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Justice : une juge bastiaise mise en examen et visée par une enquête administrative


CNI avec AFP le Vendredi 3 Février 2023 à 20:44

Une juge bastiaise a été mise en examen pour "prise illégale d'intérêt" par un juge d'instruction de Marseille et est visée par une enquête administrative de l'Inspection générale de la justice (IGJ), a appris ce vendredi 3 février l'AFP de sources judiciaires et proches du dossier.



Le palais de Justice de Bastia. Photo illustration
Le palais de Justice de Bastia. Photo illustration
"Je vous confirme la mise en examen pour prise illégale d'intérêt de cette juge le 19 octobre 2022", a indiqué à l'AFP la procureure de la République de Marseille, Dominique Laurens qui a précisé que la magistrate "a été laissée en liberté à l'issue de sa mise en examen."

Il est reproché à cette magistrate, qui est par ailleurs déléguée régionale pour la Corse de l'union syndicale des magistrats et exerce toujours, d'être "juge et partie", a indiqué à l'AFP une source proche du dossier.
Elle est soupçonnée de ne pas s'être "déportée" pour des décisions de justice pouvant être lié à "ses intérêts économiques et personnels", notamment à un "domaine viticole" familial, a précisé à l'AFP une source judiciaire. Contactés par l'AFP, l'avocat de la magistrate, Me Dominique Mattei "ne souhaite pas s'exprimer" sur cette affaire. La magistrate, n'a, elle pas répondu aux sollicitations. 

Dans cette affaire, des perquisitions ont été menées au domicile d'un président d'union viticole et élu corse déjà condamné par la justice, a précisé à l'AFP une source proche du dossier.

Une enquête préliminaire avait été ouverte par le parquet de Bastia avant d'être dépaysée à Marseille, transformée en information judiciaire et confiée à un juge d'instruction, selon des sources judiciaires. L'enquête administrative de l'IGJ doit débuter prochainement, selon ces sources. Contacté par l'AFP, la chancellerie n'a pas souhaité communiquer sur cette affaire.

Justice "apaisée" 

Egalement contactée par l'AFP, la Première présidente de la cour d'appel de Bastia, Hélène Davo, responsable hiérarchique de l'ensemble des juges du siège en Corse, a "rappelé être attachée aux principes qui s'appliquent aux juges comme aux citoyens: le fait qu'on ne commente pas les décisions de justice et le principe de présomption d'innocence".
"Je tiens particulièrement à ce que la justice sur l'île fonctionne de façon apaisée, avec indépendance et impartialité", a ajouté Mme Davo

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Selon le site officiel du ministère de la Justice, l'IGJ est saisie "par le seul ministre de la Justice de missions d'enquêtes administratives, en amont d'éventuelles poursuites disciplinaires", portant notamment "sur la manière de servir d’un magistrat". L’inspection doit "analyser les comportements et qualifier les faits qui lui paraissent constituer des manquements professionnels", mais le ministre a la "prérogative exclusive de saisir l'instance disciplinaire", en l'occurrence le Conseil supérieur de la magistrature, en cas de manquements avérés.

Plusieurs enquêtes en Corse

Plusieurs enquêtes ont visé des magistrats en Corse ces dernières années. En décembre, les propriétés d'une magistrate de la cour d'appel d'Agen, précédemment en poste à Ajaccio, ont ainsi été perquisitionnées dans le cadre d'une enquête ouverte notamment pour "trafic d'influence" portant sur les liens de cette ex-juge d'instruction avec un membre présumé du banditisme corse. "Le 20 janvier 2021, le parquet de Nice a été désigné compétent par le parquet général d'Aix-en-Provence (..) pour connaître des suites d'une enquête susceptible de mettre en cause Hélène Gerhards, des chefs de recours en bande organisée aux services de personnes exécutant un travail dissimulé, blanchiment de fraude fiscale, trafic d'influence passif et actif et association de malfaiteurs", a précisé en janvier à l'AFP le parquet général d'Aix-en-Provence sur ce dossier.
En juillet 2020, la juge Rose-May Spazzola, soupçonnée d'avoir eu un millier d'échanges avec un élu corse placé sous le statut de témoin assisté dans une enquête sur des emplois présumés fictifs, s'était vu infliger une "sanction disciplinaire de rétrogradation, assortie d'une mesure de déplacement d'office" par le Conseil supérieur de la magistrature.
Le nom de cet élu, l'ancien président du conseil général de Haute-Corse François Orlandi, avait été révélé en avril 2019 dans un article du Canard enchaîné. Il avait eu "entre le 1er mars 2018 et le 12 février 2019, 1.230 échanges (appels, SMS) --presque quatre par jour-- avec Rose-May Spazzola".