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La Corse fait face à une grande pénurie de médecins spécialisés


Livia Santana le Lundi 18 Avril 2022 à 18:29

Trois, quatre, voire six mois pour obtenir un rendez-vous chez un spécialiste : la médecine en Corse souffre du manque de praticiens. Et la situation n'est pas prêt de s'améliorer : plus de la moitié de ces médecins a plus de 60 ans.



Il faut parfois attendre plus de 6 mois pour avoir un rendez-vous chez un spécialiste
Il faut parfois attendre plus de 6 mois pour avoir un rendez-vous chez un spécialiste
Plus de quatre mois d’attente pour un rendez-vous chez le dermatologue, six mois pour une consultation chez un ORL, « le docteur ne prend plus de patients » … autant de situations auxquelles vous avez probablement déjà été confronté au moins une fois si vous habitez en Corse.
 
Et pour cause, certains spécialistes deviennent rares sur l’île et le peu qui reste est complet sur plusieurs mois. Dans le sud de la Corse, le président de l’ordre des médecins de Corse-du-Sud, Jean Canarelli, dépeint une situation alarmante dans sa région pour la plupart des spécialités : « En rhumatologie il manque de professionnels, en dermatologie il y a un risque très important puisqu’il va bientôt y avoir des départs à la retraite, en neurologie, le manque est récurrent depuis des années, en pneumologie et en endocrinologie également. »


Bruno Manzi président de l’ordre des médecins de Haute-Corse assure que dans le département où il exerce, le manque se fait ressentir en rhumatologie, en neurologie, en dermatologie et chez les ORL. Il tient tout de même à préciser que si « les cardiologues sont toujours nombreux, la majorité a plus de 60 ans et seront bientôt à la retraite »
 

En appelant les praticiens, ses dires se vérifient facilement. Pour consulter un dermatologue, il faut attendre juillet ou août en appelant début avril. Afin de filtrer la demande, certains spécialistes n’acceptent les rendez-vous que s’ils sont pris via un médecin traitant. « Cela permet de raccourcir le délai d’attente », lance une secrétaire bastiaise. 
Si vous souffrez d’une sinusite, de vertiges, il faudra prendre votre mal en patience puisque les spécialistes proposent en ce début avril, des rendez-vous pour fin septembre ou octobre et ne prennent plus de nouveaux patients. 
 
Pourquoi un tel manque ? 
 
Les raisons sont multiples. Tout d’abord, la Corse souffre de la loi des petits nombres. « Lorsqu’un professionnel part à la retraite, les chiffres varient du tout au tout. Il suffit qu’un ou deux spécialistes arrivent pour que la tendance s’inverse complètement », détaille Bruno Manzi.
Aussi, ces dernières années les professionnels de santé sont confrontés au « creux générationnel », soit le départ à la retraite des boomers et la jeune génération peu nombreuse à cause du numerus clausus. 


« Pendant des années, la France a mis en place le numerus clausus ce qui a limité le nombre de jeunes en médecine," rappelle le docteur Canarelli. "Grâce à la réforme de la Paces, le nombre de praticiens augmentera mais pour cela il faudra attendre 10 à 15 ans », tempère le praticien. 
Mais il y aussi ces jeunes médecins souhaitent travailler en groupe, ils sont donc attirés vers des spécialités et des lieux où les praticiens sont plus nombreux. « Les nouveaux médecins veulent partir en vacances, avoir plus de temps. En s'installant avec leurs confrères, ils peuvent travailler bien et en groupe », explique le docteur Manzi. 
 
Quelles solutions ?
 
Pour essayer de faire face à cette pénurie, plusieurs pistes sont préconisées par les ordres des médecins sur l’île.
Tout d’abord, ils estiment que le nombre de place en spécialité lors de l’internat devrait être déterminé en prenant en compte les spécificités régionales et les retours du terrain. Toujours au niveau de la formation, l’Ordre estime que les services des hôpitaux d’Ajaccio et de Bastia devraient pouvoir accueillir des stages validants ce qui permettrait à ces deux structures de pérenniser les postes de ces jeunes praticiens.
Afin de combler le manque de praticiens sur l’île, le recours à des multi-sites soit des spécialistes venus du continent pour effectuer des consultations, serait une piste à développer. « Cela se fait déjà sur Folelli, une dermatologue des Bouches-du-Rhône vient une fois par mois ».
 
L’Agence régionale de Santé, préconise quant à elle le recours, quand cela est possible, à la télémédecine. « Si un patient s’inquiète d’un problème de peau, il peut consulter son médecin généraliste qui enverra ensuite une photo au dermatologue », détaille l’ARS. 
 

(Image Pixabay)
(Image Pixabay)