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Dans un an, Bonifacio reprendra la main sur la gestion du port de l’île de Cavallo


le Mardi 20 Mai 2025 à 12:34

Le 25 juin 2026, le contrat de gestion du port de Cavallo arrivera à échéance. La commune de Bonifacio n’a jamais fait mystère de ses intentions de reprendre pied sur l’île aux milliardaires, dont l’exploitation de son port fut concédée - avant même sa création - à une société privée. La perspective d’un retour de Cavallo dans le giron public a pris de l’épaisseur ce lundi 19 mai. A l’unanimité, les élus bonifaciens ont voté le futur mode de gestion du port : en régie, soit directement par la commune.



Lundi soir, les élus bonifaciens ont voté à l'unanimité pour un mode de gestion en régie du port de plaisance de Cavallo.
Lundi soir, les élus bonifaciens ont voté à l'unanimité pour un mode de gestion en régie du port de plaisance de Cavallo.
« Cavallo, ça a été pendant des années tout ce qu’il fallait ne pas faire en Corse : de la bétonisation, de l’argent sale, des mafias, et j’en passe », a énuméré Alain Di Meglio durant le conseil municipal. Et selon l’adjoint au patrimoine bonifacien, il est grand temps de tourner la page : « Nous portons aujourd’hui une vision de Cavallo qui, demain, n’entrera plus dans cette symbolique de l’île maudite, avec la prédation d’un tourisme sauvage. »

Arrêté en octobre, le nouveau plan local d’urbanisme de la cité des Falaises avait déjà acté le principe de zéro construction nouvelle à Cavallo. De son côté, l’assemblée de Corse a voté en janvier un plan d’aménagement de près de 430 000 euros pour Cavallo, comprenant la création d’une boucle de sentier, d’un ponton d’accès grand public à Cala di u Grecu, et d’un projet de reconnexion écologique entre les zones humides.

"Il n'y a pas que l'économie dans la vie"

Reprendre la main sur la gestion du port de Cavallo, c’est l’étape d’après « pour prendre pied à 200 % sur l’île de Cavallo », a convenu le maire bonifacien Jean-Charles Orsucci, lundi soir. Mis en service en 1993, le port de plaisance de l’île de Cavallo est situé dans l’archipel des Lavezzi, territoire de la commune de Bonifacio. Il dispose d’une capacité d’accueil de 230 bateaux, d’une longueur maximale de 40 mètres. Son exploitation avait été confiée par le préfet de Corse à la Société du port de Cavallo, par un contrat de concession signé le 3 novembre 1988 pour une durée de trente-cinq ans. Mais le 25 juin 1991, le préfet a transféré la gestion du domaine public maritime affectée à la réalisation du port à la commune de Bonifacio, ce qui fixait l’échéance de 35 ans au 25 juin 2026.

C’est donc via une délégation de service public (DSP) que la Société (privée) du port de Cavallo gère depuis l’exploitation du port de plaisance de la plus grande île des Lavezzi. Et à l’heure de se prononcer sur le futur mode de gestion, Jean-Charles Orsucci a fait un peu de politique-fiction : « Peut-être que, en d’autres temps et d’autres lieux, et dans une vision purement économique, nous aurions pu choisir de reconduire la délégation de service public. On aurait pu se poser la question, sincèrement : est-ce qu’on n’aurait pas vocation à faire rentrer le maximum d’argent ? » 

Deux lettres "fort peu appréciées" par le maire

Mais en 2026 à Bonifacio, la DSP n’est pas le choix qui est apparu le plus pertinent aux élus, qui ont voté à l’unanimité pour une gestion directe, en régie. « Economiquement, je ne suis pas sûr que ce soit le meilleur calcul, mais dans la vie, il n’y a pas que l’économie, a justifié le maire. Le plus important, c’est que, à droit constant, nous sommes en train de reprendre la gestion du port de Cavallo. » En régie, la commune aura l’avantage de conserver l’entière maîtrise des décisions, des choix de gestion, d’organisation et d’orientation pour Cavallo. Cela lui offrira la possibilité de créer un budget annexe spécial, qui permettra une totale traçabilité et visibilité sur les conditions de l’exploitation du service. L’inconvénient étant que la commune devra assumer directement le risque lié à l’exploitation du service, ce qui n’effraie pas Jean-Charles Orsucci : « Il y aura des difficultés, des ajustements, des gens à former, mais je nous crois capables de relever ce challenge-là. On a fait la démonstration, avec le port de Bonifacio, qu’on savait gérer collectivement un port de plaisance. » La prochaine étape sera d’étudier l’état de vétusté du port de Cavallo, a poursuivi le maire. "Actuellement, nous précise le directeur du port de Bonifacio, Michel Mallaroni, nous sommes sur une phase d'état des lieux et nous poursuivons nos échanges avec le gestionnaire actuel."

Jean-Charles Orsucci dit vouloir s’inscrire « dans le respect des gens qui sont sur l’île ». Mais il n’attend pas qu’on lui dicte ce qu’il a à faire : « J’ai fort peu apprécié les deux lettres que j’ai reçues de la direction du port de Cavallo et des copropriétaires. C’est mal me connaître que de m’adresser des missives qui ressemblent à des injonctions », a-t-il révélé, sans apporter plus de précisions sur le contenu de ces lettres. Joint par téléphone, Stefano Varia, le président de la Société du port de Cavallo, confirme avoir envoyé un courrier au maire. Ce qu'il lui a écrit ? "Tant de choses ! Mais la principale, c'est que nous ne voulons pas voir débarquer 3 000 personnes par jour dans le port, nous ne pouvons pas nous le permettre." Quant à la décision du conseil municipal de Bonifacio, il ne souhaite pas la commenter avant d'en avoir pris personnellement connaissance. 

Une tarification pour les pontons

Une fois que le port sera géré en régie, « nous respecterons les règles de concurrence au port de Cavallo, mais nous le ferons avec l’objectif et l’ambition de créer de l’emploi, peut-être même à l’année », se projette le premier magistrat. Dans l’attente, la municipalité prévoit de réaliser des travaux de remise en état des trois pontons pour se rendre à Cavallo (au quai de Piantarella, à Cala Di Greco et à Marina di Cavallo). Et lundi soir, elle a voté la mise en place d’une tarification pour l’utilisation de ces pontons, « pour faire en sorte, a commenté Jean-Charles Orsucci, que ceux qui tirent profit des infrastructures portuaires de Cavallo viennent assumer l’entretien de ces ouvrages ».