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Confinement. Avocat en Corse, une profession en danger ?


Livia Santana le Mercredi 29 Avril 2020 à 17:45

Après la crise sociale de la réforme des retraites, la crise sanitaire du Coronavirus, les avocats corses devront faire face à la crise économique sans précédent. Julia Tibéri et Jean-Paul Eon, bâtonniers au barreau d'Ajaccio et de Bastia font un état des lieux de la situation actuelle.



Photo archive
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Pendant plus de deux mois, les avocats en grève ont protesté contre la réforme des retraites. Après la crise sociale, c'est à présent la crise sanitaire qui paralyse l'activité des 300 avocats présents sur l'île.

Depuis le 9 mars, les tribunaux et la justice fonctionnent à minima. Seuls les cas dit "urgents" sont traités. A présent toutes les communications  se font par mail et par téléphone. Un dialogue entre client et avocat assez complexe puisqu'il est compliqué de transmettre les pièces à apporter aux dossiers par mail. De plus, Jean-Paul Eon souligne que " pour certaines affaires, les clients ne préfèrent pas en parler par téléphone." 
Julia Tiberi, bâtonnier du barreau d'Ajaccio :"pendant ce temps-là, c'est vrai qu'on en profite pour faire des conclusions et des assignations mais on ne peut pas lancer de procédure, ni plaider Le confinement ne favorise pas l’avancement des dossiers." 

Une crise économique attendue 

Les avocats ont fermé leurs cabinets et ne reçoivent plus de clients. La quasi-totalité du personnel est au chômage partiel. Depuis mi-mars les recettes sont "presque nulles" d'après Jean-Paul Eon. L'ordre des avocats qui emploie trois personnes a lui aussi fermé ses portes. Selon le bâtonnier de Bastia, 80 à 90% de l'activité serait au point mort. 

D’une manière général les personnes sont, en cette période, très soucieuses de leur santé et préfèrent remettre à plus tard les contentieux comme les divorces. L'activité pénale a, elle aussi, subi les conséquences du confinement selon le bâtonnier "il y a de moins en moins de garde à vue".

Les avocats comme d’autre secteurs d'activité seront très impactés par cette crise sanitaire. Jean-Paul Eon redoute "une casse pour de nombreux cabinets qui pourraient se retrouver en cessation de paiement et ainsi ne pas survivre à la crise". Le bâtonnier de Bastia en est sûr : " tout dépendra des aides apportés par l'Etat comme l'abandon des charges" qui semble "inévitable" selon lui. Julia Tiberi est du même avis, mais pour elle "le report des charges ne suffit pas".

"J'ai un nœud à l'estomac quand on envoie des avocats au parloir dans les prisons"

La crise sanitaire permet tout de même aux détenus de consulter leurs avocats. Ainsi des parloirs sont toujours organisés dans les centres de détention. Pour Julia Tiberi : "les conditions de travail ne pas très satisfaisante, quand les avocats rencontrent leurs clients, ils y vont avec des protections qu'ils se sont procurées eux-même, voire aucune."
 
Dans les prisons aucun masques ou gels ne sont mis à disposition des avocats. D'après le bâtonnier de Bastia, les gestes barrières ne sont pas respectés puisque le détenu est confiné dans une petite pièce à très peu de distance de son avocat. "J'ai un nœud à l'estomac quand on envoie des avocats au parloir dans les prisons.", lance-t-il.

Et l'après 11 Mai ?

Les avocats de l'ordre de Bastia demandent un renvoi des affaires inscrites au rôle des assises de Haute-Corse du  25 mai prochain. Habituellement, il faut rencontrer son client au moins dix fois pendant deux heures pour préparer les dossiers des assises. 
Pour Jean-Paul Eon : "Le droit de la défense ne peut-être assuré dans ces conditions. Pourtant, on aurait interêt à ce qu'elles se tiennent en tant qu'avocats mais d'un point de vu sanitaire c'est inimaginable que le juré se tienne enfermé dans une pièce de délibération.", reprend-il.
Les sessions de cours d’assises ont déjà été renvoyées à Nice, Draguinian ou encore à Grasse.
Et en Corse ?