Corse Net Infos - Pure player corse

Processus de Beauvau : Sept militants nationalistes historiques appellent à « ne rien lâcher »


MP le Mardi 5 Mars 2024 à 20:48

Dans un long texte transmis à la presse ce mardi soir, Jo Peraldi, Ghjuvan'Battista Rotilj-Forcioli, Pierrot Susini, Jean-Pierre Susini, Nanou Battestini, Louis Sarocchi et Pierre Poggioli livrent leur analyse sur le processus de Beauvau, et appellent notamment les nationalistes au pouvoir " à ne s'éloigner en aucune façon du contenu et du fond de la délibération du 5 juillet "



Les sept militants nationalistes historiques
Les sept militants nationalistes historiques
Dans un long texte intitulé « Pà u Populu è a Nazioni » transmis à la presse, sept militants nationalistes historiques - Jo Peraldi, Ghjuvan'Battista Rotilj Forcioli, Pierrot Susini, Jean-Pierre Susini, Nanou Battestini, Louis Sarocchi et Pierre Poggioli – font état de leur appréciation du processus de Beauvau, à l’heure où celui-ci est sur le point de prendre fin. 
 
Alors que l’octroi d’un pouvoir normatif à la Collectivité de Corse (CdC) en cas d’évolution institutionnelle est loin de faire l’unanimité, les militants rappellent en premier lieu que « l’autonomie interne n’est pas une simple régionalisation ou autonomie (administrative) de gestion », qu’elle est « un cadre constitutionnel existant dans de très nombreux pays », et surtout qu’elle donne « les compétences au territoire autonome de légiférer et promulguer ses propres lois d’adaptation dans nombre de domaines n’entrant pas dans celui des droits régaliens ». De facto, ils en appellent à la « responsabilité des élus négociateurs ».
 
« Gilles Simeoni et son Exécutif, plébiscités par les dernières élections, ont un rôle majeur à jouer dans ces discussions, sauf à refuser le verdict des urnes et envisager d’autres voies d’expression. Ils doivent pour cela parler avec l’ensemble des nationalistes représentés à l’Assemblée de Corse, d’une seule voix face au Gouvernement. Les nationalistes sont majoritaires, ils doivent le réaffirmer et imposer leur prédominance, sans suivre ce que cherche à faire le Gouvernement qui exige des consensus avec tout le monde, particulièrement avec les restes de la droite en Corse », écrivent-ils en fustigeant : « Cette recherche de consensus large doit être dénoncée car ayant pour but de demander le minimum du minimorum déjà acté, brouillant le contenu par des ajouts de dernière minute vidant la réforme de son contenu et de ses perspectives vers un règlement négocié de la question politique corse ».
 
Pour les militants historiques, il est d’ailleurs hors de question de transiger : « la délibération du 5 juillet doit rester la ligne que doivent porter et défendre les nationalistes (…) en refusant de céder à un quelconque chantage du Gouvernement ou de certaines forces politiques ». « Si certaines personnalités de droite se rallient, c’est une bonne chose, mais les discussions ne doivent en aucune façon s’éloigner du contenu et du fond de cette délibération », déroulent-ils en insistant : « Il ne faut pas s’appesantir sur les positions de celles et ceux qui se sont toujours opposés à toute évolution institutionnelle significative dans l’île ou qui veulent aujourd’hui nous imposer un contenu pour noyer ou brouiller notre démarche vers l’autonomie interne ».
 
« Le bilan de l’ensemble du mouvement nationaliste ne nous semble pas à la hauteur »
 
Par ailleurs, les sept hommes déplorent que « si la victoire nationaliste de 2015 avait fait naître beaucoup d’espoir après tant d’années de luttes et de sacrifices, aujourd’hui et malgré d’autres succès électoraux, (…) le bilan de l’ensemble du mouvement, toutes tendances confondues, ne nous semble pas à la hauteur ». « Les nationalistes qui disaient vouloir construire une nouvelle Corse fondée sur le travail et le sens du bien commun n’ont peut-être pas réussi depuis 2015, à changer la donne en profondeur, et il reste beaucoup à faire pour participer à l’émergence d’une société plus vertueuse, plus partageuse, plus responsable, plus nustrali, plus fière de ses spécificités, de son identité, et plus soucieuse de ne pas rompre la chaîne la reliant aux générations qui nous ont précédé sur notre terre, y forgeant notre âme corse, qui doit rester celle de demainPour l’heure, au-delà des débats actuels sur les évolutions statutaires, nous en sommes encore loin », regrettent-ils. 
 
S’ils conviennent que « l’objectif d’une véritable autonomie législative est un objectif incontournable pour avancer en nous permettant de nous donner les moyens de commencer véritablement à construire ce pays », les militants historiques soulignent en outre qu’« au-delà  des débats actuels sur des évolutions institutionnelles, l’opinion corse aspire avec force au règlement de problèmes qu’elle affronte au quotidien ». Pour « réussir et être plébiscitée par le peuple », l’autonomie doit donc, selon eux, « donner les moyens d’intervenir efficacement dans la résolution de problèmes récurrents ». Et de pointer les questions des transports, des déchets de l’élaboration et de la mise en application réelle des PLU « pour faire face à la spéculation-spoliation de notre patrimoine », de l’agriculture, « pour produire et tendre enfin vers l’autosuffisance alimentaire », ou encore du « surdéveloppement d’un tourisme prédateur et envahissant », de la santé, et la fin des arrêtés Miot. 
 
 
« Il ne faut rien lâcher »
 
« Nous ne devons pas laisser s’installer ou perdurer une nouvelle période de doutes et d’incertitudes quant à notre avenir. Mettons-nous en ordre de marche, les nationalistes tous ensemble, veillons à éviter les pièges de la désunion et de la division, dangereux pour notre lutte », avertissent-ils, « Allons à l’essentiel et montrons à l’État que nous savons ce que nous voulons, avec pour directive vis-à-vis des « négociateurs » de faire preuve de fermeté et de conviction en se montrant intransigeants sur les principes et la marche à suivre, en restant tous pleinement déterminés  sur notre objectif politique aujourd’hui, un nouveau statut performant et dynamique pour la Corse et son peuple, lequel devra figurer dans le préambule de la loi organique ». 
 
Enfin, les sept militants, de concert avec ce qui est défendu par les mouvements nationalistes participant au processus de Beauvau, plaident pour l’inscription constitutionnelle de la Corse à travers un titre. « « Il faut refuser une quelconque inspiration de l’article 73 ( ni au fond, ni à la forme) qui ne servirait  rien », soutiennent-ils en ajoutant que « pour le reste (pouvoir d’adaptation générale des lois et des règlements, reconnaissance d’un pouvoir normatif propre, de nature législative et réglementaire, entre autres questions plus techniques, voire administratives) il ne faut rien lâcher ». 
« Après bien entendu tout dépendra de la volonté de l’État de vouloir réellement une solution politique réaliste et raisonnable, et au peuple corse et ses différentes structures d’émancipation, d’en tirer les conséquences en cas de blocage en haut-lieu via son gouvernement et ses institutions », notent-ils encore avant de conclure : « Et plutôt que d’avoir des hochets, après tant d’années, il faudra tous ensemble quitter la table et se mobiliser, pour poursuivre notre combat et imposer la reconnaissance de notre peuple et de ses droits collectifs sur la terre de Corse ».