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Dans l'Extrême-Sud, une arrière-saison touristique en recul


le Mercredi 8 Novembre 2023 à 11:05

De l'avis de professionnels du tourisme de Portivechju et Bunifaziu, la saison touristique a été bonne, en dépit d'un mois de juillet en deçà des attentes. Mais l'arrière-saison se termine laborieusement dans ces deux haut-lieux du tourisme en Corse.



Rémi et Walid, les serveurs du Glacier de la Place, un café qui ne désemplit pas, lui.
Rémi et Walid, les serveurs du Glacier de la Place, un café qui ne désemplit pas, lui.
En ce lundi matin 30 octobre, la grisaille a envahi le ciel porto-vecchiais. Clémence, Jérémy et leur fils Matteo, 3 ans, sont passés à l'office du tourisme pour y glaner quelques idées d'activités : "On se rend compte que lorsqu'il ne fait pas beau, il n'y a pas grand-chose à faire", regrette le couple originaire de Fréjus, avant d'embarquer leur fils pour un tour de manège. Mais plus que la météo, c'est l'état de léthargie dans lequel ils ont trouvé la ville qui les a surpris : "On était venus une fois à Pâques et c'était bien plus vivant. Là, il y a déjà beaucoup de commerces qui ont fermé."

A l'exception de sa place, toujours animée, Porto-Vecchio bascule doucement mais sûrement à l'heure d'hiver. "C'est très calme, confirme Julie Serra, réceptionniste de l'hôtel Moderne. Sur ces vacances, on tourne entre une et cinq chambres de louées sur quinze. On a eu un bon été mais il faut le temps de se faire connaître. On a ouvert il y a quatre mois seulement." Au Tilbury, solidement enraciné dans le paysage, on n'attend même pas la fin des vacances de la Toussaint pour clôturer la saison : "On ferme le 2 novembre, on n'a fait que 10 % de taux de remplissage sur la première semaine des vacances", indique Belinda, la réceptionniste de l'hôtel. Qui plus est, en cette arrière-saison, les hôtels continuent de subir la concurrence des meublés de tourisme.

"C'est trop cher pour venir en Corse"

Jean-Camille De Peretti fait partie de ces restaurateurs porto-vecchiais qui ont choisi de rester ouverts pour la Toussaint, mais il le regrette : "Ca me coûte de l'argent." Le gérant de L'Alta Rocca (cuisine traditionnelle corse) est catégorique : "Il y a moins de monde que l'année dernière à la même époque." La raison est pécuniaire, selon lui : "C'est trop cher pour venir en Corse. L'an dernier, le choix des destinations était limité, on était toujours dans l'après Covid. Cette année, le monde a rouvert ses portes et tous ne sont pas venus en Corse, vu les prix." Il dit avoir constaté du changement dans le comportement des touristes : "Je voyais bien que les clients regardaient à l'euro près cette année. Une fois qu'ils ont payé le voyage, la voiture de location et le logement, ils n'ont plus d'argent. Alors pour l'an prochain, je pense même changer la formule de mon restaurant et faire des pizzas. C'est moins cher. Et les pizzerias ont très bien marché, elles."

Ce que confirme Jean-Michel Tafani : "La saison a été très bonne", note le gérant d'A Merendella, qui propose des pizzas à la carte.  Pourtant lui a fermé le 10 octobre, mais contre sa volonté. Il invoque des problèmes de personnel : "Les gens ne veulent plus travailler, ils sont tous fatigués et préfèrent toucher le chômage...", lâche-t-il, dépité. Henri Salvini, patron du Glacier de la place, dit ne pas connaître ces problèmes, car il explique avoir réussi à fidéliser ses serveurs, Walid et Rémi, sur plusieurs saisons. "Nous, on travaille bien, mais on a l'emplacement aussi, on est sur la place, à côté du manège. On n'est pas représentatifs...", pense le gérant de café porto-vecchiais.

Et à l'extrémité sud...

A Bonifaziu, Jean-François Le Rolland compte "une dizaine de restaurants encore ouverts", soit environ moitié moins qu'en haute saison. Mais c'est plus que l'an dernier à la Toussaint : "Il y en avait quatre ou cinq seulement", se souvient le gérant de l'hôtel-restaurant L'Escale, situé sur le port. Selon lui, il y a eu une intention de la municipalité, qui a redonné un coup de fouet à la fréquentation : "Il faut voir le nombre d'actions que propose l'office du tourisme... Ca se ressent derrière." Le trail de Bonifacio a notamment drainé une clientèle de sportifs qui ne seraient sans doute pas venus en Corse, sans cela.

Malgré tout, il y a le constat d'une fréquentation à la baisse par rapport à 2022, ce que confirme Jean-François Rauber, patron des boutiques de souvenirs My Corsica, implantées à Porto-Vecchio et Bonifacio. "Bonifacio a été en net recul cette année, oui. En 2022 on y avait fait + 20 % sans pouvoir se l'expliquer et là, on revient sur les chiffres de 2021."

Une fréquentation en baisse sur le tarmac de Figari

De l'avis de beaucoup, 2022 n'est pas le meilleur point de comparaison, car la fréquentation fut exceptionnelle, dans un contexte de rebond post-Covid : "Il y a eu une résilience très fortement marquée sur les aéroports insulaires en 2022", abonde Laurent Poggi, le directeur des concessions aéroportuaires du sud de la Corse. "A Figari, sur les neuf premiers mois de 2023, on enregistre une baisse de six points par rapport à 2022, mais une hausse de 13 points par rapport à 2019, avant le Covid", pointe-t-il. Et sur cette arrière-saison d'octobre, il enregistre un flux de passagers "en baisse de 4%, soit environ 4 000 de moins" ayant atterri à Figari. Etonnamment, "la première semaine d'octobre a été bonne, mais pas les autres", alors qu'on entrait dans les vacances scolaires. Il explique cette baisse de la fréquentation, que connaît également l'aéroport d'Ajaccio (10 000 passagers en moins), par la diminution de l'offre : "Il y avait des fréquences de vols et des capacités plus importantes en 2022, explique-t-il. L'offre avait été très fortement dimensionnée, mais là, on est plus dans la contrition, car beaucoup de marchés touristiques sont venus concurrencer la Corse."