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Fièvre catarrhale en Corse : les éleveurs : La filière ovine se mobilise


Jeanne Leboulleux-Leonardi le Jeudi 16 Novembre 2023 à 11:53

La progression de la fièvre catarrhale ovine dont nous annoncions le retour en Corse il y a un peu plus d’un mois, est plus que préoccupante. Ce mercredi 15 novembre l’Interprofession Laitière Ovine et Caprine a finalement été reçue par Pierre Bessin, à la DRAAF – Direction Régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt (Aiacciu). Joseph Colombani, Président de la Chambre d’Agriculture et de la FDSEA de Haute-Corse fait le point de la situation.



Photo illustration
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- En quelques mots, où en sommes-nous aujourd’hui sur la progression de cette fièvre mortelle pour les bêtes ?
Aujourd’hui, seize troupeaux sont officiellement touchés. Et il y a une suspicion pour un nombre à peu près équivalent. D’ores et déjà, on dénombre 400 à 500 brebis mortes… sans compter celles qui sont atteintes de morbidité : perte de l’agneau, perte du lait… Et nous supposons que le chiffre est en réalité supérieur. Car il faut tenir compte des éleveurs qui n’auraient pas encore fait la déclaration de la maladie alors que leurs troupeaux sont touchés.

- L’épidémie est localisée ?
- C’est plutôt dans le sud de l’île : autour de Figari, d’Aiacciu... et en remontant plus haut sur la côte ouest.

- Vous avez donc été reçus par les services de l’État… Un point sur cette rencontre ?
La DRAAF nous a effectivement reçus, à la demande de l’Interprofession, l’ILOC, et de son Président Jean-Louis Paoli. J’y étais comme Président à la fois de la Chambre d’Agriculture de Haute-Corse et de la FDSEA. Étaient également représentés la Chambre de Corse-du-Sud, avec Françoise Cianfarani qui est également Présidente de la FDSEA de Corse-du-Sud ; les JA – Jeunes Agriculteurs – de Corse ; l’ODARC, avec son Président Dominique Livrelli ; le Groupement de Défense Sanitaire ; les vétérinaires de Corse. Nous étions venus exposer la situation de la filière, le contexte de la maladie. Mais la réunion a failli virer à l’occupation, car la DRAAF mettait en avant le fait que cette maladie n’est pas réglementée et que, donc, l’État n’avait pas à intervenir.

- Pour vous, l’intervention de l’État se justifie. Quels sont vos arguments ?
- Nous avons fait remarquer aux services de la DRAAF que le sérotype 8 [NdlR : le variant responsable des dégâts actuels] n’existe pas en Corse et que le seul endroit où on le trouve en Europe, c’est la France continentale. Il est donc avéré que ce sérotype vient du continent. Il y a donc eu double faute de l’État. D’abord parce que c’est la responsabilité de la région infectée d’éviter la propagation du virus. Et là, manifestement, ça n’a pas été fait. Ensuite, parce que la Corse est une île. Comme l’État est responsable du domaine sanitaire et du contrôle des importations dans les ports, il aurait fallu que ses services, dans les ports, vérifient la provenance des animaux et le fait qu’ils avaient bien leur certificat de vaccination. Cela n’a pas été fait non plus. C’est pour cela que nous leur avons demandé de déroger à l’aspect non réglementé de cette maladie.

- Qu’attendez-vous de l’État ?
Nous avons demandé trois choses. Tout d’abord la prise en compte à 100 %, par l’État, des vaccins. Cela correspond à un coût de 3 € par brebis – c’est un prix encadré. Ensuite, la prise en charge, toujours par l’État, de l’indemnisation de la mortalité et dans une certaine mesure de la morbidité. Enfin, un engagement de l’État sur un Plan sanitaire de la filière que les acteurs corses vont élaborer avant la fin de l’année. Ce plan sera assorti d’une proposition de financement formulée auprès de l’État. Parce que la fièvre catarrhale, c’est le “coup de grâce” qui est porté à une filière en retard structurel.

Joseph Colombani
Joseph Colombani
- Pouvez-vous préciser ce retard structurel ?
Nous manquons d’abattoirs pour petits ruminants et d’usines de fabrication d’aliments. Nous n’avons pas non plus de signe officiel de qualité pour le fromage. S’ajoute à cela le désordre foncier, les problèmes sanitaires, etc. Ce manque de structuration fait que nous n’arrivons pas à nous relever d’événements conjoncturels qui nous ont frappés ces dernières années. Les sécheresses, les surcoûts liés à l’inflation des carburants et des céréales – notamment avec la guerre en Ukraine. Également le Covid durant lequel les ventes de fromage ont fortement baissé. Tout le monde en France a connu ça. Mais nous, nous ne nous en relevons pas car, contrairement aux filières continentales, nous avons ce retard de structuration.

- Qu’est-ce que vous avez obtenu à la suite de la réunion du 15 novembre ?
Nous avons obtenu la possibilité de faire une demande chiffrée : la DRAAF nous a mis une salle à disposition l’après-midi, et, avec les services des deux Chambres d’Agriculture, nous avons pu la quantifier.

- Concernant les trois demandes que vous avez formulées, quand pensez-vous recevoir une réponse ? - Nous avons demandé à la recevoir lundi 20 novembre au plus tard.

- Et si lundi, vous n’aviez pas de réponse ?
- Une absence de réponse provoquerait forcément une mobilisation. Car aujourd’hui, le contexte de la filière ovine et caprine, et plus généralement des filières d’élevage en Corse, fait qu’on n’en est plus à chercher à sauver l’agriculture… ni même les exploitations. Cette fois, ceux qui sont menacés, ce sont les exploitants eux-mêmes, avec leurs familles…