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Loi sur le pouvoir d’achat : Pour les députés nationalistes corses et le groupe LIOT, le compte n’y est pas !


Nicole Mari le Dimanche 7 Août 2022 à 11:51

La loi sur les mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat va-t-elle atteindre son objectif affiché : améliorer la vie des gens ? Pour les trois députés nationalistes corses, Paul-André Colombani, Michel Castellani et Jean-Félix Acquaviva, et leur groupe parlementaire Libertés, Indépendants, Outre-Mer et Territoires (LIOT), le compte n’y est pas ! Malgré quelques avancées, ils regrettent qu’au final, ces textes ne tiennent pas compte des spécificités des territoires. D’où la décision des députés insulaires de s’abstenir. Comme l’a expliqué Paul-André Colombani, député PNC de la 2nde circonscription de Corse du Sud, en séance publique, lors du débat à l’Assemblée nationale.



Paul-André Colombani, député PNC de la 2nde circonscription de Corse du Sud, membre du groupe parlementaire Libertés, Indépendants, Outre-Mer et territoire (LIOT).
Paul-André Colombani, député PNC de la 2nde circonscription de Corse du Sud, membre du groupe parlementaire Libertés, Indépendants, Outre-Mer et territoire (LIOT).
« Avec cette loi, allons-nous suffisamment améliorer le quotidien de celles et ceux qui souffrent ? De celles et ceux qui voient leurs factures grimper et leurs salaires stagner ? ».  C’est la seule question qui prévaut, estime le député nationaliste de la 2nde circonscription de Corse du Sud, Paul-André Colombani, concernant le projet de loi sur les mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat « à l’heure où le coût de la vie est tel qu’il empêche les personnes de vivre dignement des fruits de leur travail. Or du travail – et plus particulièrement de sa valorisation au travers des salaires – il n’en est finalement que peu question ! ». Le député PNC est intervenu, lors du débat qui s’est tenu, mercredi dernier, en séance publique à l’Assemblée nationale, pour expliquer sa position, celle de son groupe parlementaire « Libertés, Indépendants, Outre-Mer et territoire (LIOT) », et de ses deux collègues nationalistes, Michel Castellani et Jean-Félix Acquaviva. « Vous faites le choix de dispositifs facultatifs, qui ne profiteront pas à tous », lance-t-il au gouvernement.
 
Pas de politique salariale
Dans sa ligne de mire, d’abord, le choix de ne pas prendre de véritables mesures sur l’augmentation des salaires, mais de proposer le pis-aller de la pérennisation de la prime « pouvoir d’achat » que peu de gens vont toucher. Le groupe LIOT dénonce des effets d’annonce : « le doublement de son plafond relève presque de la communication. Jusqu’ici, cette prime n’a été, en moyenne, que de 540 euros. Loin des 6000 euros affichés ! Et 4 salariés sur 5 n’en ont, pour le moment pas bénéficié ! ». Il fait les mêmes remarques sur les mesures introduites par le Sénat sur ce texte et dans le budget rectificatif, à savoir la réduction des cotisations associées aux heures supplémentaires, ou encore le rachat des RTT. « Ces dispositions peuvent, dans l’urgence, soutenir le pouvoir d’achat. Mais elles ne constituent pas une politique salariale ». Pour les députés nationalistes et leurs collègues du groupe LIOT, il est urgent d’avoir « ce débat essentiel : celui de la juste rémunération du travail. Si nous nous dérobons à ce débat, il se rappellera à vous ». Ils jugent tout aussi important d’avoir un débat sur la pérennité du modèle social. Le député Colombani rappelle que « si ce pays a, comparativement à ses voisins, mieux encaissé le choc inflationniste, c’est grâce à ses amortisseurs sociaux. Le pérenniser et le conforter, c’est proposer de nouvelles sources de financement. La taxation exceptionnelle des « super profits » de certains grands groupes était une réponse juste. Nous regrettons qu’elle ait été rejetée ». Il martèle, encore une fois, la question : « Le projet de loi améliore-t- il la vie concrète des gens ? ». Pas vraiment, affirme-t-il, « Disons qu’il limitera les dégâts. Les revalorisations de prestations sociales à 4% demeurent en-deçà de l’inflation. Le gouvernement s’est engagé, au banc, à revaloriser les retraites en fonction de l’inflation, dès janvier prochain. Nous suivrons la concrétisation de cette promesse ».
 
Des spécificités ignorées
Le député corse regrette surtout que les deux textes, qui forment le paquet de loi sur le pouvoir d’achat, ne tiennent pas assez compte des spécificités des territoires : zones rurales, Outre-mer, et aucunement des demandes d’adaptations faites à l’unanimité par l’Assemblée de Corse et issue de la Conférence sociale. Tous les amendements déposés par les trois députés nationalistes ont été balayés d’un revers de main par le gouvernement. « Il faudra faire mieux pour adapter les mesures aux spécificités territoriales, sources d’inégalités. Notre groupe a permis quelques petites avancées en matière de logement : pour contenir la hausse des loyers à 2,5% dans les Outre-mer et à 1,5% en Corse. Dans ces territoires, les tensions sur le marché locatif sont particulièrement fortes. Mais soyons lucides : beaucoup de locataires continueront à dédier une part excessive de leurs revenus à se loger ». Autrement dit, ce n’est pas cela qui va faciliter l’accès au logement en Corse ! Là aussi, précise-t-il, le gouvernement ne pourra pas échapper à ce débat. « Il n’est pas normal que nos concitoyens ne puissent tout simplement pas accéder à un logement à prix raisonnable à proximité de leur travail. Et malgré nos propositions, l’adaptation des mesures de soutien aux spécificités territoriales reste insuffisante. On ne vit pourtant pas la vague inflationniste de la même manière à Paris, en Corse, en zone rurale ou dans les Outre-Mer, où la situation est très difficile ». Le gouvernement s’est fermement opposé à l’amendement du groupe LIOT sur une variation de taxe d'habitation sur les résidences secondaires dans les territoires affectés par la spéculation immobilière et foncière, comme la Corse ou la Bretagne...
 
Rien sur le climat
Le député Colombani et son groupe ne sont guère plus convaincus par les mesures relatives aux prix de l’énergie. « Elles sont stratégiques puisqu’une grande partie de l’inflation en résulte. Le choix, qui est fait, est encore celui de l’urgence, au détriment du climat : réouverture des centrales à charbon, terminal méthanier flottant, importation de gaz de schiste. Ces décisions d’urgence doivent rester dérogatoires et ponctuelles ». Il alerte également sur la situation d'EDF et la proposition du gouvernement de racheter le capital non détenu par l’Etat. « Pourquoi pas ! Mais cela ne résout en rien le déficit abyssal d’EDF, creusé entre autres, par l’ARENH. La décision de rehausser le prix de l’électricité vendu par EDF à ses concurrents, tout en limitant la quantité cédée, va dans le bon sens. Cela reste insuffisant, toutefois, pour libérer des marges financières, entretenir le parc nucléaire et investir dans la transition écologique ». De plus, note-t-il la Transition écologique est « la grande absente de ces textes, alors que l’urgence, c’est aussi de lutter contre le dérèglement climatique ». La seule satisfaction pour le groupe LIOT est la déconjugalisation du calcul de l’allocation adulte handicapé, qu’il revendiquait depuis longtemps. « C’est l’aboutissement d’un combat que nous menons de longue date. Au gouvernement désormais d’assurer une mise en œuvre rapide de cette mesure de justice ». Tout en déplorant cependant qu’elle soit mise en place « un peu tardivement ».
 
Insuffisant !
Le député corse conclut en reposant toujours la même question qui est, pour lui, centrale : « Améliorons-nous la vie des gens ? Voilà la seule question que l’on doit se poser au moment du vote. Malgré les critiques, nous reconnaissons quelques avancées et nous ne nous y opposerons pas. Une partie des députés de mon groupe le soutiendra, une autre s’abstiendra. Mais, au-delà de l’urgence, il nous faut sans tarder ouvrir les chantiers que j’évoquais, avec l’objectif de réellement améliorer le quotidien de tous les citoyens ». Les députés nationalistes ont choisi, pour leur part, de s’abstenir « Ces mesures ne sont pas suffisantes ! » commente Paul-André Colombani. « J’aurai voulu qu’on prenne rapidement des mesures sur le prix de l’essence en Corse et sur la taxation des résidences secondaires, comme on leur a proposé. Le gouvernement n’a rien donné comme d’habitude ! On ne vote pas contre, mais on ne peut pas voter pour ».
 
N.M.