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En Corse, un dernier hommage à Dominique Bernard


David Ravier le Jeudi 19 Octobre 2023 à 21:23

Ce jeudi 19 octobre, les obsèques de Dominique Bernard ont lieu à Arras. En Corse, enseignants et parents d'élèves se sont rassemblés à Bastia, Ajaccio et Porto-Vecchio pour témoigner de leur soutien au professeur de français qui a été assassiné en fin de semaine dernière



Une centaine de personnes étaient réunies devant l'inspection académique de Haute-Corse pour honorer la mémoire de Dominique Bernard, le professeur de français assassiné par un terroriste à Arras vendredi 13 octobre.
Une centaine de personnes étaient réunies devant l'inspection académique de Haute-Corse pour honorer la mémoire de Dominique Bernard, le professeur de français assassiné par un terroriste à Arras vendredi 13 octobre.
C’était leur manière de montrer leur soutien face à la barbarie. Enseignants, parents d’élèves, membres du rectorat ou simples citoyens, ainsi que le préfet de Haute-Corse, Michel Prosic, tous étaient là pour honorer la mémoire de Dominique Bernard, ce professeur de français de collège-lycée à Arras (Pas-de-Calais) poignardé à mort vendredi 13 octobre par un ancien élève radicalisé. Ils étaient environ une centaine à s’être donné rendez-vous devant l’inspection académique de Haute-Corse, à Bastia, pour montrer leur soutien face à ce péril qu’ils n’imaginaient pas possible. Puis ils se sont tus, à dix-huit heures précise, pour une minute de silence, où chacun y est allé de son recueillement face à cette tragédie qui les affecte chacun à leur manière. « J’ai tenu à venir en tant qu’enseignant et en tant que citoyenne parce que je me sens directement touché, comme un deuil personnel. C’est un des nôtres qui a été tué, parce qu’il était professeur, indique Pascale, une professeure de français dans un collège de Bastia qui a souhaité changer son prénom pour préserver son anonymat. En tant qu’enseignant, il y a l’angoisse de la perte des valeurs auxquelles je crois telle que la laïcité, le respect de la vie humaine, de l’autre et du savoir. Quand j’ai choisi ce métier, je n’imaginais pas tout cela ». Giulia, sa collègue de SVT qui a elle aussi souhaité changer de prénom, abonde dans son sens. Si elle a tenu à venir à ce rassemblement, c’est parce qu’elle n’a « pas envie de que ça devienne quelque chose de banal. C’est le deuxième professeur tué par un terroriste, et c’est le troisième en trois ans en comptant une collègue qui a été assassiné il n’y a pas longtemps [Agnès Lassalle, professeure d’espagnol poignardée en plein cours le 22 février dans son lycée de Saint-Jean-de-Luz, NDLR]. Nous ne sommes pas censés être un métier à risque, en théorie ce genre d’attaques ne devraient pas nous toucher ».

Un autre rassemblement a eu lieu à Ajaccio. Photo Paule Santoni
Un autre rassemblement a eu lieu à Ajaccio. Photo Paule Santoni

La faillite d’un système ?
Tous les professeurs présents devant l’inspection académique de Haute-Corse ainsi que devant le Rectorat à Ajaccio font état du même sentiment de sidération face à ce drame, mais également de la forte dégradation de leur condition de travail, où le lien entre les élèves et les enseignants est plus que jamais mis à mal. C’est en tout cas ce que souligne François, professeur de mathématique dans un collège de Bastia, qui affirme que « pour la première fois, il y a des enseignants qui ont peur de se rendre à leur travail, même à Bastia. Certains collègues ont fait la demande d’avoir des bombes anti-agressions. On m’aurait dit ça il y a cinq ou dix ans, j’aurais trouvé ça impensable ».


Selon certains enseignants, les dégradations des conditions de travail du corps enseignant, qui ont conduit à au drame de Dominique Bernard, sont en partie dues à la politique de l’autruche que mène l’Éducation nationale depuis des années « Il y a toujours eu le principe de l’État qui nous imposait de ne pas faire de vague et de minimiser les choses. Il fallait toujours régler les problèmes dans la salle de classe, voire au pire dans l’établissement sans que cela ne déborde jamais à l’extérieur. Cependant, à force de faire croire que tout va bien et que tout est sous contrôle, trop de choses négatives se sont accumulées, et nous voilà maintenant confrontés à cette réalité », déplore François, professeur de mathématique.

Si toutes les interrogées réclament de meilleures conditions pour pouvoir enseigner sereinement, la professeure de SVT rappelle que « dans mon quotidien, je ne me sens pas en danger en tant que professeur, je ne vais pas au travail avec la boule au ventre qu’il m’arrive quelque chose. Mais d’un autre côté, je ne peux pas m’empêcher de penser que Dominique Bernard non plus ne devait pas se sentir en danger », conclut Giulia.


Le recteur d'académie était aussi présent au rassemblement ajaccien
Le recteur d'académie était aussi présent au rassemblement ajaccien

Plus d’une centaine de personne se sont aussi rassemblées à Porto-Vecchio
Plus d’une centaine de personne se sont aussi rassemblées à Porto-Vecchio