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Ne plus promouvoir les mois de juillet et août "c'est une grave erreur" pour les hôteliers corses


le Lundi 15 Mai 2023 à 19:39

Suite aux annonces faites par la présidente de l’ATC il y a quelques jours, les professionnels de l’hébergement touristique insulaires ont souhaité faire part de leur désaccord à travers un communiqué publié ce lundi. Dénonçant une prise de position unilatérale et excessive, ils affirment que leurs établissements sont aujourd’hui bien loin de la saturation lors de la saison estivale. Ils pointent en outre l’impact important des locations meublées et appellent à un sursaut politique face à une situation devenue critique pour nombre de leurs entreprises.



(Photo d'illustration)
(Photo d'illustration)
Il y a quelques jours, lors d’une conférence de presse, la présidente de l’Agence de Tourisme de la Corse (ATC) précisait les grands principes de la nouvelle politique de promotion de l’île. Comme elle l’avait fait dans une interview accordée à CNI  fin avril, elle a notamment indiqué que l’ATC, misant sur la déconcentration, a totalement arrêté « de faire de la promotion pour les mois de juillet et août ». Une stratégie qui ne satisfait pas le collectif des acteurs de l’hébergement touristique professionnel, qui a souhaité réagir dans un communiqué publié ce lundi. Saluant les intentions de l'ATC quant à l’étalement de la saison estivale, cette organisation qui regroupe les organisations professionnelles de l’Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie (UMIH) Corsica, la Fédération Corse de l’Hôtellerie de Plein Air (FCHPA) et les Gîtes de France-Corse, a en effet toutefois entendu « émettre un avis plus réservé » concernant la décision de ne plus promouvoir les mois d’été.
 
« Affirmer de tels propos revient à bien mal connaître la situation des réservations de cette saison estivale pour juillet et août, et encore moins connaître les résultats du mois de juillet de 2022 », soulignent ainsi ces professionnels en développant : « Nous sommes bien loin de la saturation parfois brandie, tendant à faire croire que tous les hébergements sont complets, voire débordent ! ». Dans ce droit fil, ils dévoilent que « le mois de juillet a cessé depuis au moins 9 ans de faire partie de la haute saison tant pour les tarifs pratiqués, que pour les taux d’occupation constatés dans l’hébergement marchand ». Ils alertent d’ailleurs que pour la saison 2023, « pour la première fois de leur histoire, les Gîtes de France-Corse ont du mal à compléter les mois de juillet et août, puisqu’à date, une baisse de 8 et 9 points est constatée sur les réservations respectives de ces deux mois, et ce malgré un budget de communication doublé ». Dans la même veine, ils pointent que « tant dans l’hôtellerie traditionnelle que dans l’hôtellerie de plein air : le mois d’août s’annonce très pâle et en tous cas en forte baisse par rapport aux années précédentes ».« Le vrai mois d’août, tel qu’il en est fait allusion par la présidente de l’ATC, ne court réellement que du 5 au 17 août, ni plus, ni moins. Ce n’est que durant ces deux courtes semaines que l’on peut évoquer un remplissage maximum, le reste du temps, selon les établissements et les microrégions, les fluctuations d’occupation varient de 20 % à 40 % en moins par rapport aux 100 % de pleine occupation», soufflent-ils encore, « Par conséquent, nous estimons que crier « au loup » sur les mois de juillet et d’août nous apparaît comme une prise de position excessive et le choix de ne plus promouvoir ces mois, nous semble une grave erreur stratégique ».

"Une décision unilatérale, dépourvue de concertation"

Par ailleurs, le collectif des acteurs de l’hébergement touristique professionnel émet également des réserves sur l’abandon de la promotion des sites-phares comme support des publicités et actions de promotion en faveur de la Corse. Il argue en effet qu’on « ne fait pas la promotion de Paris sans montrer la Tour Eiffel, pas plus qu’il n’a jamais été omis de magnifier les Pyramides quand il s’agissait de promouvoir l’Égypte » et ajoute que « la diversité et l’originalité des ressources touristiques que nous possédons suscitera plus d’attrait hors saison si l’on masque nos plus beaux sites, nos plus belles plages, et nos plus remarquables atouts touristiques plébiscités dans le monde entier et qui perpétuent notre réputation ».
 
À l’appui de l’ensemble de ces arguments, les professionnels demandent donc à la présidente de l’ATC d’être « moins tranchée sur les mois de juillet et d’août, car (leurs) entreprises sont loin d’être saturées sur ces périodes » et dénoncent de surcroit « une décision unilatérale, dépourvue de concertation ». Ils notent en outre que « la Corse n’a jamais fait de promotion ciblée de son offre en la découpant de manière mensuelle, ni incité qui que ce soit à venir spécifiquement en juillet ou en août ». « Dire qu’on le fera plus, alors qu’en réalité on ne l’a jamais fait, pose aussi un problème de lisibilité du message. En réalité, il semble qu’il s’agisse plus d’une communication de l’ATC destinée à une partie de son électorat, plutôt que de la traduction d’une volonté de construire une promotion touristique performante, ambitieuse et adaptée aux nouveaux temps qui se présentent », instillent-ils. 

"L'impact mortifère des hébergements de type location meublée"

Enfin, le collectif tient à mettre en exergue que « si surfréquentation il y a, il faut envisager que les locations meublées y jouent le premier rôle ». « L’Agence du Tourisme n’est pas sans connaître l’impact mortifère des hébergements de type « location meublée », représentant non seulement une concurrence déloyale pour les professionnels de l’hébergement touristique, mais également une évasion fiscale très bien orchestrée et sans précèdent. Si la Corse subit dans certains territoires une surfréquentation de ses sites remarquables, c’est avant tout parce que les institutions insulaires locales et régionales en charge de l’environnement et du tourisme n’ont jamais jugé nécessaire de maîtriser le volume des lits de type « location meublée » commercialisés via les plateformes en ligne (Airbnb, Booking, Abritel...) », détaille-t-il en précisant que « selon les propres chiffres de la cellule de surveillance de l’ATC, l’augmentation du nombre des locations meublées en Corse est de +14% en 1 an, faisant du même coup de ces loueurs, les principaux logeurs de voyageurs de l’île, et de très loin ». « Nous n’accepterons jamais que la cause de ces surcharges de fréquentation soit imputée aux acteurs de l’hébergement touristique professionnel, dont la capacité d’hébergement n’a que très peu évolué en comparaison de celle des hébergements non marchands », martèle-t-il.

Observant que « dans le monde entier, les responsables politiques s’organisent pour stopper la déferlante des plateformes de commercialisation des locations meublées, qui créent de trop profonds déséquilibres structurels et sociétaux », les professionnels prennent en exemple les îles Baléares où « une quasi révolte des populations locales a conduit à une réglementation drastique de la commercialisation des locations meublées ». « Celle-ci s’est ensuite étendue à l’ensemble de l’Espagne, qui a décidé de sauver ses hôteliers, et de rendre un cadre de vie acceptable aux populations locales », remarquent-ils en déplorant que malgré les alertes qu’ils émettent « en continu depuis 2015 » peu de choses soient encore mises en place sur l’île. « Nous persistons à affirmer que notre tourisme doit être organisé, structuré, et seule l’ATC est en capacité d’en assurer le rôle de catalyseur. Or, force est de constater que nous en sommes encore très loin », regrettent-ils encore, « Nous nous refusons à croire que cette prise de conscience ne soit pas encore active en Corse, et sommes au contraire persuadés que nos élus sont parfaitement au fait de la situation, et des solutions applicables pour, si ce n’est résoudre, a minima ramener la situation à un niveau acceptable, c’est-à-dire un niveau de concurrence qui permettrait aux acteurs de l’hébergement touristique professionnel d’être en mesure de travailler de manière satisfaisante ». Avertissant que la « situation en est arrivée à un niveau très critique » au point qu’il en va « de la survie de nombre de nos entreprises », le collectif conclut : « Il est communément admis que le développement des locations meublées ne se fait plus que dans les zones où le cadre légal est inexistant et/ou obsolète, et il faut croire que dans ce domaine, la Corse a malheureusement un temps d’avance ».