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Comment être évacué de Corse en cas d'urgence ? On vous embarque dans un exercice militaire d'envergure à Ajaccio


Naël Makhzoum le Vendredi 10 Février 2023 à 07:59

Ce jeudi 9 février, des centaines de personnes étaient mobilisées toute la matinée autour de la base d'aéronautique navale d'Aspretto, à Ajaccio. Dans le cadre d'un gigantesque exercice d'évacuation, 300 personnes ont joué le rôle de ressortissants à évacuer depuis la Corse. Le porte-hélicoptère amphibie Mistral et son équipage ont mené l'opération à bien. CNI vous fait vivre l'expérience de l'intérieur.



Pour les centaines de civils choisis pour jouer leur rôle de ressortissants, la journée a débuté vers 7 heures du matin. Ils sont volontaires, familles de militaires ou encore lycéens de Fesch et Antonini. 300 personnes briefées pour cet exercice géant démarré à 8h30, dans un scénario où la base d'Aspretto est la zone sécurisée d'une Corse en situation de crise. En plus de la cinquantaine de militaires habituellement présents, des centaines de forces supplémentaires ont été dépêchées pour l'opération. Parmi elles, les 200 membres de l'équipage du porte-hélicoptères amphibie Mistral, l'un des trois français, entré en service en 2006. 

A l'entrée de la base, un premier barrage se met en place. Devant les grilles, "il y des blessés, des paniqués, des femmes enceintes, des gens qui ont caché des armes ou de la drogue dans leurs sacs, liste non exhaustivement le capitaine de frégate Grégoire Chavignot, Commandant de la base navale d'Aspretto et de la Marine en Corse. Ils vont petit à petit être pris en charge par l'équipe du Mistral avec des groupes de filtrage, de protection, de soignants."

Première étape : faire entrer un par un chaque ressortissant pour le fouiller. Les blessés passent en priorité pour être pris en charge au plus vite par les équipes de soignants présentes quelques mètres plus loin. Une fois dans la zone sécurisée, c'est la vérification de la conformité des ressortissants - leur identité - qui démarre. "Ils doivent faire partie des listes consulaires, précise le Commandant. Il peut y avoir des cas non conformes si les personnes n'y figurent pas, et c'est là la complexité d'une telle opération."

Les personnes souffrantes sont évacuées par les militaires vers les tentes situées à proximité d'un hangar géant de la base d'Aspretto. C'est là-bas que tous les ressortissants qui ont passé les étapes précédentes se dirigent. Quelques madeleines, de l'eau ou des boissons chaudes les y attendent, pour les faire patienter jusqu'à la prochaine rotation d'un bateau en direction du Mistral. "On les prend en charge au sein d'un dispositif assez conséquent sur l'eau et à terre, développe le capitaine de vaisseau Jocelyn Delrieu, Commandant en second du porte-hélicoptères. On les met en sécurité tout en prenant en charge les blessés et surtout, on les réconforte." 

Alors que les ressortissants s'accumulent par petites dizaines à la sortie du hangar dans l'attente de monter sur un bateau direction le Mistral, les bourrasques de vent font passer le temps. En action, les hélicoptères de l'armée de l'air évacuent 36 ressortissants qui n'ont pas réussi à rejoindre la zone de sécurité. Tous - parmi lesquels figurent des élèves de l'établissement Laetitia Bonaparte - sont bloqués au centre hospitalier Notre Dame de la Miséricorde. Par petits groupes, ils sont héliportés vers la base navale et rejoignent, eux aussi, le hangar.

Une fois arrivés sur l'immense porte-hélicoptères - 200 mètres de long, 22 000 tonnes -, un nouveau tri débute pour les ressortissants. "Ils passent par un bureau d'enregistrement pour une dernière vérification de l'identité avant de pouvoir monter dans le hangar d'aviation - qui sert habituellement au parcage des hélicoptères - transformé en sas de repos pour dormir, jouer à des jeux, se détendre ou manger, explique le Capitaine de vaisseau Olivier Roussille, Commandant du Mistral. Les blessés peuvent être transférés dans un hôpital embarqué d'une capacité de 70 lits, avec deux blocs opératoires, des salles de réanimation, un scanner..." 

Après plusieurs heures d'attente, le périple devient enfin moins anxiogène pour les 300 personnes évacuées. Elles rejoindront désormais un port sécurisé pour y être débarquées. Bien que les exercices soient récurrents, un tel nombre de ressortissants reste très rare pour une simulation de la Marine. "C'est une opération complexe qui nécessite beaucoup de coordination, détaille Olivier Roussille. Ça permet de s'assurer qu'on a le matériel adéquat et que les marins savent s'organiser au cas où ce genre de situation se présente."

Depuis sa mise en service, le Mistral a déjà effectué trois opérations de la sorte. Au Liban, en 2006, il avait évacué 1200 ressortissants. Les deux autres ont eu lieu en 2014 en Lybie et au Yémen, en 2019.