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En créant l’Aria il y a 25 ans, Robin Renucci voulait "que tout le monde ait un accès à la culture"


Alexandre Ugolini le Vendredi 28 Juillet 2023 à 18:03

Du 5 au 12 août prochains, l’Aria célébrera sa 25e édition des Rencontres internationales de théâtre en Corse à Mausoleo, Olmi Capella , Pioggiola et Vallica. Créée par le célèbre acteur et réalisateur Robin Renucci, cette association théâtrale bénéficie de sa propre enceinte, "A Stazzona", dans le village de Pioggiola. Celle-ci peut accueillir des artistes du monde entier ou encore des personnes attirées par la scène. Pour CNI, le créateur et président de l’Aria revient sur ce quart de siècle où le théâtre a gagné les villages du Giussani.



- Cela fait aujourd’hui 25 ans que l’Aria existe. Quel bilan tirez-vous ?
- Avant tout, l’accomplissement collectif des personnes qui ont toujours soutenu ce projet. C’est aussi une satisfaction collective pour les habitants, les élus et les conseils municipaux qui ont su se fédérer et avoir une véritable démarche de développement territorial. Notre pari était que l’activité de l’association se déroule tout au long de l’année et c’était d’autant plus difficile à imaginer dans un village de montagne très isolé. Mais on voit que cela marche depuis 1998 et c’est donc une réussite d’un point de vue artistique, mais aussi local.

- Qu’est-ce qui vous a poussé à créer cette association artistique et culturelle ?
Étant moi-même originaire de ces villages du Giussani, je voyais la désertification et l’isolement arriver au fil des années. Les écoles menaçaient de fermer à cause d’un manque d’élèves important. Ce qui m’a fait agir, c’était de constater le ras-le-bol de la population durant mon passage en tant que conseiller municipal de Pioggiola. J’ai vu un immense potentiel artistique et culturel pour relancer l'intérêt de ce territoire. Désormais l’aspect isolé est un atout, car il s’agit d’endroits calmes et magnifiques. Enfin, je voulais que tout le monde ait un accès à la culture et pas seulement les habitants des grandes villes.

- Avez-vous eu des appréhensions au moment de son ouverture ?
- Une chose importante lorsque l’on ouvre un chemin, c’est de nous demander si c’est la bonne route. Il faut savoir être responsable, car il y a toujours des risques. Nous avons la chance d’avoir une politique très saine donc nous ne pouvions que réussir. Maintenant, l’arbre est planté, il pousse très bien, et il faut l’entretenir.

- L’architecture du théâtre d'a Stazzona est assez originale. Comment vous est venue l’idée ?
- Il y a eu un concours d’architecte avec des propositions très différentes. Mais nous avons finalement retenu ce bâtiment cubique en bois de pin endémique. Les architectes ont très bien imaginé l’idée d’un théâtre en montagne, car il est labellisé de haute qualité environnementale et centre culturel de rencontres. Désormais, les gens viennent le voir, car il a une beauté qui s’est totalement intégrée au paysage.

- Qu’attendre de la 25ème édition des Rencontres internationales de théâtre en Corse qui se déroulera du 5 au 12 août ?
- Déjà, fêter ce quart de siècle c’est très important. Et puis, c’est retrouver des fidèles qui sont présents depuis le début. Nous nous attendons à ce qu’il y ait de la fête, de la joie et de belles représentations artistiques. Ce sera aussi une nouvelle occasion d’inspirer certaines communes qui souhaitent relancer leur économie et leur attractivité grâce à la culture.

- Si vous deviez ne citer qu’une seule de ces Rencontres ?
- L’édition de cette année. Elle fait écho à la toute première représentation, et nous rappelle d’où l’on vient. Nous nous retrouvons pour partager ce pain ensemble puisque c’est toujours la dernière fournée qui est la plus belle. Je pense qu’il faut vivre dans l’instant sans regarder le passé, tout en essayant d’imaginer l’avenir.

- Comment le théâtre a-t-il évolué aujourd’hui ?
- Il s’est développé sans regarder l’évolution intrinsèque de notre société. Il n’a pas su bouger de son endroit de toujours. Nous constatons que lorsque les bassins de vie sont plus petits, la culture s’éloigne de plus en plus. Même si de nos jours, celui-ci bouge vers son public afin de lui proposer des prestations artistiques comme nous le faisons, le théâtre s’est aussi perdu dans le showbusiness avec une dimension spectaculaire en oubliant la parole des artistes.

- Pensez-vous qu’en Corse, le théâtre est mis de côté ?
- Nous sommes sur une île qui est très attachée à sa culture, par conséquent les récits ne manquent pas. Donc il faut peu de choses pour que le théâtre s’installe dans la vie des gens. Sans compter les nombreux festivals et associations qui œuvrent pour développer les représentations théâtrales. Ils sont très importants et je les soutiens beaucoup.

- Quels sont vos projets personnels ?
- Je suis l’heureux directeur du théâtre de la Criée à Marseille. Je vais donc continuer mon rôle avec celui-ci en continuant à mettre en valeur le monde artistique et plus précisément théâtral. À côté de cela, je continue, de temps en temps, à tourner des films. Je suis donc très heureux de donner tout mon temps à la Corse et au Théâtre National de Marseille.