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Laurent Marcangeli : « On n’a pas le droit d’échouer ! »


Paule Cournet le Samedi 27 Janvier 2024 à 20:17

Le député de Corse-du-Sud et Président du groupe Horizons à l’Assemblée nationale a ouvert à CNI les portes de son bureau du Palais Bourbon pour une séance de questions-réponses autour de l’actualité de la Corse, du gouvernement, de son activité de parlementaire au service de l’île, mais aussi de son avenir politique.



Laurent Marcangeli
Laurent Marcangeli
- Lors de sa visite en Corse, Emmanuel Macron a laissé six mois aux élus territoriaux pour trouver un consensus dans le cadre du processus de Beauvau. L’échéance approche, Gérald Darmanin est annoncé pour février.  Il se murmure qu’un accord serait en passe d’aboutir. Une proposition commune va-t-elle émerger ?
- Tout dépend de ce que l’on entend par « proposition commune ». L’unanimité ? Je ne pense pas que ce soit si simple que cela, et peut-être, elle n’y sera pas. Je vois mal, à la fin, tout le monde d’accord. Après, si l’essentiel des forces en présence tombe d’accord, que cela a du poids, que les personnalités politiques que sont Jean-Christophe Angelini, Gilles Simeoni et moi-même, avec tout ce que nous représentons, sommes capables de dégager une assez forte majorité, je me dis qu’on aura atteint une première étape. Peut-être le Président de l’Fxécutif a-t-il une autre vision ? Peut-être est-il en quête d’unanimité ? Si elle y est, tant mieux ! Moi, je me dis que nous pourrions défendre quelque chose qui ne sera pas l’unanimité, mais qui sera un accord large. J’y travaille depuis des mois, sans pour autant le faire savoir, parce que seul le résultat comptera. Je pense que plus on en parle, plus on peut mettre en difficulté le processus. 


- Comment avez-vous travaillé avec les nationalistes qui martèlent que la délibération du 5 juillet, que la droite n’a pas votée, doit être le socle du futur texte ?
- Tout d’abord, je suis en lien direct avec le Président ds l’Exécutif puisque je suis député. Je discute également avec d’autres acteurs. Pour ne rien vous cacher, il m’arrive d’avoir un échange avec Jean-Christophe Angelini sur la question. Il est maire d’une grande commune de Corse, et bien entendu, je discute avec mes amis. J’ai été pendant un an président de groupe à l’Assemblée de Corse et j’y compte quelques amis. Parfois il peut leur arriver d’être moins optimistes et moins volontaires que moi. C’est la raison pour laquelle j’essaie de les convaincre du bien-fondé de la démarche tout en respectant les choix des uns et des autres. J’essaie de me dire qu’après tout, ce que nous avons vécu, au cours des dernières années, en bien comme en mal, les Corses attendent-ils de nous que nous nous mettions d’accord sur un désaccord, ou attendent-ils que nous soyons capables de dégager un compromis politique visant à clôturer un chapitre qui a été assez long, c’est-à-dire depuis que Gilles Simeoni a gagné les élections et même avant, sur le statut de la Corse, sur sa position au sein de la République, sur ce qu’elle peut faire ou ne pas faire ? Est-ce que nous avons cette maturité-là aujourd’hui ? Pour moi, la réponse est oui. 

- Vous êtes donc optimiste ?
- Je suis un optimiste, et je l’ai démontré de par, en plus des responsabilités qui sont les miennes. J’ai été maire d’Ajaccio, j’ai présidé aux destinées de la Communauté d’agglomération du Pays ajaccien, j’ai présidé un groupe d’opposition, près d’un tiers des Corses a voté pour moi en 2021, je suis président d’un groupe parlementaire à l’Assemblée nationale au sein de la majorité présidentielle. Je me dis qu’il faut mettre tout mon poids pour aller chercher un consensus plutôt que pour l’éviter. C’est le sens de ma démarche. J’aurais pu mettre en avant les différences que j’ai avec Simeoni ou Angelini, mais j’ai décidé de prendre le débat autrement parce que je considère que la politique crève des divergences et de l’absence de nuances dans le débat.  

- Donc, quand Gérald Darmanin viendra en Corse, il aura des propositions sur lesquelles le gouvernement pourra s’appuyer pour avancer…
- Je peux attester de la volonté du gouvernement d’avancer sur cette question. Après, la balle est dans le camp des élus de la Corse, dont je fais partie. J’apporte ma contribution qui est bienveillante et qui ne veut pas aboutir à un blocage. Si je suis seul dans cette démarche, je conclurais qu’il n’y a pas d’accord possible. Je ne suis pas non plus un tourne-disque qui tourne avec la même chanson tout le temps. Si demain, des limites sont dépassées… C’est pour cela que la délibération du 5 juillet ne me convient pas. Si c’était ça ou rien, eh bien, il n’y aurait rien ! C’est une délibération qui a été écrite et votée par les seuls nationalistes. Est-ce que la Corse, ce n’est que les nationalistes ? Certains d’entre eux le voudraient bien et certains d’ailleurs, le croient. Ils sont dans l’erreur. À ce moment-là, je ne serai plus du côté des gens qui veulent le consensus parce que ça voudrait dire que personne ne le veut à part moi. Je propose des choses, je discute avec les interlocuteurs que sont les élus de la Corse, toute tendance politique confondue, avec une prédominance du Président de l’exécutif qui est légitime. Je discute avec les membres du gouvernement, avec les parlementaires de la majorité comme de l’opposition, avec les sénateurs. J’ai rencontré le Président Gérard Larcher avant les vacances de Noël, j’ai passé un long moment avec lui au Sénat. J’apporte ma part. Cette part, très clairement, ne suffit pas. Je demande à ce que chacun apporte sa part et se pose la bonne question : est-ce qu’on a le droit de se planter ? Moi je pense qu’on n’a pas le droit d’échouer. Je pense également que l’on a une image à donner à nos concitoyens qui sont un peu désespérés de la chose publique, en Corse comme ailleurs. Je demeure convaincu que, depuis 2015, des rendez-vous ont été manqués sur des tas de sujets : les déchets, l’aménagement du territoire, les transports, l’énergie, la mise en place de la Collectivité unique, les projets de cette Collectivité unique dans le champ des compétences qui sont les siennes aujourd’hui… Mais dans le cadre du processus lancé il y a près de deux ans, je fais partie de ceux qui veulent que nous soyons en mesure de réussir et que nous réussissions. 

- En mars, la Commission des finances de l’Assemblée nationale se rendra en Corse à la demande du Député Castellani. Quel est votre sentiment ?
- Je les recevrai volontiers s’ils viennent à Ajaccio et j’échangerai avec eux. Les députés, qui vont venir, auront à voter, premièrement, la modification de la Constitution, deuxièmement, une loi organique qui complétera cette modification de la Constitution et qui pour le coup pourra avoir trait à la problématique fiscale pour la Corse. Ça veut dire que si l’on veut être en capacité, avant l’été, d’avoir un vote de l’Assemblée nationale et du Sénat pour faire entrer la Corse dans la Constitution, avec une rédaction identique des deux chambres, et donc s’orienter vers une réunion du Congrès après les vacances d’été, il va falloir qu’on accélère. Je sais que le Président de l’Exécutif partage cette volonté, que des réunions ont lieu de manière régulière, notamment à travers la Conférence des présidents de l’Assemblée de Corse d’où émanera une proposition de l’Exécutif fait à l’Assemblée qui sera débattue et votée. C’est une meilleure méthode que celle qui avait prévalu, notamment celle du 5 juillet. Le 5 juillet a son importance, mais ce qui compte c’est que le 28 septembre, un Président de la République française en exercice est venu, a parlé devant les élus de la Corse, a dit des choses et les a rendues possibles. Que le chef de l’État vienne dire : « Je suis capable d’aller jusque-là », c’est important ! C’est fondamental et révolutionnaire ! Nous ne sommes plus dans des déclarations de principe. Nous sommes face à un Président de la République qui dit : « voilà, moi je suis capable de convoquer le Congrès pour l’autonomie de la Corse ». De la Corse ! Pas une copie d’un autre statut ! La condition est que l’on soit capable de trouver ce consensus. 

- Pensez-vous que ce statut d’autonomie permettra de répondre aux nombreuses attentes des Corses sur des sujets tels que la précarité, le logement, l’emploi, ou l’accès aux soins ?
- Un autonomiste vous répondra que oui. Je n’ai pas décidé de m’engager sous cette bannière bien que j’aie toujours déclaré que le mot « autonomie » ne devait pas faire peur, la preuve en est, je suis engagé dans cette voie. Si on prend la pleine mesure des responsabilités que nous aurons, les réponses peuvent être améliorées, mais le statut ne suffira pas. J’ai la faiblesse de penser qu’à cadre constant, on pourrait faire mieux sur le logement ou la précarité, faire des choses qui ne sont pas faites aujourd’hui. Ensuite, il ne faut pas vendre l’autonomie, c’est ce que je reproche parfois à certains de ses partisans, comme la solution magique à tout. Ce n’est pas une baguette magique ! Il ne faut pas faire croire aux gens que le lendemain où ça sera voté, si c’est voté, il ne pleuvra plus, on n’aura plus de besoins, on n’aura plus de pauvres, plus de gens malades, qu’il n’y aura plus de spéculation immobilière, qu’il n’y aura plus de voyous en Corse, qu’il n’y aura plus de trafic de drogue, qu’il n’y aura plus de difficultés en matière d’infrastructures… Non ! Et c’est ce que certains reprochent à la Collectivité, de ne pas suffisamment avancer sur certains sujets alors qu’à cadre constant, on pourrait le faire. On peut très bien avoir une vision contraire au modèle de développement que portent Gilles Simeoni et ses amis, avoir une position contraire à la philosophie qui préside à la manière dont la Corse est dirigée depuis 2015, on peut aussi parfois se mettre d’accord. Il y a pas mal de délibérations à l’Assemblée de Corse qui sont votées à l’unanimité. Après, quand j’entends Paul-Félix Benedetti dire « Je ne veux pas d’accord avec la droite rétrograde » dans laquelle je pense il me classe, ça tombe bien, je n’ai pas forcément envie d’être d’accord avec lui quand je vois le modèle qu’il propose pour la Corse. Et je ne lui en veux pas, au moins ça a le mérite d’être clair. En revanche, si demain, il est d’accord avec moi, je ne vais pas m’en aller. 

- Gabriel Attal a nommé un nouveau gouvernement. En tant que président du groupe Horizons à l’Assemblée nationale, espériez-vous obtenir plus de portefeuilles ministériels pour votre parti, et qu’attendez-vous de la seconde vague de nominations ?
- Vous aviez sous le précédent gouvernement 16 ministres de plein exercice. Nous avions 1 ministre de plein exercice. Il y a 11 ministres de plein exercice aujourd’hui, nous avons 1 ministre de plein exercice. Nous n’avons rien gagné, mais nous n’avons rien perdu. Puisque nous avions également une ministre déléguée et une secrétaire d’État à la Santé et à la Protection de l’Enfance, j’espère que, eu égard à ce que nous avons pu démontrer depuis juin 2022 au sein de cette majorité, nous ne soyons pas moins bien représentés, une fois que les autres nominations seront connues. Dans les moments difficiles, notamment à l’occasion du vote de la Loi immigration, fin décembre, le groupe, que je préside, a prouvé qu’il était solide, solidaire et qu’il n’a pas tremblé à un moment où d’autres ont pu avoir une action un peu plus fébrile. Depuis le début de ce quinquennat, nous avons été présents en commission, en hémicycle, dans des moments difficiles où il fallait qu’on soit vraiment engagés, qu’on vote dans la bonne direction, avec la majorité du gouvernement, il n‘y a pas eu des milliers de couacs. Le groupe Horizons se comporte bien. Nous sommes dans un état d’esprit plutôt constructif dans une Assemblée parfois en ébullition. Nous ne rajoutons jamais de la polémique à la polémique. Il y a une manière de faire les choses au sein de la majorité, et plus largement dans le cadre des responsabilités qui sont les nôtres, qui à mon avis, justifient le fait que nous ayons une représentation au sein du gouvernement qui soit au moins égale à celle du gouvernement de Mme Borne. Ceci dit, composer un gouvernement, ce n’est pas facile. Il y a des enjeux de parité homme-femme, de parité politique, en fonction des appartenances des uns et des autres, en fonction des territoires d’où viennent les élus.

 

(Photos Michel Luccioni)
(Photos Michel Luccioni)
- Le Président de la République propose un « réarmement démographique ». La Corse est le territoire où les naissances ont le plus diminué l’année passée. Comment inverser la tendance pour créer des conditions favorables à plus de naissances ? 
- D’abord, je crois que le Président, avant de proposer des mesures, a voulu faire en sorte que l’on se réapproprie ce débat. On a un débat sur le vieillissement de la population qui ne prend pas en compte l’autre tenant, c’est-à-dire un taux de natalité suffisant pour avoir un solde démographique qui soit au moins égal pour renouveler nos générations. S’il n’y a pas une reprise de la natalité, en Corse et ailleurs, un certain nombre de tâches devront être obligatoirement données à des gens venant de l’extérieur. On ne fait plus d’enfants, nous vivons plus longtemps… c’est exactement le même débat que nous avons eu sur la réforme des retraites. Ça ne fait pas plaisir aux gens. Ils voudraient travailler jusqu’à 50 ans et ne voudraient pas d’immigration. Il se trouve que dans notre système, certaines tâches doivent être réservées à des gens qui sont en mesure de les faire. Je ne parle pas d’être ouvrier, je parle d’être enseignant, infirmier, médecin, policier, militaire… Si demain vous voulez que ces services publics fonctionnent, il faut avoir un âge où on est en capacité physique, pleine de vigueur, l’envie de faire un certain nombre de choses. Si on continue sur les mêmes courbes démographiques, eh bien, c’est manquant ! Il va bien falloir pourvoir ces postes. On le voit déjà dans les professions médicales. Dans les zones tendues, on a recours à des médecins étrangers, on le voit chez nous. Ils ne sont parfois même pas européens, c’est une réalité. Un peuple, qui ne renouvelle pas ses générations, est un peuple qui ne présente pas les signes d’une santé éclatante. 

- N’est-ce pas lié à la situation économique ? Aujourd’hui, c’est difficile pour un jeune couple de fonder une famille, quand il faut lutter pour trouver un travail,  le garder, construire un projet immobilier…
- Beaucoup de progrès ont été faits au cours des dernières décennies. Ils sont globalement très positifs pour notre civilisation. Parfois, il y a des contrecoups. Chaque médaille a son revers. Nous sommes dans une société où la contrainte est de moins en moins acceptée. Nonobstant le fait que la plus belle chose qui puisse arriver est de devenir parent, ça comporte aussi un lot de contraintes personnelles et financières. Parallèlement, et c’est très bien, des progrès ont permis aux femmes d’être plus libres, de travailler, d’avoir du temps pour elles. Tout cela a pu nous faire glisser progressivement vers une dynamique démographique moindre. La question porte aussi sur des problématiques sanitaires. Un certain nombre de spécialistes s’alarment de voir de plus en plus d’hommes jeunes avec des problèmes de fertilité. On croit souvent quand on est mal informé que les problèmes d’infertilité frappent en priorité les femmes. Les études actuelles ont tendance à démontrer que c’est le contraire et qu’ils frappent aussi des hommes jeunes en pleine force de l’âge. Et ça, ça doit aussi nous interpeller. Une politique nataliste se fait aussi par des mesures d’ordre fiscal, qui parfois, au cours des dernières décennies, n’ont pas forcément été au rendez-vous de l’incitation à une politique familiale attractive, car effectivement, avoir un enfant, c’est aussi un coût budgétaire pour un couple. 

- Le Président a également évoqué la généralisation d’un uniforme à l’école. En tant qu’ancien maire d’Ajaccio, souhaiterez-vous voir votre ville candidate à l’expérimentation comme Jean-Charles Orsucci à Bunifaziu ?
- Ce sont les chefs d’établissement qui décident. A titre personnel, je n’ai pas d’idée reçue sur la question. Je sais les méfaits que peut avoir la tenue unique, mais je sais aussi les méfaits que le système actuel peut engendrer : course à l’échalote avec des dépenses phénoménales exhibées dans nos collèges, lycées et même écoles, primaires, voire même parfois maternelles, c’est une réalité, il faut bien l’admettre. Provoquons le débat ! Nous assistons, de fait, à une hypersexualisation de certaines jeunes filles. Je n’habite pas loin du Lycée Laetitia, et je me dis quand même que parfois, il y a des tenues qui ne devraient pas être portées. On va dire que je suis un « vieux con », mais ce n’est pas grave ! Je n’ai pas de fille. Mais franchement, j’aurais été très soucieux quand je vois certaines jeunes filles habillées comme elles le sont quand elles se rendent au lycée ou au collège. Il y a une forme de sentiment de décadence. Je pense que la tenue unique doit être expérimentée pour différentes raisons, peut-être pour avoir moins de disparité sociale et moins mettre en difficulté certaines personnes qui n’ont pas les moyens et qui se sentent exclues, diminuées ou jugées. Enfin, comme je le disais, il y a aussi une tenue acceptable, décente qui parfois n’est pas totalement respectée, pas que par les jeunes filles d’ailleurs ! Il y a aussi des garçons qui s’habillent très mal pour aller au collège et au lycée, en débardeur, tongs et en short de plage ! L’expérimentation de la tenue unique nous permettra d’avoir un retour d’expérience. C’est le but recherché pour pouvoir faire un bilan qui déterminera une politique et ma position sur la question. 

- La grogne européenne des agriculteurs a explosé ces derniers jours. Craignez-vous un mouvement d’ampleur ?
- La désespérance est là. L’Union européenne doit prendre conscience du fait qu’un certain nombre de choses aujourd’hui ne sont plus acceptées par les agriculteurs et par le monde rural en général. Au-delà de l’agriculture, il y a aussi une question de ruralité. D’ailleurs les élus du rural, et j’en suis un car je suis député d’une circonscription qui est majoritairement rurale dans sa superficie, peuvent venir en témoigner. Ensuite, il y a une question nationale qui se pose au niveau du traitement des normes européennes qui parfois rendent les choses plus compliquées pour les agriculteurs, mais que l’on rend encore plus compliquée par leur adaptation au système français. Et là, c’est un travail de type administratif qui souvent rend les choses kafkaïennes. Si à cela, vous ajoutez le fait qu’aujourd’hui, être agriculteur ne permet pas de vivre décemment alors que l’on travaille beaucoup, tous les ingrédients d’une dépression majeure sont réunis, et donc, d’un recours à la violence en dernier ressort pour se faire entendre. Donc oui, j’ai des craintes, mais en même temps je crois qu’il faut véritablement avoir une politique visant à simplifier les choses. Il faut essayer d’être aux côtés des agriculteurs pour leur permettre de pouvoir gagner décemment leur vie. J’ai l’intention à l’Assemblée nationale d’aller dans ce sens-là et je renouvelle ma disponibilité aux agriculteurs corses pour leur dire que je serai à leurs côtés lorsqu’il s’agira de porter un certain nombre de revendications quand je considérerai qu’elles vont dans le bon sens. Il en va également d’une certaine idée de ce que nous voulons pour notre alimentation et notre art de vivre. 

- Une question plus personnelle : comment appréhendez-vous votre futur politique ? S’inscrit-il dans un destin national ou comptez-vous repartir en campagne pour les prochaines territoriales ou municipales ?
- Ajaccio, c’est la passion de ma vie. J’ai beaucoup donné, j’ai beaucoup reçu. J’ai fait tout ce que je pouvais pendant les 8 années au cours desquelles j’ai été maire, et même avant quand j’étais conseiller municipal d’opposition ou conseiller général de la Corse-du-Sud, pour faire en sorte que cette ville aille de l’avant, progresse, se renforce, rayonne. Je pense qu’à l’avenir, mon rôle ne sera pas d’être le maire d’Ajaccio ou le président de la communauté d’agglomération du Pays ajaccien. Il y a des étapes dans la vie. J’ai obtenu ces responsabilités jeunes, j’ai tout donné, mais le moment est venu pour moi depuis 18 mois ici de servir la Corse autrement, de la servir en tant qu’élu national. Pendant des années la Corse a manqué de voix fortes dans le débat politique national. Depuis Emile Zuccarelli ou José Rossi, nous n’avons plus eu de ministre, ni de président de groupe à l’Assemblée nationale, ni de président de partis nationaux. Depuis 24 ans, nous n’avons plus eu d’élus corses dans un gouvernement de la France. Un quart de siècle au cours duquel la pensée séparatiste et autonomiste s’est développée ! J’y vois quand même une concordance. Je crois que ça nous a porté tort et que ça a empêché la Corse d’avancer sur beaucoup de sujets. Lorsque je me suis présenté il y a deux ans aux élections législatives, j’ai défendu cette approche alors que je n’étais pas certain d’être président de groupe Horizons à l’Assemblée nationale, mais j’en caressais l’espoir. Depuis 18 mois, le fait d’être président de groupe a permis sur des amendements pour les lois de finances, sur des sujets compliqués, sur la commission d’enquête sur l’assassinat en prison d’Yvan Colonna, sur le débat sur le statut de la Corse, d’être une personnalité politique impliquée à un niveau important de la prise de décisions de la majorité présidentielle et à l’Assemblée nationale, je pense que ça sert la Corse. Et je me sens très bien de le faire. J’aime ce que je fais comme j’ai aimé être maire, et surtout je ne suis pas parti sans préparer les choses. Stéphane Sbraggia est un excellent maire, il a à ses côtés une belle équipe, je pense à son premier adjoint Alexandre Farina. Je fais partie de cette équipe, je suis resté conseiller municipal et conseiller communautaire. J’aurais pu rester conseiller à l’Assemblée de Corse mais j’ai fait le choix d’Ajaccio. Si dans deux ans, on estime qu’on a encore besoin de moi, je serais ravi de refaire campagne en tant que candidat au conseil municipal sur une liste conduite par celui qui est aujourd’hui le leader de la majorité municipale, à savoir le maire. Pour le reste, nous verrons bien. Destin national ou pas… si je souhaite me représenter aux élections législatives lors du renouvellement, je le ferais savoir en temps et en heure. Pour le reste des responsabilités, ça ne dépend pas de moi.

- Pourriez-vous être nommé au gouvernement ces prochains jours ?
 - Je n’en ai aucune idée. Je survivrai en cas de non-nomination, comme j’espère survivre en cas de nomination ! Tout ça est très compliqué, les choses se décident souvent au dernier instant. Je ne suis au courant de rien. Je n’irai pas pour aller, je n’irai pas pour être. J’irai parce que j’aurai le sentiment d’être utile ou que je peux, aujourd’hui, après 18 mois, quitter ce poste de président de groupe. Ce sont des conditions difficiles à atteindre. J’ai le sens des responsabilités. Ce que je fais ici compte beaucoup pour moi et compte également dans le cadre d’une construction politique qui me dépasse.