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Projet de loi logement : La commission de l'Assemblée explore les spécificités corses face à la crise immobilière


Patrice Paquier Lorenzi le Samedi 18 Novembre 2023 à 09:16

Stéphane Sbraggia, le maire d’Ajaccio, et Laurent Marcangeli, député de Corse du Sud, ont reçu et échangé durant deux jours avec la commission aux affaires économiques de l’Assemblée nationale qui va présenter un projet de loi pour faire face à la crise du logement en s’attaquant notamment à la location des meublés de tourisme dans les zones tendues. Cette proposition portée par Annaïg Le Meur, députée Renaissance du Finistère et Iñaki Echaniz, député Socialiste des Pyrénées-Atlantiques, visant à rééquilibrer l’offre de logement dans les zones touristiques est désormais inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, et sera étudiée dès le 28 novembre prochain. Les plateformes telles que Airbnb ou Booking sont clairement dans le viseur des parlementaires.



Une proposition de loi visant à rééquilibrer l'offre dans les zones touristiques va bientôt être présentée à l'Assemblée Nationale. (crédit photo : Ville d'Ajaccio).
Une proposition de loi visant à rééquilibrer l'offre dans les zones touristiques va bientôt être présentée à l'Assemblée Nationale. (crédit photo : Ville d'Ajaccio).
« Nous avons rencontré beaucoup d’élus, parlementaires, socioprofessionnels durant ces deux jours en Corse. Je voulais également que les membres de la commission aux affaires économiques puissent se rendre compte des spécificités de notre île. Nous vivons une crise du logement parfaitement puissante. Ce projet de loi va être amené à évoluer durant les échanges qui vont se poursuivre jusque dans l’hémicycle. L’accès au logement fait partie des priorités des citoyens ». Laurent Marcangeli, député de la première circonscription de Corse-du-Sud a ainsi expliqué l’objectif de la visite, du président de la commission, Guillaume Kasbarian et des deux rapporteurs qui l’ont accompagné à la rencontre du monde insulaire.

Une crise du logement qui tend à s’accentuer ces dernières années avec l’apparition et la multiplication des locations de meublés touristiques dans les zones tendues. Avec comme conséquence immédiate, une raréfaction des biens à la location à l’année et une hausse des prix de l’immobilier. Pour Guillaume Kasbarian : « Les rencontres de ce jour confirment qu’il y a un besoin d’égalité et une nécessité de remettre à niveau les règles entre la location traditionnelle et la location touristique. On ne peut pas continuer à avantager fiscalement ceux qui louent à des touristes plutôt qu’à un résident qui reste toute l’année. Il n’est pas normal non plus qu’on demande à un propriétaire de faire des travaux pour une location annuelle et rien pour ceux qui le louent à un touriste. Il faut également renforcer les outils pour les mairies de petite taille qui ne peuvent pas agir de manière efficace ».
 
Vers une fiscalité moins avantageuse pour les meublés de tourisme
Ainsi, l’article 1 vise à soumettre les logements loués en courte durée aux mêmes obligations réglementaires que les locations de longue durée, notamment en ce qui concerne la réalisation d’un Diagnostic de Performance énergétique (DPE) afin d’éviter toute éviction du logement pérenne vers le logement touristique, en conservant certaines dérogations liées à leur classement ou leur localisation géographique.
L’article 2 propose d’élargir les outils pour réguler les meublés de tourisme à l’ensemble des communes et donne notamment la possibilité aux élus des territoires en tension d’appliquer le régime d’autorisation de changement d’usage pour de la location touristique (alors que celui-ci est actuellement limité aux communes de plus de 200 000 habitants et à celles des trois départements de petite couronne parisienne).
Cet article vise également à renforcer les règles d’urbanisme comme outil de lutte contre ces phénomènes, notamment en définissant une délimitation claire pour favoriser la construction de locaux à usage d’habitation au sein des plans locaux d’urbanisme. Enfin, l’article 3 de la proposition de loi entend rééquilibrer la fiscalité locative en faveur de la location de longue durée pour inciter les propriétaires à louer des logements toute l’année dans les zones où la demande est particulièrement forte.
 
« Les meubles de Tourisme, c’est devenu le Far West »
Pour Annaïg Le Meur, députée du Finistère, « il y a une diversité importante selon les territoires et il est important de se déplacer sur le terrain. Il est important de contrer la stratégie d’évitement des propriétaires qui évitent les DPE en mettant leurs biens en location en courte durée. Concernant la fiscalité, nous allons proposer une fiscalité qui serait alignée à 40% pour le nu, le meublé classique et le meublé de tourisme. Nous avons du mal à expliquer aux gens qu’il y a un abattement fiscal de 71% concernant ces locations de courte durée alors qu’il est difficile de trouver un logement à l’année dans bon nombre de communes ».

Iñaki Echaniz, député socialiste des Pyrénées-Atlantiques, a « retrouvé en Corse, les mêmes problématiques que chez lui du côté de Bayonne, notamment. Il y a une nécessité d’agir pour retrouver un équilibre entre la vie à l’année et le tourisme. Ce développement touristique ne peut plus se faire au détriment des résidents. On a laissé le Far West s’installer au sein des meublés de tourisme. À New York, Amsterdam, Venise, il y a des règles de plus en plus strictes allant même jusqu’à l’interdiction. On aurait dû le faire avant. Nous sommes arrivés sur un système de rentabilité avec des personnes qui achètent plusieurs biens, sans y mettre un seul pied, pour en faire un Business. Ce n’est plus possible ».

La proposition de loi sera étudiée en commission des Affaires économiques à partir du 28 novembre après-midi, avant d’être examinée en séance publique.