Corse Net Infos - Pure player corse

Tourisme : Après un mois de juillet « catastrophique », le GHR Corsica réclame la création d’une cellule de crise


le Dimanche 6 Août 2023 à 19:04

Face à des difficultés économiques qui se multiplient pour les acteurs du tourisme cette saison, ce syndicat récemment créé sur l’île insiste sur l’urgence à mettre en place des mesures pour limiter la casse. Son président, César Filippi, alerte d’ores et déjà sur des premiers dépôts de bilan



Pour César Filippi, le président du GHR, il est nécessaire de mettre en place une cellule de crise face aux grandes difficultés rencontrées depuis le début de l'été par les acteurs du tourisme (Photo: Archives Michel Luccioni)
Pour César Filippi, le président du GHR, il est nécessaire de mettre en place une cellule de crise face aux grandes difficultés rencontrées depuis le début de l'été par les acteurs du tourisme (Photo: Archives Michel Luccioni)
« C’est du jamais vu ». César Filippi ne mâche pas ses mots. Alors que la moitié de la saison touristique est désormais passée, le président du Groupement des Hôtelleries et Restaurations Corsica (GHR), dénonce à son tour, à l’instar de nombreux socioprofessionnels insulaires, un été 2023 d’ores et déjà catastrophique sur le plan économique, et ce « quelle que soit la teneur du mois d’août ». « Nous avons déjà des collègues qui ont déposé le bilan mi-juillet parce qu’ils n’arrivaient pas à gagner le salaire des personnels qu’ils embauchaient. C’est très inquiétant, car ce sont des établissements qui avaient pignon sur rue et dont les dirigeants sont de gros travailleurs », souffle-t-il.
 
Ces derniers jours, la Chambre de Commerce et d’Industrie de Corse a publié les premiers chiffres de la fréquentation dans les ports et aéroports de l’île. Si une légère baisse est effectivement constatée par rapport à l’exceptionnelle saison 2022, il ressort de ces statistiques que le mois de juillet a cependant était meilleur que la même période en 2019. Mais malgré l’affluence, les socioprofessionnels accusent le coup face à des publics qui désertent leurs établissements. Le président du GHR affirme ainsi qu’à de rares exceptions qui arrivent à tirer leur épingle du jeu, les hôtels sont vides en Corse cet été. « Ce sont des régions touristiques, des établissements qui ont toujours été complets qui ne sont aujourd’hui qu’à 50% de taux d’occupation au mois d’août », relève-t-il en notant qu’aucune microrégion de l’île et aucune gamme d’hôtels n’est épargnée. 

" Si on attend la rentrée, il sera trop tard"

« Mais on voit qu’il y a du monde et les touristes ne dorment pas sur le sable, ils sont bien quelque part », grince-t-il en observant : « Selon les chiffres de l’INSEE, l’offre professionnelle représente 180 000 lits sur toute la Corse allant du camping à l’hôtel 5 étoiles, en passant par les résidences de tourisme, les fermes auberges. L’offre para hôtelière compte de son côté 600 000 lits sur l’île, soit trois fois plus. Nous représentons donc le quart de l’offre réceptive, et pour notre part la moitié de notre chiffre d’affaires passe dans la masse salariale. Donc, nous ne pouvons pas baisser nos prix de moitié comme le font les villas et appartements lors des périodes de crise ». Dans ce droit fil, César Filippi pointe également le respect des règles fiscales et administratives et des conventions sociales, ainsi que tous les contrôles auxquels sont soumis les établissements professionnels. « Tandis que face à nous, nous avons un raz de marée de gens qui ne respectent rien, qui ne payent rien, qui spéculent, qui dérégulent l’ensemble de la société corse et qui nous mettent par terre », tance-t-il. En outre, il déplore « la mauvaise communication de l’Agence de Tourisme de la Corse ». « On voit que les hôtels sont impactés sur la période de haute saison. L’agence devra s’expliquer là-dessus. La discussion avec les professionnels va être compliquée », annonce-t-il. Enfin, il assure aussi que de nombreuses annulations de vols ont précipité certains établissements au-devant de grandes difficultés. « Cela concerne des milliers de séjours pour lesquels nous avons dû rembourser des arrhes », livre-t-il. 
 
« Aujourd’hui, nous nous demandons tous comment nous allons faire », reprend le président du GHR en dévoilant : « Pour notre part, nous avons pris les devants, et avons envoyé des lettres à la responsable du ministère du redressement productif, Mme De Moura, la directrice de la DREETS, au préfet de région et au président du tribunal de commerce pour leur dire qu’il faut mettre en place une cellule de crise en urgence pour faire face à ces problématiques. Si on attend la rentrée, il sera trop tard : il y aura des établissements qui seront proches du redressement judiciaire voire de la liquidation, car cela va très vite ! ».

Faire bouger les lignes

Plus loin, César Filippi indique que le GHR Corsica veut s’inscrire, sur le plus long terme, dans une démarche visant à sortir le secteur du tourisme corse du marasme. Récemment créé sur l’île, ce syndicat qui compte déjà quelque 300 adhérents représentant neuf secteurs d’activités aspire en effet à « corriger un manque de revendications existant sur des points essentiels concernant l’exploitation professionnelle en Corse » selon son président.

Pour ce faire, il escompte porter plusieurs demandes « fondamentales » dont les principales ont pour but de « stopper net le développement toujours en cours la dérive actuelle de l’offre du para tourisme », de « taxer et soumettre au même niveau des obligations sociales, fiscales et réglementaires cette offre clandestine existante », de « réguler l’incohérente répartition territoriale et les dérives tarifaires de l’offre de transport dans l’aérien comme dans le maritime » ou encore de « revoir entièrement la stratégie de promotion du tourisme dans l’île ». En outre, le président du GHR regrette que l’économie ait été « singulièrement oubliée » dans le projet d’autonomie pour la Corse et annonce que le syndicat portera lui-même les deux dossiers du CDI 4 saisons et du crédit d’impôt directement à Paris pour tenter de faire bouger les lignes. Même si cela ne contribuera pas à « sauver la saison ».