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"Le Téléthon a tout changé" : la chercheuse France Pietri-Rouxel en Corse pour présenter les victoires de la recherche


Pierre-Manuel Pescetti le Samedi 16 Octobre 2021 à 21:02

France Pietri-Rouxel, directrice de recherche au CNRS et cheffe d’équipe à l’Institut de Myologie de Paris était en Corse ce samedi 16 octobre pour présenter les grandes victoires de la recherche sur les myopathies. Dans le cadre de la 35e édition du Téléthon, la chercheuse est venue mettre en lumière son importance pour faire avancer la recherche. Elle a répondu aux questions de CNI concernant les espoirs que suscitent ces avancées.



France Pietri-Rouxel,
France Pietri-Rouxel,
Pouvez-vous nous parler de l’Institut de Myologie et de son lien avec le Téléthon ?

 - À l’institut de myologie nous faisons des études sur le muscle et donc sur les toutes les maladies neuro-musculaires. L’institut comprend un centre de recherche dans lequel je travaille et des pôles de recherche. Son intérêt est qu’il comporte toute une partie clinique avec les patients et les services de neuro-myologie. Le malade est au milieu de tout le processus.
L’institut de myologie fait partie de ce qu’on appelle les bras armés de l’AFM téléthon qui le finance, tout comme le laboratoire Généthon. Ce dernier est un centre d’investigation qui est plus dans le développement des approches thérapeutiques alors que l’institut de myologie est plus dans tout ce qui est en amont : la recherche, le développement pré-clinique.

 - Concrètement, dans un laboratoire, à quoi servent les dons du public lors du Téléthon ?

 - Les dons servent à financer des projets de recherche bien identifiés. L’argent finance le fonctionnement, c’est-à-dire le matériel et les réactifs par exemple. Il aide aussi à financer le salaire des chercheurs et des ingénieurs qui travaillent sur ces projets.

 - Quelles sont les plus grandes avancées permises par 35 ans de Téléthon ?

 - Pour sa 35e édition, des témoignages de patients seront mis en avant : le Téléthon a tout changé pour eux. Des traitements existent et des patients sont traités. Il y aura aussi des témoins pour qui le Téléthon va tout changer. Ce sont des personnes avec qui on a des projets de recherche, des projets cliniques qui vont permettre la création d’un médicament.

Je pense que la Téléthon a permis une véritable révolution technologique en permettant une approche du soin par les thérapies géniques. Elles font aujourd’hui la preuve de leur réussite. Des médicaments développés grâce à elles sont aujourd’hui sur le marché, des essais cliniques sur des patients montrent des résultats vraiment très probants. Tout ça a été porté au départ par le Téléthon.

 - Pourquoi cette révolution technologique n’aurait pas été possible sans le Téléthon ?

 - Ici on parle plutôt de politique de financement. Avoir des idées c’est bien mais il faut pouvoir être financé. Au départ, la thérapie génique n’était pas énormément financée par les instances publiques. L’audace du Téléthon et sa stratégie scientifique ont permis de rendre possible ce financement public et donc la recherche.

 - Cette année le Téléthon met en lumière les victoires de la recherche sur les myopathies, votre spécialité. Quelles sont ces victoires ?

 - Il y a plusieurs centaines de myopathies. Une des grandes avancées a été de pouvoir faire un diagnostic sur des maladies dites orphelines. On trouve en fait les mutations impliquées dans ces maladies. Si on ne sait pas où ça ne va pas, on ne peut pas réparer.  Ça nous permet ensuite de développer des médicaments. Sur la myopathie de Duchenne par exemple, des essais cliniques sont en cours et c’est une grande avancée.

Le petit Jules est un témoin extraordinaire de ces avancées. Cet enfant était incapable de respirer tout seul et de s’asseoir à cause de sa myopathie myotubulaire. Aujourd’hui, il est capable de faire du vélo.

La petite Victoire est aussi dans ce cas-là de témoin de la réussite. Elle est atteinte d’une maladie appelée la SMA, l’amyotrophie spinale. Une maladie où les enfants meurent très jeunes. Aujourd’hui, grâce à l’approche de la thérapie génique, elle a deux ans et elle aussi fait du vélo.

 - En 2019, un premier médicament contre l’amyotrophie spinale issu des laboratoires Généthon a été autorisé aux Etats-Unis. Qu’en est-il en France ?

 - En France les tests commencent. La petite Victoire a reçu une injection de ce médicament et elle se porte très bien.

 - L’espérance de vie des malades atteints de la dystrophie musculaire de Duchenne a progressé de 15 ans ces dernières années. Comment ?

 - Ce n’est pas un traitement qui leur a permis d’avoir une espérance de vie rallongée. On ne soigne pas la myopathie de Duchenne, pour l’instant. C’est la prise en charge qui a évolué. D’un point de vue kiné, respiratoire, les opérations leur permettent d’être assis correctement par exemple.  Cette prise en charge améliorée est aussi une mission de l’AFM Téléthon.

Aujourd’hui, la grande majorité des patients sont traités avec des corticoïdes car on s’est aperçu qu’ils retardaient le moment où les enfants perdaient l’usage de la marche. La vraie solution pour guérir la myopathie de Duchenne c’est d’arriver à restaurer la protéine manquante, à savoir la Dystrophine, et pour ça nous sommes en essais cliniques.