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Jean-Martin Mondoloni : « La question de l’autonomie préoccupe assez peu les Corses »


Paule Cournet le Jeudi 18 Janvier 2024 à 12:33

Chef de file de l’opposition de droite à l’Assemblée de Corse, Jean-Martin Mondoloni a accepté de répondre aux questions de CNI pour évoquer les enjeux d’une année 2024 qui devrait être politiquement très dense. Dans une conversation à bâtons rompus, ce proviseur s’alarme de la « crétinisation » des esprits et des risques liés à la désinformation.



Jean-Martin Mondoloni. Photo Paule Santoni
Jean-Martin Mondoloni. Photo Paule Santoni
- Vous prenez part aux discussions ouvertes avec le gouvernement sur le processus d’autonomie de l’île. Quelles sont vos attentes sur cette question pour 2024 ?
- J’attends que la Conférence des Présidents finisse ses travaux. Pour mémoire, ils portent sur le foncier, la langue, la fiscalité, le pouvoir normatif, le mode de scrutin et l’éducation qui est un atelier à part. Nous avons trouvé des points d’équilibre, mais je ne me sens pas tenu de parvenir à un accord obligatoire. Notre devoir est de participer, mais chacun doit sortir de cette séquence en gardant intacts ses valeurs et ses principes. Ma formation politique n’a jamais demandé l’autonomie.

- Mais la co-présidente de votre groupe et certains élus ont changé et y sont désormais favorables ?
- Aujourd’hui, je suis favorable à la prise en compte de nos spécificités, à la langue, à la reconnaissance des handicaps qui peuvent freiner la Corse, l’insularité, la montagne. Il y a cependant des sujets où prévaut la plus grande prudence comme le pouvoir législatif, la fiscalité ou l’hypercentralisation avec une seule personne qui déciderait de tout à Ajaccio. Je pense qu’il faut discuter de tout cela. Je pense également qu’il est important d’aller plus loin que l’Assemblée de Corse. Il faut associer les parlementaires, car tout va se jouer et se décider au Parlement. C’est le Parlement qui se prononcera sur la révision de la Constitution.

- Le souhait de Gilles Simeoni d’atteindre un consensus avec tous les groupes de l’Assemblée de Corse avant la fin du mois vous semble-t-il réalisable ?
- Ce n’est pas un problème de temporalité. Mais a-t-on obligation de s’entendre sur tout ? Cette question est porteuse de doute. Qu’est-ce que cela signifierait que l’on soit en désaccord en juin et que l’on s’entende sur tout subitement après une injonction, si injonction il y a. Les gens ne comprendraient plus rien. Il reste des divergences d’approche. Je vous rappelle que nous ne sommes ni mandatés par l’opinion, ni demandeurs. Il ne faut pas nous faire procès de ne pas être entraînants sur cette question. Question qui, de plus, préoccupe assez peu les Corses…

- Vous pensez que la question de l’autonomie ne préoccupe pas les Corses ?
- Si vous leur posez la question, ils vont dire qu’ils sont d’accord parce que c’est un produit marketing. Mais ils ne savent pas ce qu’on met dedans. Ils ont la conviction que ça ne changera pas leur vie. Mais il y a une construction politico-médiatique autour de cette question. Ce qui inquiète les gens, c’est l’accès aux soins, à l’emploi, à une formation, d’avoir un logement décent. La Corse n’est pas épargnée par les réalités de la France, de l’Europe et du monde. Sauf à vivre sur une autre planète. Vous avez, dans mon métier, on me demande de signer des aides sociales pour 40 euros.

- Quelle serait votre ligne rouge ?
- Je n’ai pas de ligne rouge. Mais je ne vais pas laisser entraîner la Corse et les générations à venir dans quelque chose qui serait préjudiciable. Sur le pouvoir législatif, il faut être prudent. Je ne parle pas des élus actuels. Mais si dans 10 ou 15 ans, des bétonneurs arrivent au pouvoir ? S’ils décident de rogner 50 mètres de la bande littorale et de construire sur le littoral, les services de l’État n’auront pas le pouvoir de dire non. Ce sera conforme à la Constitution qui aura donné le pouvoir législatif à l’Assemblée de Corse. Il faut se prémunir du risque d’hypercentralisation et du transfert de fiscalité. Je suis en pointe sur la langue, sur le foncier où les choses doivent évoluer, mais prudent sur la fiscalité, le mode de scrutin, le pouvoir.

- Quels sont selon vous les autres grands dossiers ?
- Il faut que la Collectivité de Corse fasse tourner sa boutique, sur le Padduc (Plan d’aménagement et de développement durable de la Corse) – trois ans qu’il est en attente -, sur la desserte maritime et aérienne de la Corse, le traitement des déchets… On ne pourra demander des pouvoirs supplémentaires que si l’on fait la preuve de l’efficacité.

- Gabriel Attal vient d’être nommé plus jeune Premier ministre de la Ve République. Que pensez-vous de son arrivée à Matignon ? Gérald Darmanin reste au ministère de  l’Intérieur. Est-ce une bonne chose ?
- En tant que Proviseur, je regrette déjà Gabriel Attal à l’Éducation nationale. En cinq mois, il a impulsé de vrais changements qui auraient mérité de voir le jour sous son autorité. C’est un fidèle du Président et je pense que c’est important qu’il n’y ait pas de compétition. Concernant la Corse, je ne crois pas que Matignon soit le bon niveau. Comme disait Alain Juppé, à ce poste, il y a une décision à prendre toutes les heures. Le bon niveau est celui initié depuis 2 ans autour de Gérald Darmanin qui a une connaissance fine du dossier et des arbitrages. Si on devait en changer, il faudrait tout recommencer. Je suis heureux que Darmanin soit maintenu, car il est celui qu’il faut pour la Corse ! Quant à Gabriel Attal, qui a de nombreux atouts, dont l’audace et l’innovation, il sera jugé sur sa capacité à répondre aux problèmes rapidement. Cependant, il y a toujours une majorité relative à l’Assemblée nationale et il est toujours à la tête d’un État en faillite ! Les choses n’ont pas changé. Mais pour la France, comme pour la Corse, je lui souhaite de réussir !