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Jean-Christophe Angelini : "Le logement est la première des souffrances des Porto-Vecchiais"


le Lundi 22 Janvier 2024 à 16:03

Pour Corse Net Infos, Jean-Christophe Angelini a passé en revue l'essentiel des projets qui devraient voir le jour à Porto-Vecchio en 2024. Le maire de la cité du Sel en profite "pour renouveler mes vœux de Paci è saluta à l’endroit de tous les Porto-Vecchiais, du peuple corse et au-delà."



Photo Paule Santoni
Photo Paule Santoni
- L’Insee fait état d’un solde négatif de la population porto-vecchiaise, en recul de 0,9 % entre 2014 et 2019. En cause, la crise du logement. Avec un parc de 63 % de résidences secondaires, louer à l'année ou acheter un logement à Porto-Vecchio relève du parcours du combattant. Vous avez lancé le programme "Accasà si !" il y a un peu plus d’un an, avec une prévision de 1 000 logements construits en dix ans. Où en est-on à l'heure du premier bilan ?
- Le logement est la première des souffrances porto-vecchiaises. Pas un jour ne passe sans qu’on ne nous en parle. Le délai moyen pour obtenir un logement social à Porto-Vecchio, c'est plus de cinq ans. Nous avons près de 650 dossiers en attente. On est sur un panorama de logements historiquement mauvais. Mais ce qui nous porte aujourd’hui, c’est qu’on est entré dans le temps des réponses. Via les fonds de l’office foncier, on a acquis 7 millions d’euros de foncier et d’immobilier. On pose une pierre essentielle, car dans l’équation du logement à Porto-Vecchio, le premier problème, c’est le coût du foncier. En termes de logements sociaux, on est à moins de 15 %, autour de 12 ou 13 %. Depuis 2023, on a acquis 74 logements en LLI (loyer locatif intermédiaire). Ils sont en cours de construction à Vignola, en face du bar l’Exocet. C’est un programme de 120 logements. Une partie est vendue en libre pour financer l’opération et la grande majorité (les 74 logements en LLI), sont en cours de construction. Et je devrais signer dans les deux mois un permis pour une quarantaine de logements nouveaux, toujours en LLI. On a ensuite, sur les terrains d’Arutoli, du Prunellu et sur des parcelles privées - dans le cadre de conventionnements avec des opérateurs -, plusieurs centaines d’autres logements qui donnent lieu à des dossiers en cours d’instruction. De telle façon qu’on devrait arriver à avoir cette centaine de logements par an, à 100 % en résidence principale. Et arriver à plus de 1 000, à l’horizon 2033. 

- Ce foncier que vous avez identifié sera-t-il suffisant pour faire baisser la pression immobilière ?
- Au-delà de ce foncier, il y a aussi tous ces terrains privés. On s’est adressé aux promoteurs en leur disant : "pourquoi pas un permis à cet endroit-là, mais vous nous donnez 20 à 25 % de logements publics abordables". Dans un marché qui était dominé par les résidences secondaires, il y a une volonté des bailleurs, des propriétaires, des pétitionnaires, de porter des projets qui vont permettre aux Porto-Vecchiais de se loger. 

- Vous espériez pouvoir voter le Plan local d’urbanisme (PLU) l’an dernier. Ça n’a pas été le cas. Pourquoi ce retard ?
- Deux raisons. La première, c’est qu’on a voulu approfondir le dialogue avec les services de l’État. J’ai pensé que le PLU était un objet essentiellement interne. Je me suis aperçu au fil du temps qu’il était le sujet qui appelle peut-être le plus grand nombre de partenariats. Avec l’État, le monde associatif, la chambre de commerce, la chambre des métiers, la chambre d’agriculture, les Porto-Vecchiais en général… C’est un champ de partenariats extrêmement dense dont on a un peu relativisé l’ampleur. Au final, je ne dirai pas qu'on a perdu du temps. On a ajusté de quelques mois le calendrier pour aboutir à un document qui doit répondre à deux conditions : être accepté par l’immense majorité des Porto-Vecchiais et être très tôt exécutoire. En d’autres termes, ne pas être criblé de recours comme l’avait été le précédent PLU, retoqué en 2011.

- Est-ce que c’est l’absence du PLU pendant toutes ces années qui a permis le boom des résidences secondaires ?
- Oui et non.  Oui, parce que durant la décennie 2010-2020, il s'est construit 85 % de résidences secondaires. Non, parce que c'est la logique du marché que la puissance publique a le devoir de réguler. Et en même temps, c’est la trajectoire de Porto-Vecchio depuis les années 80. On n'a jamais eu de POS (plan d'occupation des sols). On a toujours été au RNU, le règlement national d’urbanisme. La volonté de réaliser un PLU, elle s'est posée sur un temps très court.

- Que va permettre concrètement l’adoption du PLU dans l’accession au logement des Porto-Vecchiais ? 
- Je pense que c'est une clé de déblocage dont on n'estime pas encore l'importance. Avoir un permis aujourd'hui s'apparente à un parcours du combattant. Le PLU va simplifier les démarches et accélérer les délais. En d'autres termes, on aura des familles qui pourront créer leur foyer, on aura des logements sociaux, des zones d'activité économique, des pépinières d'entreprises, des écoquartiers, des infrastructures ( crèches, écoles, stations d'épuration, etc.). 

- Puisque vous parlez de station d'épuration, le fleuve de Porto-Vecchio, le Stabiacciu, reçoit les eaux usées de la commune, car la station d’épuration de Capu di Padula est sous-dimensionnée. Vous avez un projet de redimensionnement de la station qui doit aboutir en 2027. En verra-t-on les effets dès cette année ?
- La réponse est oui. On va mettre aux normes la station et réaliser des travaux qui vont, entre autres effets, diminuer ces difficultés. Le problème sera définitivement résolu lorsque les travaux plus lourds seront réalisés. Nous avons conclu, dans le cadre du schéma directeur d’assainissement, quatre actions. La première est la mise aux normes de Capu di Padula avec des travaux d’urgence. Soit 1 million d'euros financés à 80 % par l'État. Deuxième sujet : les travaux de redimensionnement de Capu di Padula. Aujourd'hui, on est à 24 500 équivalents habitants en dérogation, on va monter à 30 000 ou 35 000. On est en train d'évaluer le coût des travaux pour les années suivantes. On avait un obstacle : le fait que la zone soit classée en PPRI (plan de prévention des risques d’inondation). Avec le concours de l'État et de l'ensemble de nos partenaires, on a obtenu que le classement n'obère pas la capacité à réaliser des travaux. Ce redimensionnement de Capu di Padula est attendu depuis des années, pour ne pas dire des décennies. Troisièmement, on va réaliser avec le SIVOM du Cavu et les communes qui en sont membres (Lecci, San-Gavinu-di-Carbini et Sainte-Lucie de Porto-Vecchio), une station pluricommunale de 30 000 à 35 000 équivalents habitants, dont la moitié de la capacité sera sollicitée par la commune de Porto-Vecchio. En clair, tout le nord de Porto-Vecchio pourra être raccordé à terme à cette station, avec un potentiel de 10 000 à 15 000 habitants. Quatrièmement, on va moderniser ou créer des équipements, à Murateddu et l'Ospedale. L'objectif étant notamment, à travers la station d'épuration de Muratellu, de raccorder le village d’Arca-Pianelli qui, historiquement, n'est pas connecté à l'assainissement collectif. Mon objectif, c'est qu’à l’échéance 2028-2030, la totalité des Porto-Vecchiais y soit raccordée.

- Le grand projet d'extension du port de plaisance de Porto-Vecchio n’aboutira pas avant 2027, mais à quoi peut-on s’attendre pour 2024 ?  
- Dès le mois de février sera faite la présentation aux Porto-Vecchiais des deux résultats des concours d'architecture initiés ces derniers mois. On présentera les lauréats, les plans, les maquettes. On entend également organiser des visites de chantier. On va continuer, côté sud du port, à avancer sur les travaux, et on va dès 2025 reboucler la totalité du site. L'idée étant que dès 2026, le port se présente dans une configuration beaucoup plus forte. Il y aura 800 anneaux, 2 600 mètres carrés de locaux commerciaux, 1 000 places de parking, des hectares d'espaces publics... 

- En parallèle, vous confirmez vouloir relier le port et la haute-ville avec un ascenseur urbain ?
- Oui. On attend une visite d’un bureau d’études en février. Porto-Vecchio est une ville historiquement décousue, avec des sites et des quartiers qui ne dialoguent pas entre eux. Je suis très attaché au projet et j'ai à cœur de le réaliser, même si je reste prudent compte tenu des contraintes techniques et financières. Si l'ascenseur urbain arrive à se faire, il sera alors possible de se garer sur le port et de gagner le cœur de ville en quelques minutes à peine. On doit encore acquérir le foncier pour la gare et le parcours de l'ascenseur. Et étudier la faisabilité technique dans un environnement qui est quand même assez contraint. On est très près de la mer, dans le périmètre immédiat des bastions. 

- Comment améliorer la fréquentation touristique quand on est une station balnéaire surfréquentée comme l’est Porto-Vecchio l’été ?
- Il faut transformer l'offre touristique à Porto-Vecchio. Elle a pendant longtemps été limitée à une saison et un ensemble de sites : nos plages. Il faut aujourd'hui l'ouvrir à l'année entière et à l'ensemble du territoire.  Nous voulons créer une marque « Sud Corse » et développer le tourisme gastronomique, le tourisme culturel, le tourisme patrimonial, le tourisme nature, le tourisme lié aux activités sportives et aux congrès d'affaires.  Si on crée les conditions, je pense que les touristes viendront de plus en plus. Et il manque quoi pour cela ? Des liaisons aériennes. La nouvelle DSP devrait logiquement nous y aider. En 2023, on a perçu le record absolu en taxe de tourisme : 2,4 millions d’euros. On n'a jamais recouvré autant. Ça signifie qu'en dépit des critiques que j'entends sur la faiblesse de la saison, on a quand même une fréquentation très importante. Quand le port sera terminé, on aura en moyenne 9 à 10 millions d’euros de recettes par an, en incluant les parkings. On est déjà en train d'étudier le mécanisme qui nous permettra tous les ans de récupérer au moins un million qu’on versera au budget général pour les crèches, les écoles, les services publics de la ville. Donc on voit bien la dynamique vertueuse qui est en train de s'installer. Porto-Vecchio a investi 24 millions d'euros en 2023 : treize au budget général et onze sur le port. On n’a jamais investi autant.  

- Compte tenu de ces rentrées financières, Porto-Vecchio sera forcément attendu au tournant sur les investissements…
- Je connais des villes aussi riches que nous en proportion qui ont d'autres stratégies. Elles thésaurisent, mais ne sont pas nécessairement dans une logique d'investissement. Même si je n'avais pas eu ces rentrées-là, j'aurais investi de la même manière. Indépendamment des recettes, il faut renforcer le service public et développer des infrastructures.


- L’hôtel de ville de Porto-Vecchio est actuellement mis en accessibilité aux normes PMR. Savez-vous quand les travaux seront terminés ? Et ailleurs, quel est le calendrier de la mise en accessibilité ?  
- La mairie sera aux normes durant l’été, pour un million d’euros de travaux. Le taux d’accès aux équipements PMR de la ville, il est de l’ordre de 16 %. Quand on aura fini notre programme, il montera à plus de 80 %. En 2024, on va continuer avec les écoles et tous les sites emblématiques, sur un pas de temps de trois à cinq ans.

- Quels sont les autres travaux qui devraient aboutir en 2024 ?
- Ça commence très vite avec l’ouverture de la Salle rouge de l’espace culturel Jean-Paul De Rocca Serra, ce 26 janvier.  La deuxième tranche de l'EHPAD sera livrée à l’été, pour 5 millions d’euros. Il y avait besoin d’augmenter le nombre de chambres. À Pifano, le city stade et la maison de quartier doivent voir le jour pendant l’été aussi. Dans ce même quartier, l’école nouvelle et l’aménagement urbain seront livrés en octobre ou novembre. En septembre, une école immersive d’apprentissage du Corse ouvrira à Ceccia. On devrait sortir une nouvelle crèche à Trinité et on veut en créer au moins deux autres dans les quatre ans qui suivent pour doubler la capacité d'accueil de la commune en lits et en berceaux. Aujourd'hui, on a 80 lits et berceaux dans la crèche Célestine, ce qui implique à peu près 140 familles. On va doubler, puisque l'idée c'est de créer au moins une centaine de places supplémentaires. Il y aura aussi la cuisine municipale, qui sera livrée en décembre pour nos enfants demi-pensionnaires. L'idée, c'est d'atteindre un millier de repas par jour. On va attribuer les lots mi-février. Enfin, le syndicat de l'énergie de Corse-du-Sud, auquel la ville contribue financièrement, va rénover plus de 2 000 points lumineux dans Porto-Vecchio. Changement de mâts, poteaux, candélabres... C'est un investissement de près de 3 millions d'euros qui débutera au printemps pour s'achever en décembre.

- Parmi les investissements prévus de longue date, il y a le centre aquatique. Va-t-il enfin devenir réalité ? 
- En 2024, le permis sera déposé. Quand nous sommes arrivés aux responsabilités (en 2020), nous avons voulu prendre deux ans pour expertiser la possibilité de créer un bassin de 50 mètres. On a engagé une assistance à maîtrise d'ouvrage. On en est arrivé à la conclusion que, dans un contexte de remontée des coûts d'inflation et des coûts de l'énergie, le choix d'un bassin de 50 mètres était devenu aléatoire. On s'est orienté sur un bassin de 25 mètres avec deux bassins ludiques à côté. On en est aux études techniques et à l'acquisition des terrains EDF sur lesquels le projet va être implanté au Prunellu. Une fois le permis déposé, on pourra commencer les travaux dans la foulée.