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En visite en Corse, la Commission des affaires sociales a pu mesurer les difficultés d'accès aux soins sur l'île


le Vendredi 24 Mai 2024 à 19:04

Une délégation de la Commission des affaires sociales de l'Assemblée Nationale était en déplacement à Ajaccio en cette fin de semaine. Une visite de deux jours à l’agenda chargé, au cours de laquelle Charlotte Parmentier-Lecocq, la présidente de cette commission et députée du Nord (Renaissance), Paul Christophe, le vice-président et député du Nord (Horizons), ainsi que le député des Français de l’étranger (Renaissance) Marc Ferracci ont rejoint Paul-André Colombani, le député de la 2nde circonscription de Corse-du-Sud afin de venir se constater les spécificités de l’île au travers des échanges avec différents acteurs. Dans cette optique, la délégation a ainsi pu échanger avec l’Agence Régionale de Santé Corse et les élus de l’Assemblée de Corse, mais se rendre à l’hôpital de la Miséricorde et rencontrer des acteurs associatifs et des professionnels de santé libéraux à l’occasion de deux tables rondes. Au bilan, des échanges très riches comme le souligne Charlotte Parmentier-Lecocq.



(Photo : X Paul-André Colombani)
(Photo : X Paul-André Colombani)
- Aux côtés de Paul Christophe, le vice-président de la Commission des affaires sociales de l’Assemblée Nationale, et de Marc Ferracci vous venez d’effectuer un déplacement de deux jours à Ajaccio. Quel bilan tirez-vous de cette visite ?
- Un bilan très positif. L'objectif pour nous, c'était d'abord de pouvoir bien mesurer les spécificités de la Corse, parce qu'on a toujours comme préoccupation de s'assurer que les lois qu'on vote, les politiques qu'on porte, prennent bien en compte des particularités locales et qu'elles peuvent aussi, le cas échéant, être adaptées pour permettre d'atteindre les objectifs qu'on se fixe. Le deuxième objectif de notre déplacement, c'était aussi de créer du lien, de l'écoute, du dialogue avec l'ensemble des acteurs qui œuvrent pour l'accès aux soins. Ces deux objectifs sont bien atteints. Nous avons bien compris les particularités liées à cette île-montagne dont la topographie rend quand même difficile l'accès à certaines réponses aux besoins de santé, qui rend les déplacements aussi plus complexes. Or, ceux-ci prennent une place centrale dans l'accès aux soins et aussi dans le financement de l'accès aux soins. On a pu aussi prendre en compte le fait que la population vieillit peut-être plus vite que dans d'autres territoires. On a un vieillissement démographique un peu partout en France, mais en Corse on a à la fois un accroissement de la population et un vieillissement de la population. C'est vrai que cela rend les défis d'autant plus compliqués. Ce sont des choses aussi que nous avons pu mieux appréhender. Et ce dont on n'avait pas conscience avec mon collègue Paul Christophe, avec qui j'ai fait ce déplacement, c'est qu'il y a quand même une part de population dans la précarité qui est très importante. On est dans les mêmes ratios que les Hauts-de-France, ce que nous n’avions pas forcément en tête au départ.
 
- La précarité est effectivement une problématique prégnante en Corse. Ce vendredi matin, vous avez participé à une table ronde consacrée à ce sujet aux côtés d’associations qui agissent dans ce domaine. Qu’en avez-vous retiré ?
- Les politiques de solidarité, tel que le pacte des solidarités, viennent prendre corps ici aussi en Corse. Je pense à l'accès à la cantine à un euro, aux petits déjeuners gratuits, à toutes les mesures qu'on prend aussi pour le dédoublement des classes dans les quartiers plus difficiles. Tout cela, ce sont des mesures mises en place pour lutter contre la précarité à la racine. Il y a aussi le sujet de l'accès à l'emploi qui est vraiment notre fil rouge, notre leitmotiv. Nous avons partagé le constat que nous faisons aussi à l'échelle nationale de devoir absolument renforcer l'attractivité, surtout autour des métiers du lien social, des métiers de l'humain, puisque les besoins y sont très importants, aussi bien pour les travailleurs sociaux que pour les aides à domicile, et pour tous les métiers du soin auprès des personnes âgées et des publics vulnérables. Ce sont des gisements d’emploi sur lesquels il faut pouvoir travailler, développer des formations. On a pu voir que la Collectivité de Corse développe des actions de formation pour les aides-soignantes, par exemple. Tout cela va dans le bon sens et c'est aussi des choses qu’on promeut. Mais nous avons fait le constat ensemble qu'il y a encore beaucoup à faire sur ce champ-là.
 
- Dans le secteur de la santé, vous avez effectué jeudi une visite de l'hôpital d'Ajaccio. Dans quelques jours, le député Paul-André Colombani portera une proposition de loi visant à demander la création d’un CHU en Corse. Est-ce que cette visite d’un des établissements de santé les plus importants de l’île vous a permis de mieux appréhender le pourquoi de ce texte ?
- Oui, complètement. À la Commission des affaires sociales, nous examinons énormément de textes de loi sur des sujets très différents les uns des autres, mais qui sont tous primordiaux. Il n’y a pas de petits sujets quand on touche à la protection de l'enfant, au handicap, aux cancers pédiatriques, à l'accès aux soins, à l'insertion, au travail… Tous les sujets sont majeurs, et il important de pouvoir bien appréhender l'importance d'un texte. Quand il très localisé, comme la proposition de loi de Paul-André Colombani pour la création d'un CHU en Corse, il est vraiment important que nous puissions mieux échanger pour bien comprendre ses enjeux, son intérêt. Ici, ce que nous avons bien vu, c'est qu'il y a un portage assez fort, qui est partagé par tous les acteurs locaux, aussi bien élus qu’acteurs de la santé et même du médico-social et de la solidarité. C’est un point important. On voit que tous ces acteurs sont unanimes et on comprend vraiment que l'enjeu c'est de pouvoir vraiment stabiliser la présence de spécialistes. C'est que pour cela qu’on a besoin de pouvoir créer des filières qui puissent s'appuyer aussi sur de la formation. En tous cas, cela nous donne envie de les y aider et de les soutenir dans cette démarche. Ce qui est positif aussi, c'est qu'il y a aussi avec les services de l'État, avec l’Agence Régionale de Santé et la Caisse Primaire d’Assurance Maladie notamment, beaucoup d'échanges, de réflexions partagées. Il y a une recherche de tout le monde pour trouver des solutions. Cela met dans des conditions favorables pour porter des projets ambitieux comme celui de la création d'un CHU.
 
- Autre sujet prégnant en matière de santé, vous avez aussi pu mesurer la difficulté des Corses qui, pour raisons de santé, doivent se rendre sur le continent en rencontrant l'association Inseme…
Oui, tout à fait. C'est terrible de voir les difficultés que cela peut poser pour certaines familles. Mon collègue Paul Christophe travaille beaucoup sur le sujet des aidants, des parents dont les enfants sont malades, de la prise en charge de frais qui ne sont pas toujours pris en compte et qui sont pourtant nécessaires. Ces échanges au cours de notre visite nous ont permis d'évoquer ensemble les travaux que nous menons aussi là-dessus. Je pense qu'il y aura toujours, dans certains cas, nécessité de se déplacer sur le continent. Tout le monde en est conscient. Mais on voit aussi qu'il y a quand même un enjeu à pouvoir améliorer l'accès aux soins immédiats sur l'île, puisque d'abord ce qu'on nous disait, c’est que quand il y a des problématiques climatiques, cela rend les choses encore plus complexes car les transports entre la Corse et le continent peuvent être perturbés. Et puis, la nécessité de devoir se déplacer sur le continent peut aussi amener à des délais de prise en charge rallongés, peut créer une perte de chance, et même aussi un renoncement aux soins. Tout cela plaide aussi en faveur du renforcement de l'accès aux soins immédiats sur l'île. Et le CHU semble être une bonne composante de ce dispositif vers lequel il faut aller.