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En Corse, "une grande majorité des jeunes ne sait pas se servir d’un ordinateur"


Thibaud KEREBEL le Samedi 21 Janvier 2023 à 17:33

À l’occasion d’une journée pour l’inclusion numérique organisée à Borgo ce samedi 21 janvier, plusieurs acteurs du milieu ont décrypté l’intense fracture numérique qui touche la Corse. Et, contrairement aux idées reçues, les personnes âges ne sont pas les seules concernées.



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D’après les dernières statistiques, sur le territoire corse, plusieurs dizaines de milliers de personnes rencontrent des soucis avec le numérique. Un chiffre important qui se retrouve également à l’échelle nationale, puisqu’en France, l’INSEE dénombre 13 millions d’habitants dans cette situation. « Ici, nous avons une population très âgée, et statistiquement, les personnes âgées sont celles qui ont le plus de soucis avec le numérique », explique Bernardu Cesari, le directeur du Hub Corsica, une association centrée sur l’inclusion numérique. Forcément, une telle situation incite à créer des solutions, et c’est justement ce que fait l’association Emaho, qui organisait une journée d’accompagnement ce samedi 21 janvier à Borgo.

« Ce n’est qu’une toute petite partie de notre activité », précise Élodie Poignet, chargée de production au sein de la structure. « Notre credo, c’est l’inclusion numérique. Donc on fait de l’accompagnement, des interventions… Ce qu’on cherche, c’est de permettre à n’importe qui, jeune ou senior, d’accéder au numérique. » L’âge est justement l’un des points importants relevés par la représentante d’Emaho. Car si les seniors sont souvent les plus cités, il ne sont pas pour autant les seuls concernés. « Ces chiffres, ils viennent aussi du fait que les conseillers numériques ont des horaires de bureaux », complète Lucas Cadoppi, qui officie justement en tant que conseiller numérique. « Donc le public actif n’a pas forcément la possibilité de se rendre à des ateliers. »

La ruralité de la Corse accentue la fracture

« Dans mon travail, je côtoie beaucoup de familles, ou d’adultes entre 30 et 45 ans. Donc pas uniquement des seniors, loin de là », reprend le jeune employé d’Emaho. « Ils vont venir pour la création d’un compte sur un des sites du gouvernement par exemple. Ça peut être les impôts, la CAF, l’assurance maladie… Ce sont des sites qui demandent un vrai accompagnement, car si on n’a pas les bases, on ne s’y retrouve pas forcément. » D'autant que d’après Lucas Cadoppi, « le numérique évolue très vite, et si on ne se tient pas informé, on se retrouve rapidement largué ».

Les très jeunes populations ne sont pas non plus épargnées en Corse. Lucas Cadoppi mesure cette forme de fracture numérique lors des interventions qu’il effectue en milieu scolaire. « En fait, les jeunes ont beaucoup de compétences dans le maniement des réseaux sociaux, ou dans des domaines très intuitifs. Mais si on leur demande d’aller sur leur boite mail, ou de compléter des documents administratifs, on se rend compte qu’une grande majorité ne sait pas se servir ne serait-ce que d’un ordinateur. Ils ont également besoin d’un accompagnement. »

Malgré toutes les manœuvres mises en œuvre pour retisser du lien numérique, la grande difficulté réside souvent dans le fait d’aller chercher les demandeurs. « Dans certains endroits, comme les quartiers prioritaires, il y a des associations qui sont connues, et qui sont visitées par le public. Mais dans le monde rural, avec l’éparpillement qui existe entre les 350 communes corses, on a parfois du mal à toucher le public », déplore Bernardu Cesari, dont l’association, le Hub Corsica, travaille justement en ce sens. « L’importante ruralité de la Corse ne fait qu’amplifier la fracture. »