
Auriane, de dos, en discussion avec son infirmière Adelina, durant son sevrage à la clinique de Porto-Vecchio.
Il y a un peu plus de dix ans, Auriane a fait entrer dans sa vie un invité qui ne veut plus partir. L’alcool, « ce poison », sans lequel « je vivrai la vie que j’ai toujours rêvé de vivre », avoue la jeune femme, âgée d’une quarantaine d’années. Originaire du Continent, Auriane est venue en vacances en Corse, il y a quatre ans : « Je ne suis jamais repartie. J’ai tout quitté. Mon travail, mon logement... » Mais la boisson, elle, ne l’a pas quittée. Ca a commencé sans crier gare : « La dépendance à l’alcool n’est pas forcément liée à des événements douloureux. J’allais plutôt bien. J’ai pris l’habitude de boire un verre tous les soirs, en apéritif. Mais le corps s’habitue. » Au travail, « je buvais pendant la pause de midi, mais j’arrivais encore à me contrôler. J’avais peur du regard des autres. »
Quand elle décide de quitter son travail de bureau pour s’installer en Corse, Auriane espère que ce changement de vie l’éloignera de son addiction, mais c’est tout le contraire qui se produit. Avec son compagnon qui est éleveur, elle s’est établie dans les terres : « J’étais trop bien, à contempler les couchers de soleil sur les montagnes. » De fait, « je prenais un verre, puis deux. En Corse, l’addiction devenait de plus en plus intense. »
"J'y allais par cubi"
Auriane trouve la motivation de se faire soigner. Un médecin la met en relation avec le Dr Etienne François, psychiatre reconnu en Corse pour son expérience en matière de lutte contre les addictions. Egalement à la tête de la clinique de l’Ospedale, le Dr François accueille Auriane dans son établissement porto-vecchiais. Auriane y reste cinq jours, et enchaîne avec un séjour de trois semaines au centre de rééducation du Finosello à Ajaccio, pour consolider le sevrage. Suite à cela, elle parvient à rester neuf mois sans boire une goutte d’alcool. Se pensant guérie, elle s’autorise, dans un petit restaurant de bord de mer, à commander un verre de vin. « Mais non, ça n’a pas été possible, car j’ai repris un autre verre deux jours après. Puis l’engrenage a été assez rapide, j’y allais par cubi. »
La clinique de l'Ospedale, seule unité de sevrage complexe en Corse
Consciente de sa rechute, Auriane est au plus mal : « J’ai eu honte et je n’ai pas rappelé le Dr François. Mais j’ai appelé l’hôpital de Castelluccio. » Où il existe un centre de soins en addictologie, lequel est plus centré sur un suivi psychothérapique, quand la clinique de l’Ospedale propose des soins somatiques. « J’y suis restée trois semaines. En sortant, j’étais très bien. Mais j’ai rechuté une deuxième fois... » Auriane vit d’autant plus mal sa rechute que son compagnon, lui aussi alcoolique, a suivi une thérapie parallèle, et sans rechuter : « Je culpabilisais car j’aurais voulu y arriver aussi vite que lui... » Elle décide finalement de rappeler la clinique de l’Ospedale, qui a entre temps été référencée par l’ARS comme seule unité de sevrage complexe en Corse, ce qui lui permet de prolonger jusqu’à douze jours le séjour de ses patients victimes d’une addiction. « A mon arrivée, j’ai eu des crises de manque, mais aujourd’hui, le sevrage physique est fait, sourit-elle, pleine d’espoir. Et puis ici, il y a une équipe formidable, qui est à mon écoute. » Comme Adelina. L’infirimière se souvient du premier jour d’Auriane dans l’unité de sevrage complexe : « C’étai très difficile. Les patients sont souvent gênés d’être pris en charge. On essaie d’avoir un comportement empathique avec eux, en les écoutant et en les laissant s’exprimer, pour les mettre en confiance. »
Quand elle décide de quitter son travail de bureau pour s’installer en Corse, Auriane espère que ce changement de vie l’éloignera de son addiction, mais c’est tout le contraire qui se produit. Avec son compagnon qui est éleveur, elle s’est établie dans les terres : « J’étais trop bien, à contempler les couchers de soleil sur les montagnes. » De fait, « je prenais un verre, puis deux. En Corse, l’addiction devenait de plus en plus intense. »
"J'y allais par cubi"
Auriane trouve la motivation de se faire soigner. Un médecin la met en relation avec le Dr Etienne François, psychiatre reconnu en Corse pour son expérience en matière de lutte contre les addictions. Egalement à la tête de la clinique de l’Ospedale, le Dr François accueille Auriane dans son établissement porto-vecchiais. Auriane y reste cinq jours, et enchaîne avec un séjour de trois semaines au centre de rééducation du Finosello à Ajaccio, pour consolider le sevrage. Suite à cela, elle parvient à rester neuf mois sans boire une goutte d’alcool. Se pensant guérie, elle s’autorise, dans un petit restaurant de bord de mer, à commander un verre de vin. « Mais non, ça n’a pas été possible, car j’ai repris un autre verre deux jours après. Puis l’engrenage a été assez rapide, j’y allais par cubi. »
La clinique de l'Ospedale, seule unité de sevrage complexe en Corse
Consciente de sa rechute, Auriane est au plus mal : « J’ai eu honte et je n’ai pas rappelé le Dr François. Mais j’ai appelé l’hôpital de Castelluccio. » Où il existe un centre de soins en addictologie, lequel est plus centré sur un suivi psychothérapique, quand la clinique de l’Ospedale propose des soins somatiques. « J’y suis restée trois semaines. En sortant, j’étais très bien. Mais j’ai rechuté une deuxième fois... » Auriane vit d’autant plus mal sa rechute que son compagnon, lui aussi alcoolique, a suivi une thérapie parallèle, et sans rechuter : « Je culpabilisais car j’aurais voulu y arriver aussi vite que lui... » Elle décide finalement de rappeler la clinique de l’Ospedale, qui a entre temps été référencée par l’ARS comme seule unité de sevrage complexe en Corse, ce qui lui permet de prolonger jusqu’à douze jours le séjour de ses patients victimes d’une addiction. « A mon arrivée, j’ai eu des crises de manque, mais aujourd’hui, le sevrage physique est fait, sourit-elle, pleine d’espoir. Et puis ici, il y a une équipe formidable, qui est à mon écoute. » Comme Adelina. L’infirimière se souvient du premier jour d’Auriane dans l’unité de sevrage complexe : « C’étai très difficile. Les patients sont souvent gênés d’être pris en charge. On essaie d’avoir un comportement empathique avec eux, en les écoutant et en les laissant s’exprimer, pour les mettre en confiance. »

L'agence régionale de santé a reconnu la clinique de l'Ospedale comme seule unité de sevrage complexe en Corse.
Dans l’unité de sevrage porto-vecchiaise, qui est intégrée au service de médecine générale, les patients peuvent bénéficier d’un IRM cérébral ou d’un scanner thoraco-pelvien. Ils peuvent suivre des tests cognitifs et à avoir accès à différents spécialistes, selon les addictions. « L’alcool et l’héroïne vont beaucoup déshydrater le patient, la cocaïne va plutôt l’agiter », pose le Dr Etienne François. Durant les douze jours de prise en charge, « le but c’est de réduire l’intensité des symptômes de l’addiction, détaille le psychiatre. Comme le manque, le déni ou l’ambivalence de se dire qu’on consomme, alors qu’on sait que ça nous fait du mal. »
"Le sevrage sauvage, ça peut tuer"
Une unité de sevrage complexe propose un protocole de soins adapté à touts types d’addiction, « mais à destination des patients les plus à risque de subir des complications physiques et qui nécessitent un bilan médical complet », précise le Dr François, tout en mettant en garde contre « le sevrage sauvage », c’est-à-dire non encadré par des professionnels : « Ca peut tuer. » Au bout des douze jours passés dans l’unité, être sevré ne signifie pas être guéri pour autant : « La guérison ? C’est une définition qui est compliquée, convient le psychiatre addictologue. C’est quand le trouble de l’usage n’a plus d’envahissement sur les sphères de la vie de tous les jours. Mais ça dépend beaucoup du patient, de ses types d’addiction et de ses comorbidités. »
Après deux rechutes, Auriane avoue ne plus avoir aucune certitude : « J’ai déjà dit deux fois : "plus jamais ça". Et pourtant… Aujourd’hui, je suis très motivée, mais je n’ai qu’une seule inquiétude : replonger. » Après son séjour à Porto-Vecchio, la jeune femme ira deux semaines au Finosello, en post-cure. Puis à l’hôpital de jour, « pour ne pas être lâchée dans la nature ». Elle sait que c’est en tirant définitivement un trait sur la bouteille qu’elle pourra vivre son rêve pleinement : « Obtenir mon brevet d’exploitante agricole et faire grandir notre exploitation avec mon compagnon. »
(*) Le prénom a été modifié.
"Le sevrage sauvage, ça peut tuer"
Une unité de sevrage complexe propose un protocole de soins adapté à touts types d’addiction, « mais à destination des patients les plus à risque de subir des complications physiques et qui nécessitent un bilan médical complet », précise le Dr François, tout en mettant en garde contre « le sevrage sauvage », c’est-à-dire non encadré par des professionnels : « Ca peut tuer. » Au bout des douze jours passés dans l’unité, être sevré ne signifie pas être guéri pour autant : « La guérison ? C’est une définition qui est compliquée, convient le psychiatre addictologue. C’est quand le trouble de l’usage n’a plus d’envahissement sur les sphères de la vie de tous les jours. Mais ça dépend beaucoup du patient, de ses types d’addiction et de ses comorbidités. »
Après deux rechutes, Auriane avoue ne plus avoir aucune certitude : « J’ai déjà dit deux fois : "plus jamais ça". Et pourtant… Aujourd’hui, je suis très motivée, mais je n’ai qu’une seule inquiétude : replonger. » Après son séjour à Porto-Vecchio, la jeune femme ira deux semaines au Finosello, en post-cure. Puis à l’hôpital de jour, « pour ne pas être lâchée dans la nature ». Elle sait que c’est en tirant définitivement un trait sur la bouteille qu’elle pourra vivre son rêve pleinement : « Obtenir mon brevet d’exploitante agricole et faire grandir notre exploitation avec mon compagnon. »
(*) Le prénom a été modifié.