende », explique Alexandre Chaneac, avant d’enfoncer le clou : « certaines fois, le pire arrive ». Comme cela a été le cas dans l’histoire vraie qu’il raconte. Celle du jeune Théo. Après avoir subi un bizutage à caractère sexuel dans son club de sport, le jeune garçon a mis fin à ses jours. Il subissait déjà ce genre d’actes chez lui et cela, ses camarades de sport ne le savaient pas. « Faites attention car vos actes ont des conséquences », prévient l’animateur en insistant sur leur rapport aux réseaux sociaux. 

Petit à petit, les élèves en classe de 4e et de 3e interagissent de plus en plus, dialoguent, répondent aux questions. Mission réussie pour l’association et l’UNSS de Corse. Le message est bien passé : « subir du harcèlement c’est être victime, pas coupable ».