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Traitement des cancers : La Corse disposera-t-elle bientôt d’un TEPscan ?


Nicole Mari le Lundi 1 Août 2022 à 19:53

La Corse possèdera-t-elle bientôt un ou deux TEPscan qui est un examen incontournable dans la prise en charge des cancers ? Le projet, qui date de 2015, a considérablement avancé, mais il reste suspendu à une décision gouvernementale et à une problématique de transport des matières dangereuses nécessaires à son fonctionnement. Le groupe Core In Fronte, a interpellé l’Exécutif corse, jeudi dernier, lors des questions orales de l’Assemblée de Corse sur le calendrier de mise en œuvre. La conseillère exécutive, Bianca Fazi, a annoncé qu’une solution de transport par drone de ces matières est à l’étude.



Bianca Fazi, conseillère exécutive en charge de la santé et du médico-social. Photo Michel Luccioni.
Bianca Fazi, conseillère exécutive en charge de la santé et du médico-social. Photo Michel Luccioni.
La Corse est la seule région de France à ne pas être dotée d’un TEPscan (Tomographie par émission de Positons), alors que le cancer constitue la première cause de mortalité dans l’île avec 30% des décès. Près de 4 000 patients ont besoin de cet outil de pointe, indispensable pour le diagnostic et le suivi des tumeurs cancéreuses, que ce soit à la phase initiale ou en cas de récidive, ainsi que pour évaluer les soins à prodiguer. Les patients doivent effectuer cet examen sur le continent, or, seule la moitié fait le déplacement. Pour pallier ce manque, un projet d’installation d’un TEPscan, voir deux – un à l’hôpital d’Aiacciu, l’autre à l’hôpital de Bastia - existe depuis 2015 et est porté par la Collectivité de Corse. S’il a pris du retard en raison de la crise sanitaire, il semble piétiner aujourd’hui. Jeudi matin, lors de la séquence des questions orales à l’Assemblée de Corse,Véronique Pietri, a, au nom du groupe Core In Fronte, interpellé l’Exécutif corse sur le sujet.

Une dépendance mortifère
Le 25 juillet, le mouvement indépendantiste avait déjà dénoncé « une situation de renonciation aux soins de nos Paisani » et son « refus de continuer à subir cette dépendance mortifère sanitaire imposée par la France à la Corse ». Véronique Pietri fait remarquer que « tout le territoire français est équipé d'un TEPscan pour 400 000 habitants, y compris les DOM-TOM ». Et de citer le rapport Coteri d'avril 2015 qui confirmait le besoin qualitatif et quantitatif du TEPscan en Corse et le Plan régional de Santé 2012-2016 qui stipulait son implantation. Elle rappelle également le vote unanime à l’Assemblée de Corse d'une motion présentée Danielle Antonini, au nom du groupe « Femu a Corsica » en septembre 2019 et la saisine par le sénateur de Corse du Sud, Jean Jacques Panunzi, du ministre de la Santé sur le sujet. Estimant que « l’Exécutif a les compétences pour jouer un rôle prépondérant dans ce projet primordial pour la Corse », elle interroge : « Quand, concrètement, comptez-vous matérialiser avec toutes les autorités concernées, l'implantation de deux Tepscan, un à Aiacciu et un à Bastia ? Pourriez-vous nous donner un calendrier précis de concrétisation d'installation d'une revendication vitale, majeure et urgente ? ». Avant de conclure : « Tout éventuel atermoiement venant à ralentir, sinon obstruer, un projet sanitaire d'une grande et incontestable importance ne pourrait être qualifié autrement que par de la négligence ».

Un transport par drone
La conseillère exécutive en charge de la santé, Bianca Fazi, également médecin urgentiste à l’hôpital d’Aiacciu, assure de sa volonté et celle du Conseil exécutif « de construire un système de santé qui réponde aux besoins des Corses, au plus près de chez eux. Les Corses peuvent compter sur notre entière implication sur ce sujet, lequel nécessite, nous le savons, une politique publique structurante, adaptée à notre île, dans laquelle nous nous impliquons avec détermination et engagement ». Elle réaffirme que « la prise en charge du cancer, première cause de mortalité en Corse, est une priorité de santé publique et l’installation d’un ou deux TEPscan est une des réponses au besoin de diagnostic de cette maladie ». Elle revient sur la motion qui a fait l’objet d’un courrier à la Ministre de la Santé, « dans lequel nous demandions l’implantation de deux appareils sur les sites de Bastia et d’Aiacciu, associée à un cyclotron sur l’un des deux sites, afin de doter notre île de ces équipements médicaux performants dans le diagnostic des cancers ». La Ministre a répondu que « si l’implantation d’un TEPscan en Corse est un objectif partagé, il convient de poursuivre l’instruction de ce dossier dans toute son ampleur » en faisant le lien avec « le programme de transfert de l’activité oncologie du centre hospitalier de Castellucciu vers le centre hospitalier d’Aiacciu ». Bianca Fazi indique le calendrier de mise en œuvre, qui devait être validé en janvier 2021 dans le cadre du comité de pilotage du projet, a été bouleversé par la crise sanitaire. Et donne des précisions : « J’ai échangé avec l’ARS (Agence régionale de santé) avant les élections présidentielles sur le sujet, qui était en attente d’un changement prévu de majorité, mais surtout d’un Ministre. Il semblerait que le transport de ces matières dangereuses ait un coût très élevé. On s’achemine donc vers une innovation : il s’agit d’un transport par drone. Le projet est sur la table de la DGOS (Direction générale de l’Offre de soins) et devrait être arbitré très prochainement ».
 
Un système performant
Ceci posé, la conseillère exécutive explique que l’installation des TEPscan n’est pas l’unique réponse à la problématique de la prise en charge du cancer. « Il fait certes partie de la prise en charge, mais il doit surtout s’inscrire dans un système global de santé, repensé et adapté aux besoins des Corses en la matière ; c’est là notre démarche ». Elle annonce que l’Exécutif corse compte aller plus loin dans ce domaine : « Nous travaillons à construire le système de santé corse de demain, grâce à plusieurs leviers. D’abord, en nous mobilisant sur un projet de création d’un Centre hospitalier universitaire (CHRU) qui pourra disposer de spécialistes universitaires dans certaines pathologies. En proposant une organisation de la chaîne de soins renouvelée, qui permettra aux Corses de bénéficier d’une prise en charge de haute qualité, au plus près de chez eux et de leurs familles, par exemple, en articulant mieux la médecine de ville et le système hospitalier. Egalement, en favorisant des collaborations constructives entre les structures du privé et l’hôpital. En accompagnant, dès les premières années, les étudiants en médecine afin de favoriser l’installation de jeunes médecins dans le rural qui pourront assurer une régularité de la prise en charge de nos aînés. Enfin, en faisant de la prévention dans le domaine de la santé un axe fort de la politique de la Collectivité en la matière ». Pour construire ce système de santé, l’Exécutif s’appuie sur des diagnostics territoriaux de l’offre de santé, des acteurs de terrains, professionnels et usagers et des professeurs d’université. « Nous voulons un système de santé qui soit performant et équitable dans ses propositions de prise en charge. Nous voulons permettre aux Corses, d’avoir toutes les chances de préserver ce bien précieux qu’est la santé. C’est dans cet esprit que nous travaillons et que nous œuvrons, au service de l’intérêt de la Corse et de son peuple ».

N.M.