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J’ai testé pour vous le don du sang à Ajaccio, place Campinchi


Carulu-Andria Pazzoni le Jeudi 22 Mai 2025 à 11:34

À l’occasion de la grande collecte « Tout Ajaccio donne en mai », organisée du 21 au 24 mai, je me suis rendu pour la première fois à un don du sang. Entre appréhension et fierté, récit d'une journée solidaire échanges humains et prise de conscience.



Je connaissais la théorie : un don peut sauver trois vies, le sang ne se fabrique pas, et les besoins sont constants. Mais je n’avais encore jamais franchi le pas. Cette fois, à l’occasion de la grande collecte installée place Campinchi à Ajaccio, j’ai décidé de m’y rendre.

Pendant quatre jours, du mercredi 21 au samedi 24 mai, la place Campinchi devient un véritable carrefour de solidarité. Un chapiteau, un bus de collecte, des panneaux d’information, des équipes mobilisées : l’Établissement Français du Sang (EFS) déploie un dispositif adapté pour aller à la rencontre des Ajacciens. « On se déplace toute l’année dans les villes et les villages de l’île pour collecter un maximum de sang », explique Alexandre Talamoni, directeur de la communication de l’EFS Alpes-Méditerranée.

Le choix de s’installer au centre-ville n’est pas anodin : il s’agit de rendre le don accessible à tous, y compris aux passants. Les jeunes sont particulièrement ciblés. « Donner son sang, on peut le faire dès 18 ans, et il faudrait même renforcer la sensibilisation dans les lycées et les centres professionnels », souligne Gérard Sanchez, enseignant à la retraite, très engagé pour la cause.

Si l’appel est lancé à Ajaccio, c’est aussi parce que la Corse reste en déficit structurel de dons. Chaque année, environ 9 000 poches de sang sont collectées sur l’île, alors que les besoins réels s’élèvent à près de 14 000. Un écart de 5 000 poches, que l’EFS doit compenser en les acheminant depuis le continent. Alexandre Talamoni insiste aussi sur un aspect peu connu : la conservation du sang est très courte. « Un concentré de globules rouges se garde 42 jours maximum, mais la plupart des poches sortent bien avant. La demande est continue, et il faut maintenir des stocks diversifiés pour garantir la compatibilité. On ne peut pas donner n’importe quoi à n’importe qui. »

 


Une logistique bien rodée

Photo d'illustration, archives CNI
Photo d'illustration, archives CNI
Sur place, le parcours est clair. Je commence par présenter ma pièce d’identité, puis je remplis un questionnaire de santé. Après un rapide contrôle, je patiente avec d’autres volontaires dans une ambiance calme et bienveillante. Julie, 18 ans, s’apprête à donner pour la première fois. « C’est ma toute première fois. J’étais un peu nerveuse, mais je trouve ça important de participer, d’aider. » Autour de moi, la diversité des profils est frappante. Isabelle, 43 ans, venue du Nord-Pas-de-Calais pour les vacances, a été surprise par le dispositif. « Je suis tombée sur la collecte en me promenant. Même loin de chez moi, ça me semblait naturel de faire un don. Les besoins ne s’arrêtent pas aux frontières régionales. »  Jean-Marc, employé municipal de 50 ans, est un habitué. « Donner son sang, c’est un engagement solidaire. Je fais cela plusieurs fois par an, et j’encourage autour de moi. Ici, à Ajaccio, la solidarité n’est pas un vain mot. »

​Soutien logistique, mais visibilité encore limitée
Vient mon tour. Après un dernier échange avec une infirmière, je m’installe pour le prélèvement. Le geste, en soi, est simple et rapide : une dizaine de minutes. Un moment de pause, de réflexion, presque silencieux, où l’on mesure ce qu’un acte en apparence ordinaire peut représenter pour ceux qui en auront besoin. Alexandre Talamoni me rappelle alors : « Un don de sang peut sauver jusqu’à trois vies. » Une formule qu’on entend souvent, mais qui prend ici un tout autre sens.  

Pour organiser cette opération, l’EFS a pu compter sur le soutien logistique de la mairie d’Ajaccio. La ville a mis à disposition l’électricité, les places de stationnement pour le bus, et a facilité l’installation du chapiteau. Une aide saluée par les équipes. Mais tout n’est pas encore optimal. Alexandre Talamoni regrette la faible couverture médiatique de l’événement : « Parfois, on ne voit qu’un petit encart ou rien du tout dans la presse du matin, alors que l’enjeu est crucial. Il faut qu’on parle davantage de ces collectes. »

Au-delà du cadre logistique, l’EFS insiste sur la notion de responsabilité partagée. Chaque donneur potentiel peut contribuer à maintenir un système de santé efficace et réactif. En Corse, l’insularité ajoute une contrainte : en cas d’urgence, il faut pouvoir compter sur des stocks présents sur l’île. « La diversité des groupes sanguins est essentielle. On a besoin de tous les profils, et régulièrement. Les jeunes doivent prendre le relais », martèle encore Alexandre Talamoni.

 


Un geste accessible à tous

Donner son sang est un acte encadré, mais simple. Il faut avoir entre 18 et 70 ans, être en bonne santé, et ne pas pratiquer d’activité physique dans les 24 heures. Une pièce d’identité est obligatoire, et un questionnaire de santé précède toujours le prélèvement. Une fois le don effectué, une collation est proposée à tous les donneurs.

Je suis reparti avec une sensation de légèreté. Pas seulement physique. Ce que je retiens, c’est l’extrême humanité de ce moment : un temps d’écoute, de partage, et d’action concrète, qui ne coûte rien mais qui peut faire tout.