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Une concertation nécessaire pour réguler l'activité des bateaux de croisière en Corse


Naël Makhzoum le Jeudi 13 Octobre 2022 à 20:48

La première réunion d'un cycle de concertations autour de l 'avenir du secteur des croisières en Corse s'est ouvert ce mercredi 12 octobre à Ajaccio.



Photo Michel Luccioni
Photo Michel Luccioni
C'est le début d'un grand chantier. Le président du conseil exécutif de Corse, Gilles Simeoni, a réuni la ce mercredi 12 octobre à la Collectivité de Corse, le président de la Chambre de Commerce et de l'Industrie de Corse, Jean Dominici et les maires d'Ajaccio et Bastia pour se pencher sur le sujet des croisières. Une question qui divise depuis longtemps, entre le poids économique que le tourisme peut représenter et la dimension écologique en déphasage total avec les enjeux de transition énergétique insulaires. Des actions avaient déjà été menées pour le dénoncer, notamment par le parti indépendantiste Core in Fronte, qui avait bloqué un navire à l'entrée du port ajaccien afin de sensibiliser l'opinion publique début juillet. Une réaction était attendue et enfin, un premier point de départ semble s'esquisser.

"La première chose à faire est que toutes les parties prenantes s'accordent sur un constat, pose Stéphane Sbraggiamaire d'Ajaccio. Mais le fait est qu'aujourd'hui, il y a un manque d'informations à la fois dans le détail des impacts environnementaux perceptibles sur l'ensemble des croisières, et en termes économiques, sur les retombées qui y sont liées." 

Hormis une étude économique réalisée sur la période 2017-2018, ayant estimé à 50 euros la dépense moyenne d'un croisiériste débarquant sur le port de l'île, difficile de se faire une idée précise de ce que représente le phénomène. Certains chiffres sont en revanche très clairs : avec 227 escales et 600.000 passagers qui ont fréquenté le port d'Ajaccio depuis mars dernier et jusqu'au mois de novembre, le secteur ne cesse de prendre de l'ampleur.

"Ne pas jouer un rôle de Casque bleu" 

Alors l'approfondissement des données est indispensable pour fonder de solides bases de travail. "On a surtout défini un cadrage méthodologique, explique Stéphane Sbraggia. Désormais, il faut se débarrasser des postures et arrêter d'opposer de manière dogmatique les questions environnementales et économiques. Ça, on ne peut le faire qu'en disposant d'un niveau d'information suffisant." 

Un premier consensus émerge déjà de cette réflexion collective menée par des acteurs aux intérêts divergents. "Nous avons convenu de définir ensemble une charte de bonne conduite, comme un cahier des charges, dévoile le maire d'Ajaccio. Même si la ville n'a pas de compétence organique sur le sujet, elle reste le territoire concerné et porte un projet qui traite de toutes ces questions. Je l'ai rappelé à M. Simeoni : nous ne comptons pas jouer un rôle de Casque bleu, mais bien être intégrés dans le processus d'élaboration de cette charte qualité, avec des exigences fortes en deçà desquelles on ne descendrait pas."  Ce texte, qui devrait voir le jour avant les escales de l'année prochaine, exclurait les armateurs qui réfuteraient l'idée de la transition écologique. Le maire souhaite aussi "fixer une forme de contrat de progrès pour s'engager et tendre à un comportement plus vertueux sur les questions environnementales en les conciliant avec les impératifs économiques qu'on ne peut ignorer."

Expertises, enquêtes et mesures 

Pour mettre en pratique, il faut donc des informations. Et c'est le concessionnaire des ports, la Chambre de Commerce et d'Industrie (CCI) de Corse qui va se charger de les récolter. "On va mandater des cabinets d'expertise et diligenter des expertises et des enquêtes pour avoir toutes les mesures, de façon à décider de manière factuelle, expose Stefanu Venturini, vice-président de la CCI de Haute-Corse, en charge du dossier. On a déjà demandé, par exemple à Qualit'air d'installer des points de contrôle de façon à avoir plus d'informations. Une enquête économique va aussi être lancée pour connaître les retombées en fonction des compagnies." 

Une manière d'obtenir des résultats plus fiables que ceux des études mondiales ou d'autres régions qui servaient de référence, mais ne sont pas en corrélation avec la Corse puisque ce ne sont pas les mêmes bateaux. La nécessité n'est, par ailleurs, pas forcément de diminuer le nombre de navires mais de les rendre moins polluants. "Il y a plein de possibilités dont la plus importante est celle qui parait ridicule : diminuer la vitesse d'approche des bateaux, c'est ce qui a le plus d'impact, assure Stefanu Venturini. On peut aussi, entre autres, prendre des trajectoires spécifiques pour éviter les parcs marins ou passer à proximité des aires de posidonie." 

Les mesures envisageables sont nombreuses et seront étudiées en concertation avec d'autres acteurs. La CCI devrait apporter ses premiers éclairages à l'occasion d'une seconde réunion prévue dans quelques semaines. Cette fois, le groupe de travail s'élargira à d'autres acteurs, notamment aux associations de commerçants et de défense de l'environnement.