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Nouvelles scènes de violence à Ajaccio


Philippe Peraut le Jeudi 10 Mars 2022 à 07:17

Près de 1 500 personnes se sont rassemblées ce mercredi 9 mars 2022, vers 18h30, devant les grilles de la Préfecture à Ajaccio. Personnalités de la société civiles, élus, syndicalistes, associatifs, étudiants ou lycéens, le mot d’ordre restait le même que ces derniers jours, le soutien à Yvan Colonna et sa famille, des réponses demandées quant aux conditions de son agression, la demande de rapprochement des autres détenus du commando Erignac.
La situation s’est rapidement tendue débouchant sur de violents affrontements entre manifestants et forces de l’ordre. Plus de dix personnes ont été blessées



Photo Michel Luccioni
Photo Michel Luccioni
Le mot d’ordre, compte tenu des tensions de ces derniers jours, restait d’être pacifique. Mais, signe avant-coureur, il avait été demandé aux commerces du cours Napoléon et de la rue Fesch, de fermer vers 17.30. Sans structure officielle, le rassemblement de ce jour était beaucoup plus conséquent que la veille et au-delà de la seule famille nationaliste.

Cette fois, il concernait également des personnalités du monde associatif (Per a Pace), du syndicalisme (présence de la CGT de la Corse-du-Sud), du monde politique (La France Insoumise, Inseme A Manca), de l’enseignement et bien sûr des élus de l’opposition municipale ou de l’Assemblée de Corse (Julia Tiberi, Jean-François Casalta, Alex Vinciguerra).

Vers 18.30, le rassemblement se poursuit pour atteindre, quelques minutes plus tard, quelque 1500 personnes.

Un premier barrage de gardes mobiles fait face à la foule interdisant l’accès à la Préfecture. Au son de « A Palatina », les manifestants le franchissent pacifiquement. Des banderoles sont alors déployées devant les grilles « Sustegnu à Yvan », « Gendarmi fora ».

La foule se fait de plus en plus compacte, mais l’ambiance est plutôt calme. « On est là pour apporter notre soutien à Yvan Colonna et sa famille, explique Patrick Bossard (CGT), ce qui arrive est inadmissible et nous serons là pour accompagner cette jeunesse dans sa quête de vérité concernant cette affaire. »

Pour Jacques Casamarta (Per a Pace), « Nous sommes otages d’une situation tendue et dangereuse. L’arrivée, ces derniers jours en Corse, de centaines de gendarmes n’est pas de nature à calmer le jeu, bien au contraire... »

Du côté de Julia Tiberi (élue PNC et de l’opposition municipale à Ajaccio), le ton est le même. « Il est vital que la justice triomphe dans cette affaire. Nous sommes là en soutien à Yvan Colonna, à tous ces jeunes qui manifestent leur colère ces derniers jours. Le mouvement s’intensifie au-delà de notre famille politique, c’est le signe que les choses bougent. »

Sacha, jeune étudiant manifeste, lui, sa colère. « L’État nie les droits du peuple corse, cette situation est inadmissible, Yvan Colonna comme Alain Ferrandi et Pierre Alessandri devraient être en Corse depuis longtemps. L’attitude de Paris est inadmissible et le fait de voir que les étudiants sont rejoints par beaucoup de monde et pas seulement des nationalistes montre que le peuple corse dans son ensemble est sensible. »
 

De longs affrontements
Vers 20 heures quelques manifestants disposés du côté du Diamant lancent des pétards contre les gardes mobiles disposés près du commissariat. Et la situation va rapidement dégénérer dans une violence plus intense que celle d’hier.

Les CRS attendent puis répliquent en lançant des grenades lacrymogènes afin de disperser la foule. Réponse des jeunes manifestants avec des bombes agricoles. Les gardes mobiles les encerclent et vont même charger en lançant des grenades lacrymogènes sur la foule et près des commerces ouverts.
Deux personnes, une femme (cuir chevelu) et une jeune homme (touché aux yeux) seront blessés. Une violence urbaine qui va se poursuivre jusque tard dans la soirée.

Cette fois, la plupart des manifestants sont toujours là et deux groupes sont disposés, l’un près de la place Foch et l’autre vers le Diamant. Bombes agricoles et cocktails molotov d’un côté, LBD, flash-ball et gaz lacrymogène de l’autre.


Quatorze blessés 
On déplore au moins 14 personnes blessées dont un journaliste de TF1 à la jambe, selon la préfecture.  Des personnes présentant des brûlures au cuir chevelu, des difficultés respiratoires. Un homme de 40 ans a été blessé à la jambe, un autre de 26 ans souffrirait d’une plaie saturable, un jeune homme de 20 ans a été touché  à la tête par une capsule lacrymogène, une personne âgée prise en charge par un tiers.

Du côté de la Gelateria, un jeune homme a été blessé au mollet par une grenade à dispersion, un autre a été blessé au genou et un troisième touché par un LBD.

À noter, également, que les pompiers ont dû intervenir à plusieurs reprises pour éteindre des feux dans le centre-ville d’Ajaccio et près de la Collectivité de Corse. Une situation qui s'est poursuivie devant le palais de justice contre lequel un cocktail molotov a été lancé et où les pompiers ont été contraints d'intervenir pour combattre un incendie.

Le palais de justice dégradé
Des rames de papier ou des déchets ont été brûlés dans le hall et d'autres départs de feu ont noirci la façade, a constaté un photographe de l'AFP. Ces feux ont rapidement été éteints par les pompiers. 
"Il y a eu un incendie au rez-de-chaussée du tribunal, pas de propagation aux étages mais pas mal de dégâts", a indiqué à l'AFP Jean-Jacques Peraldi, le directeur des services d'incendie et de secours de Corse-du-Sud. 
Il y a eu au moins deux interpellations, selon une source policière.  
Plus tard, certains manifestants, équipés d'une mini-pelle mécanique, ont dégradé une agence du Crédit Agricole, avant de se diriger sur la place Claude Erignac, lieu hautement symbolique, Yvan Colonna ayant été condamné pour l'assassinat du préfet de Corse.  

Là plusieurs personnes se sont interposées pour éviter toute dégradation, un homme montant sur la pelleteuse et criant: "On n'est pas des racailles, on est des patriotes, sortez d'ici", selon une correspondante de l'AFP. 
 


Un nouveau rassemblement de lycées semble prévu ce jeudi matin à 10 heures devant la préfecture d'Ajaccio.

(Photos Michel Luccioni)